La foire d’art contemporain mexicaine ne parvient pas à hausser son niveau et l’offre qu’elle propose n’est globalement pas acceptable. La faute sans doute à un marché endogame.
MEXICO - L’avant-veille de l’inauguration de Zona Maco, à Mexico, une paroi du stand de la galerie Labor (Mexico) s’est subitement effondrée lors du montage… sur un mur voisin de Kurimanzutto (Mexico), causant au passage des dégâts irrémédiables sur quelques œuvres. S’agissait-il d’un signe annonciateur de la piètre qualité de la manifestation, qui du 4 au 8 février a réuni 137 galeries en provenance de 21 pays ?
Des galeries d’un niveau passable
Le fait est que le niveau général serait bien en dessous de la moyenne si une notation devait lui être appliquée, et l’adjectif « médiocre » semble le plus approprié pour la qualifier. Manifestement les organisateurs peinent à attirer des galeries excitantes, et, confrontés aux impératifs commerciaux, en viennent à sélectionner quantité de galeries d’un niveau passable, voire moindre, pas seulement latino-américaines mais aussi en provenance d’Europe ou des États-Unis. L’inflation du nombre de foires dans le monde n’aide certainement pas, mais une autre raison tient sans doute à la nature et à la qualité du marché mexicain lui-même, où pourtant s’active une scène créative bouillonnnante et bien dotée en galeries et institutions.
« C’est un marché difficile, confiait ainsi une galeriste sud-américaine, très endogame, un peu comme au Brésil. » Ce qui signifie que, pour l’essentiel, les Mexicains achètent des artistes mexicains à des galeries mexicaines. Certains marchands pointent également des faiblesses structurelles, tel cet exposant relevant qu’« il y a quelques très gros collectionneurs au Mexique, mais finalement peu de collectionneurs à l’assise financière moyenne », de ceux qui précisément permettent de maintenir pour les galeries un flux d’activité régulier. D’autres affirment pouvoir y faire quelques affaires, en raison de la présence accrue de sociétés d’amis de musée, américaines mais aussi européennes, telles celles de la Tate ou du Centre Pompidou. Ce qui n’a pas pour autant assuré une déferlante étrangère.
Bien peu de grandes galeries avaient fait le déplacement. Étaient de la partie les new-yorkais Gladstone et David Zwirner, Victoria Miro (Londres), Continua (San Gimignano) et Mai 36 (Zurich). C’est peu ! Cela pourrait cependant être suffisant si l’alternative était de qualité, ce qui fut loin d’être le cas. De l’ensemble s’imposait le stand de la Galería de arte mexicano (Mexico) entièrement bordé de panneaux de bois de Stefan Brüggemann. Couverts de graffiti évoquant les tensions sociales dans le pays, ces cloisons présentaient sur chacune un unique grand dessin de Diego Rivera, José Clemente Orozco et David Alfaro Siqueiros… ou comment perpétuer une certaine idée du muralisme !
Un vrai « off »
Dévolue aux jeunes enseignes, au nombre ici de 22, la section « Nuevas propuestas » en laissait avec peine émerger trois : Wu Galería (Lima), James Fuentes (New York) et Proyectos Ultravioleta (Guatemala City). Le seul centre d’intérêt a consisté en la section « Zona Maco Sur » consacrés à des projets monographiques, placée cette année sous le commissariat des Portugais João Mourão et Luís Silva. Il était possible d’y trouver de belles propositions de José Vera Matos chez Document Art (Buenos Aires), Angela Ferreira chez Filomena Soares (Lisbonne), Rosa Barba chez Meyer Riegger (Berlin), ou Gabriel Acevedo chez 80 m2-Livia Benavides (Lima).
Mais comme à Mexico rien ne se fait comme ailleurs, c’est plutôt du côté du « off » qu’il fallait se tourner, avec la seconde édition de Material, lancée par Brett W. Schultz, directeur de la galerie Yautepec (Mexico), à partir de la difficulté de certains galeristes à se retrouver dans l’organisation de Zona Maco. Si parmi les 40 exposants tous n’étaient pas inoubliables, une belle énergie se dégageait de l’ensemble, en particulier en provenance des stands de Mary Mary (Glasgow), Rolando Anselmi (Berlin), Lulu (Mexico) ou P! (New York). Surtout, la foire a évité les écueils de nombre d’« off », en présentant des projets et non des stands fourre-tout, et en restreignant la présence de la mauvaise peinture.
Zona Maco n’est pas partageuse et a sommé de faire un choix les quelques enseignes qui avaient émis le désir de participer aux deux manifestations, comme cela se fait par exemple à New York, avec l’Armory Show, The ADAA Art Show et Independent. Une attitude qui ne permet pas vraiment d’entretenir une dynamique, sur un marché encore émergent et malaisé.
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Zona Maco, une édition très médiocre
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°429 du 13 février 2015, avec le titre suivant : Zona Maco, une édition très médiocre