PARIS
Pascal Cuisinier met en lumière la démarche commune aux designers et céramistes dans les années 1950 à 1970.
Paris. La galerie Pascal Cuisinier, spécialisée dans la première génération des designers français entre 1950 et 1961, est particulièrement prolifique en matière d’expositions. Aujourd’hui, ce n’est ni une exposition monographique (comme pour Pierre Paulin, Joseph-André Motte ou René-Jean Caillette), ni une exposition thématique (sur le bureau, les luminaires ou les héritiers de l’UAM, Union des artistes modernes). « C’est une présentation plus large et il y a une raison de fond à cela. La relation entre le beau et l’utile est à l’origine de tout ce qui va se dérouler au cours du XXe siècle. C’est la base du travail de l’UAM [association fondée en 1929], puis de Formes utiles qui lui succède [1949-1987]. Or, tous les designers que je défends sont issus de ce mouvement », explique le galeriste. L’après-guerre voit en effet émerger l’esthétique industrielle, selon laquelle le beau naît de l’adéquation entre la forme et la fonction, « et ces designers cherchent le beau dans l’utile ».
Simultanément, un groupe de potiers de la même génération va révolutionner la céramique utilitaire à La Borne (Cher), passée de mode après son âge d’or au XIXe siècle. Ce village berrichon est spécialisé dans les grès depuis le XIIIe siècle, grâce à la présence de terre ferrugineuse et à sa situation privilégiée au milieu de la forêt (une grande quantité de bois est nécessaire pour atteindre les 1 300 °C de cuisson). Exerçant d’abord dans la plus pure tradition, ces potiers font façonner des pièces utilitaires (services de table, bols, vases, épis de faitage), puis, petit à petit, ils vont renouveler et moderniser les formes. « Ce ne sont pas des artisans à proprement parler car ils sont issus des Beaux-Arts, des Arts déco… », explique le galeriste. Initiée par Jean et Jacqueline Lerat, cette nouvelle génération de céramistes compte parmi ses membres Élisabeth Joulia, Barbara Delfosse, Jacques Blin, Pierre Mestre, Charles Gaudry…
« J’ai donc découvert que mes designers et ces céramistes – que je montre de plus en plus depuis deux ans –, issus des mêmes écoles, ont apporté une forme de modernité dans leurs spécialités respectives. Ils n’ont pas méprisé les objets utilitaires et se sont servis de la fonction de l’objet pour mettre en avant leur créativité. »
Les pièces, au nombre de 200 environ, sont exposées par type. Les chaises d’un côté, les lampadaires de l’autre, sont placés sur des estrades ; les vases sont disposés sur une étagère, chacun ayant une forme adaptée au type de fleurs qu’il va accueillir. Au sous-sol se trouvent les lampes et une collection de bols et de pièces de vaisselle. « J’ai toujours défendu l’idée selon laquelle les arts appliqués, les arts décoratifs, sont au même niveau que les beaux-arts. » Les prix débutent à 300 euros pour un bol ou une assiette et peuvent atteindre 30 000 euros pour les pièces exceptionnelles, comme l’applique à double balancier de Robert Mathieu, ou l’enfilade « série 800 » d’Alain Richard, 1961, de 3 m de long (en seulement 10 exemplaires, [voir ill.]). « Dans cette enfilade, qui est un meuble raffiné et minimaliste, tout a été pensé, toute la forme découle de la fonction : s’il paraît un peu haut, c’était pour que la maîtresse de maison n’ait pas à se baisser. S’il est profond (60 cm), c’est pour pouvoir ranger les grands plats, et si les poignées sont en forme de cône, c’est pour mieux les saisir. »
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Un rapprochement inédit entre le design et le grès
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°631 du 12 avril 2024, avec le titre suivant : Un rapprochement inédit entre le design et le grès