La galerie Daniel Malingue rend un très bel hommage à l’un des plus grands peintres surréalistes : Yves Tanguy.
En réunissant une quarantaine d’œuvres significatives de sa carrière, le marchand propose une petite rétrospective de l’univers onirique de Tanguy, quelque vingt ans après la dernière exposition monographique consacrée à l’artiste.
PARIS - En marge de l’exposition “La révolution surréaliste” du Musée national d’art moderne (Mnam), à Paris, la galerie Malingue a choisi de rendre hommage, jusqu’au 12 juillet, au peintre Yves Tanguy (1900-1955). À travers une quarantaine d’œuvres – huiles, gouaches et dessins –, pour la plupart issues de collections privées, les galeristes ont essayé de mettre en place une véritable rétrospective. “Nous voulions montrer l’évolution de l’œuvre d’Yves Tanguy à travers des toiles emblématiques des différentes périodes de sa carrière, nous explique Édouard Malingue. L’exposition du Mnam ne propose que des œuvres des années 1926-1927, et d’une manière générale les adjudications les plus importantes en ventes publiques concernent également les années 1927-1928. Or, les années 1930, 1940 et 1950 sont également importantes et restent relativement méconnues.” En quelques mois, les marchands ont réussi le pari de réunir un ensemble de tableaux en provenance d’Amérique du Sud, des États-Unis et de collections européennes, performance d’autant plus remarquable que le corpus total de l’œuvre de Tanguy ne dépasse pas les 800 toiles.
La légende veut que Tanguy ait ressenti de manière soudaine sa vocation de peintre à l’âge de vingt-trois ans devant des toiles de Giogio De Chirico. Il partage à cette époque une maison rue du Château, à Paris, avec les frères Prévert et Marcel Duhamel qui l’encouragent dans cette voie. Rares sont les œuvres subsistant de cette première époque figurative que Tanguy s’est lui-même attaché à détruire. Les Forains et Le Phare, deux toiles de 1926, ouvrent l’exposition et apparaissent véritablement comme des tableaux de jeunesse, presque sans rapport avec les paysages oniriques qui forment la quasi-totalité de l’œuvre du peintre. La rencontre avec André Breton en 1925 est déterminante. Rapidement, Tanguy rejoint le groupe surréaliste et expérimente les techniques automatiques, décidé àa exclure de ses compositions toute forme de logique et de raison pour laisser une plus grande place au monde du rêve. Les toiles réalisées à partir de 1927 ressemblent à des songes : elles proposent un univers qui est une réminiscence des rêves du peintre, proche du monde aquatique, au sein duquel les éléments semblent en apesanteur. Un tableau de 1928, Les Profondeurs tacites, marque le début d’une évolution de cet univers. Le monde aquatique se distingue d’un autre, plus aérien, avec lequel il est en contact. Apparaissent également dans ses tableaux de grandes incisions de formes triangulaires qui relient différents éléments de la composition et resteront un leitmotiv dans les œuvres postérieures.
À partir de 1930, l’univers de Tanguy bascule. C’est dans une atmosphère désertique et d’une grande luminosité que se situent désormais des formes minérales. Les tableaux sont réalisés avec la précision technique d’un miniaturiste, même s’ils n’ont jamais fait l’objet de compositions préparatoires : “Le tableau se développe sous mes yeux, déployant ses surprises au fur et à mesure qu’il s’élabore. C’est cela qui me donne le sens de la liberté totale, et, pour cette raison, je suis incapable de concevoir un plan ou de dessiner une esquisse préalable.” L’Ennui et la Tranquillité, grande composition de 1938, est l’une des œuvres les plus significatives de cette époque. Son format, ses qualités plastiques, et principalement la précision et la beauté de ce paysage onirique, en font l’un des chefs-d’œuvre de l’exposition. Après 1939, année du départ de Tanguy pour les États-Unis, un certain nombre de changements apparaissent. Dans un premier temps, une évolution de la palette du peintre, qui emploie des couleurs beaucoup plus vives, comme en témoignent Bélomance II, ou encore Feu couleur, deux toiles de 1941. Peu à peu, les motifs changent également, les concrétions autrefois minérales deviennent osseuses, la verticalité est de plus en plus marquée, et, d’une manière générale, l’atmosphère des toiles se refroidit, plus proche d’un monde de cauchemar. Ces aspects sont à leur paroxysme dans les deux toiles les plus tardives de l’exposition, Perspective et Les Saltimbanques.
La quarantaine de toiles rassemblées par la galerie Malingue permet d’appréhender les différents aspects de l’œuvre, principalement peint, d’Yves Tanguy. Pour l’occasion, un catalogue a été édité, destiné à guider la visite puisque les galeristes ont choisi de ne pas accompagner les œuvres de cartels.
- Galerie Daniel Malingue, 26 avenue Matignon, 75008 Paris, tél. 01 42 66 60 33, jusqu’au 12 juillet.
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Tout Tanguy chez Malingue
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°151 du 14 juin 2002, avec le titre suivant : Tout Tanguy chez Malingue