Les ventes de Sotheby’s et Christie’s affichent un net recul par rapport à l’an passé.Des résultats qui annoncent une période de réajustements du marché
NEW YORK - 286 millions de dollars (250,7 millions d’euros), c’est le produit cumulé de Sotheby’s et Christie’s pour leurs ventes du soir d’art impressionniste et moderne, soit un total en recul de près de 50 % par rapport à mai 2015 (à l’exclusion de la vente Looking Forward to the Past qui avait rapporté 705,8 millions de dollars).
Pourquoi cette baisse ? Tout simplement parce que le système des garanties a trouvé ses limites. Aussi, les maisons de vente ont dû réajuster le tir et proposer des estimations moins hautes, ce qui a eu pour conséquence de rendre les vendeurs plus frileux. « Avec la collection Taubman, les garanties ont dopé artificiellement les estimations, mais aujourd’hui le marché ne veut plus suivre. Aussi, les maisons de ventes ont été contraintes de proposer des estimations bien en dessous du niveau des garanties de l’an passé. Les vendeurs ont alors remisé leurs œuvres, ne souhaitant pas être les boucs émissaires du marché », explique Thomas Seydoux, conseiller en art. Des catalogues de volume réduit, moins fournis en chefs-d’œuvre et des ventes non homogènes donc. « Mais compte tenu de ce qui était proposé et en l’absence de grosse collection, les deux maisons de ventes se sont plutôt bien débrouillées. Cependant, il faudra attendre quelques saisons avant que les vendeurs potentiels acceptent les nouveaux prix », poursuit-il.
Un record pour Rodin
Le soir du 9 mai, Sotheby’s inaugurait la séquence et récoltait 144,5 millions de dollars (127 millions d’euros), sous son estimation basse (164,8 millions). Un tiers des œuvres n’a pas trouvé preneur. L’an passé, la vente (368,3 millions de dollars) avait été stimulée par L’allée des Alyscamps, de Van Gogh, adjugé 66,3 millions de dollars mais l’auctioneer enregistre tout de même une baisse de 60 %. Son lot phare, Les voiles rouges, d’André Derain (est. 15 à 20 millions de dollars) est resté sur le carreau. Une estimation trop élevée ainsi qu’un sujet moins plaisant – cette grande voile rouge propulsée au premier plan – n’y sont pas étrangers. L’enchère la plus élevée de la session est allée à L’Éternel Printemps (1901-1902), un marbre de Rodin. Vendue 20 millions de dollars, l’œuvre a doublé son estimation initiale (8 à 12 millions de dollars) et établi un record mondial pour l’artiste, supplantant Eve, grand modèle, version sans rocher (18,9 millions de dollars, Christie’s New York, mai 2008). Parmi les autres lots stars, Sous-bois, 1905, de Maurice de Vlaminck, a été adjugé 16,4 millions de dollars (est. 12 à 18 millions de dollars), tandis que Maisons du Port, Saint-Tropez, de Signac, s’est vendu 10,6 millions de dollars (est. 8 à 12 millions). Mis à part ces lots, le reste était de qualité très inégale. Une mauvaise passe pour Sotheby’s, qui annonce pour le premier trimestre 2016 une perte de 26 millions de dollars contre un bénéfice de 5 millions en 2015. La société doit également faire face à une vague de départs de ses plus éminents spécialistes dans différents départements.
Des acheteurs de plus en plus exigeants
De son côté, Christie’s a récolté 141,5 millions de dollars (124 millions d’euros), moins que Sotheby’s donc, mais elle dispersait moins de lots (51 contre 62). Cantonnée dans la limite de son estimation basse (138,3 à 203,4 millions de dollars), elle enregistre une baisse de 30 % par rapport à mai 2015 (202,6 millions de dollars), mais affiche un bon taux de vente, soit 86 %. La maison de vente a réussi à céder presque tous ses lots phare dont Le Bassin aux nymphéas (1919) de Monet, vendu 27 millions de dollars dans la fourchette de son estimation (est. 25 à 35 millions), un bon prix lorsque l’on sait que ce tableau a été coupé en deux vers 1944 et que l’autre partie est au musée de Tel Aviv ; Jeune femme à la rose (Margherita) [1916] de Modigliani, adjugé 12,7 millions de dollars (est. 2 à 18 millions) ou encore Mandoline à la partition (1941) de George Braque pour 10,2 millions de dollars (est. 7 à 9 millions). Mais elle n’est pas parvenue à vendre Madame de Galéa à la méridienne, de Renoir (est. 8 à 12 millions de dollars).
« Désormais, la belle signature ne suffit plus. Il faut que le tableau soit décoratif, gai, coloré et lumineux. Pour ces œuvres, comme le Vlaminck, ça fonctionne. Pour les autres, il faudra encore baisser les estimations », conclu Thomas Seydoux.
Toutes les estimations sont indiquées hors frais acheteur tandis que les résultats sont indiqués frais compris.
Résultat : 141,5 millions de dollars (124 millions d’€)
Estimation : 138,3 à 203,4 millions de $
Nombre de lots vendus : 44 sur 51 (86 %)
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Un marché en transition
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Résultat : 144,5 millions de dollars (127 millions d’€)
Estimation : 164,8 à 235,8 millions de $
Nombre de lots vendus : 41 sur 62 (66 %)
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°458 du 27 mai 2016, avec le titre suivant : Un marché en transition