Antiquaire

Trois antiquaires du Faubourg Saint-Honoré éveillent les sens

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 7 juin 2021 - 737 mots

PARIS

Pour fêter leur réouverture, trois marchands parisiens s’associent pour organiser au même moment une exposition dans leur galerie respective.

Georges Jacquot, Jeune faune et Bacchante, vers 1833, marbre, 113 x 148 x 46 cm. © WestImage/Galerie Perrin
Georges Jacquot, Jeune faune et Bacchante, vers 1833, marbre, 113 x 148 x 46 cm.
© WestImage/Galerie Perrin

Paris. Dans un rayon de 200 m2, au cœur de Paris, trois galeries réputées – Coatalem, Perrin et Sarti – s’unissent le temps d’une exposition, chacune dans leur espace et sur un thème de leur choix. « Nous nous sommes décidés en fin d’année dernière. Il ne se passait rien, c’était l’occasion », rapporte Philippe Perrin. « Nous travaillons souvent ensemble tous les trois », ajoute Éric Coatalem. « Nous voulions inciter les gens à aller visiter les galeries », ajoute Giovanni Sarti. C’est un véritable voyage sensoriel qui attend les visiteurs.

Avec son exposition « Éloge de la sculpture : 1600-1900 », c’est le toucher qui est stimulé à la galerie Perrin. Une vingtaine de pièces sont présentées, regroupées par matériau. Dans la première salle – celle des terres cuites – trône Lucas et Milon, de Johann Valentin Sonnenschein, « le Clodion suisse » (vers 1770, 180 000 €). Dans la salle consacrée aux marbres se trouve Jeune faune et Bacchante, de Georges Jacquot [voir ill.], présenté au Salon de 1833 et à l’Exposition universelle de 1855, provenant du château de Pontchartrain (750 000 €). Dans la pièce suivante, on peut découvrir une paire de bas-reliefs en bois du sculpteur liégeois Antoine-Marie Mélotte (1722-1795), l’un représentant la Bataille des Amazones d’après Pierre Paul Rubens et l’autre La Victoire de César contre Pompée – l’artiste avait pour habitude de s’inspirer d’œuvres peintes célèbres ou de grands événements historiques (380 000 €). L’exposition se termine par un ensemble de sculptures symbolistes, dont Le Silence d’Auguste Préault (vers 1849), qui introduit pour la première fois le symbolisme en sculpture et La Novice (vers 1888), une cire originale de Jean Joseph Carriès représentant sa sœur, provenant de la collection Ménard Dorian (150 000 €).

À la galerie Coatalem, c’est la vue qui est sollicitée, avec une soixantaine d’œuvres d’Hubert Robert (1733-1808). Conservés dans des collections privées, ces sanguines, aquarelles, grands formats et tableaux de chevalet sont pour moitié présentés au public pour la première fois, tandis qu’un tiers est à vendre, pour des prix allant de 15 000 à 800 000 euros.

Fasciné par les antiquités romaines qu’il découvre lors de son séjour en Italie, de 1754 à 1765 – mais aussi grand observateur des bouleversements de son temps –, Hubert Robert est l’un des plus grands représentants au XVIIIe siècle de la poétique de la ruine. En sillonnant l’Italie, il accumule quantité de croquis, source inépuisable pour ses œuvres futures. On peut admirer une sanguine préparatoire au Port de Ripetta à Rome [tableau déposé au Musée de l’École nationale supérieure des beaux-arts], son morceau de réception à l’Académie royale de peinture et de sculpture, en 1766 ; un rare paysage, Les Sources de Fontaine-de-Vaucluse, montré lors de la rétrospective au Louvre en 2016 ou Portique entourant un vaste bassin, de 1788, parfaite illustration de sa maîtrise de la perspective. Au mur, trois rares assiettes – sur la cinquantaine connue à ce jour – sur lesquelles l’artiste a peint, lors de son séjour en prison entre 1793 et 1794 (autour de 100 000 €). Un catalogue accompagne l’exposition : « Il traite de l’apport de Rome dans les œuvres d’Hubert Robert lorsqu’il rentre à Paris », précise l’auteure, Sarah Catala, spécialiste du peintre. Quelques dessins de Jean-Honoré Fragonard, grand ami d’Hubert Robert, rencontré à Rome, sont également accrochés.

Enfin, c’est à la galerie Sarti que l’ouïe – en plus de la vue – est exaltée. « Sons et couleurs » met en scène vingt-deux tableaux, du XIVe au XVIIIe siècle, replacés dans le contexte musical de leur époque, du chant grégorien à l’oratorio, en passant par l’opéra. Des audioguides diffusent une musique différente pour chaque œuvre. Ainsi, on découvre une Vierge à l’enfant, un triptyque de Simone dei Crocifissi, vers 1355 (autour de 250 000 €) au son du madrigal « Fenice fu’ e vissi » de Jacopo da Bologna ; Saint François recevant les stigmates, vers 1435, une tempera de Bicci di Lorenzo (aux alentours de 150 000 €), accompagnée du « Laudario di Cortona (laude n°28) » ; Le Songe de saint Joseph, vers 1440, par le Maître de l’Observance, sur un chant grégorien, la « Messe de Joseph » (un musée est déjà intéressé par l’œuvre) ; Samson et Dalila de Bernardino Mei (vers 1657), accompagné de l’adagio « Assai & net seren de’ miei contenti », d’Alessandro Stradella ou encore Judith avec la tête d’Holopherne de Matteo Loves (vers 1625, autour de 350 000 €), au son de l’oratorio « Giuditta » d’Alessandro Scarlatti.

Galeries Coatalem, Perrin et Sarti,
jusqu’au 3 juillet, rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°568 du 28 mai 2021, avec le titre suivant : Trois antiquaires du Faubourg Saint-Honoré éveillent les sens

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