Traversée de l’art et des régimes politiques du XXe siècle, L’Œuvre sans auteur est désormais disponible en DVD et Blu-ray.
Il faut bien deux disques pour dérouler la saga du peintre Kurt Barnet, qui découvre sa vocation sous le nazisme, fait ses classes sous le communisme et atteint la gloire sous le capitalisme. L’entracte reproduit la rupture qui marque son destin, le « passage à l’Ouest » quelques mois avant la construction du mur de Berlin. Ensuite, dans sa meilleure partie, L’Œuvre sans auteur nous plonge dans les ateliers de l’Académie des beaux-arts de Düsseldorf, mare asséchée où les élèves se complaisent dans des monochromes répétitifs, des dripping mollassons ou des performances absurdes. En fuyant le bloc Est, Kurt s’est détaché des sempiternelles fresques à la gloire des travailleurs. Dans le monde libre, il affronte de nouvelles contraintes. Ce destin s’inspire de celui de Gerhard Richter, et il est plus regrettable qu’aucun complément n’accompagne cette édition. Richter aurait participé à l’élaboration du film, avant de carrément refuser de voir son nom accolé au projet de Florian Henckel von Donnersmarck dans lequel il ne se reconnaissait plus. Finalement, l’artiste aurait daigné jeter un œil… à la bande-annonce. On l’imagine un peu gêné par l’importance d’une sous-intrigue alambiquée : l’histoire d’amour de Kurt avec la fille du médecin machiavélique qui, pendant la guerre, a envoyé sa tante, déficiente mentale, à la chambre à gaz. Égaré dans les arcanes de cette romance, le film néglige son axe fort : raconter comment, dans les remous de l’Histoire, un peintre parvient à ouvrir une voix singulière. Florian Henckel von Donnersmarck a toutefois l’excuse de ne jamais trouver la sienne. Malgré l’ampleur symphonique de son montage, L’Œuvre sans auteur laisse le sentiment d’une mise en scène trop étriquée pour son personnage. Cependant, pour cette raison même, le format vidéo lui convient bien et ce film ne souffre pas de se transformer en téléfilm.
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L’œuvre sans auteur
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°732 du 1 mars 2020, avec le titre suivant : L’œuvre sans auteur