PARIS
Découvert récemment, un tableau de Salaì est mis en vente le 18 novembre chez Artcurial. Un événement puisque seule une poignée d’œuvres est attribuée à l’artiste.
Paris. Persuadés d’avoir entre leurs mains une œuvre léonardesque, les propriétaires d’un tableau représentant Marie Madeleine à mi-corps sur un fond noir se sont rapprochés de Patrick de Bayser, l’expert en dessins anciens qui avait découvert en 2016 le dessin de Léonard de Vinci (Le Martyre de saint Sébastien). Ce dernier a fait appel à Éric Turquin, expert en tableaux anciens. « Pour être franc, je pensais que l’œuvre était de Giampietrino (1480/1485-1553), un suiveur de Léonard. J’ai donc contacté la spécialiste de ce peintre, Cristina Geddo, qui m’a dit que ce n’était pas de sa main mais de celle de Salaì », relate Éric Turquin.
Cette découverte est importante pour l’histoire de l’art car on connaît seulement quatre ou cinq tableaux, dont Le Christ rédempteur, de Salaì, de son vrai nom Gian Giacomo Caprotti (1480-1524). Offert à la pinacothèque Ambrosienne de Milan par un généreux donateur après son achat en 2007 chez Sotheby’s New York pour 656 000 dollars, c’est ce tableau qui a révélé pour la première fois le travail de Salaì dont l’existence n’était connue que par des textes. Signé et daté (1511), ce panneau représentant le Christ a permis à Cristina Geddo de reconstituer le petit corpus de Salaì.
« Nous savions que Salaì était le plus proche collaborateur de Léonard de Vinci », souligne Éric Turquin. Entré dans l’atelier du maître de la Renaissance à l’âge de 10 ans, Salaì a travaillé avec lui pendant plus de vingt-cinq ans, le suivant dans toutes ses installations, y compris en France. Il préparait ses tableaux, servait de modèle… « Voleur, menteur, têtu et glouton », Léonard lui-même l’avait affublé du surnom de « petit diable ».
Au cours de ces longues années passées auprès de Léonard, Salaì a eu tout le loisir d’assimiler son style et sa technique, qu’il a d’ailleurs mis en œuvre dans cette Madeleine pénitente (vers 1515-1520), comme le fameux sfumato, obtenu par l’application de glacis superposés.
D’autres éléments ont permis à Cristina Geddo d’attribuer l’œuvre, toujours grâce à sa confrontation avec celle conservée à l’Ambrosienne. Ainsi, la manière dont l’artiste a peint les yeux, avec un trait blanc soulignant la paupière inférieure, et sa façon d’insister sur le traitement des cheveux, sont caractéristiques de son art. « Salaì avait une sorte de tic : il représentait des personnages très chevelus, très poilus. Nous avons fait faire un infrarouge du tableau, ce qui a permis de révéler très distinctement le dessin des cheveux, comme une gravure », explique Éric Turquin. Le fait de nouer les cheveux de Madeleine sur la poitrine, tel un nœud papillon, est également très singulier et représentatif de la manière du peintre.
L’œuvre, estimée raisonnablement entre 100 000 et 150 000 euros, devrait enflammer les enchères, et, si seulement cinq tableaux ont été attribués à l’artiste, il y a fort à parier qu’il en reste de nombreux autres à découvrir, circulant peut-être sous d’autres attributions.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Un Salaì, proche collaborateur de Léonard, à l’encan
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°555 du 13 novembre 2020, avec le titre suivant : Un Salaì, proche collaborateur de Léonard, à l’encan