Raphaël. L’œuvre complet

Ne resterait à publier que de maigres rogatons ou – ainsi vont les fantasmes – des découvertes merveilleuses, brandies à un rythme soutenu. Ici, rien de tout cela. Rien, malgré l’ampleur du nom : Raphaël (1483-1520), idole inégalée de la Renaissance, si l’on veut bien dénombrer ses pâles épigones, ses admirateurs majeurs et ses héritiers autoproclamés, toute cette folle généalogie enfantée par le maître d’Urbin. Cet ouvrage, qui ambitionne purement et simplement d’étudier l’œuvre complet, est une anthologie de choix, et de poids (5,7 kg, 720 pages, 29 x 39,5 cm). Superlative, cette somme monumentale réunit les noms de quatre spécialistes du maître et, au terme d’une approche chronothématique évoquant tour à tour les réalisations ombriennes, les chambres vaticanes, les retables romains ou les portraits profanes et sacrés, offre quatre catalogues irréprochablement exhaustifs des peintures, des fresques, des tapisseries et de l’architecture. Chaque œuvre, savamment discutée, donne lieu à une analyse stylistique et historique, manière de la situer dans un corpus médusant et d’assigner les dernières considérations scientifiques. Particulièrement profuse, l’iconographie est à la hauteur : une photogravure soignée permet en effet de déployer symboliquement et physiquement (notamment par des pages dépliables) une création où la fécondité le dispute à la brièveté, ce parfait alliage du génie. Car combien d’artistes auront fourni autant de canons formels et de solutions plastiques, auront infléchi ainsi l’histoire des formes de sorte que leur prénom, qui valait pour nom, devint synonyme de perfection ? Combien auront vu leurs œuvres auréolées de telles énigmes ? Combien auront fouillé avec cette virtuosité tous les domaines du visible ? L’ouvrage aura assurément ce mérite : affronter, jusqu’à les supprimer, de nombreux points d’interrogation…