De l’espace de travail et ses résidus au processus de fabrication d’une œuvre et ses modes d’exposition, l’artiste exposé à la galerie Praz-Delavallade fait feu de tout bois.
PARIS - L’adage est bien connu : le hasard fait parfois bien les choses. Et lorsqu’il rencontre de la poussière, il peut la faire voler en éclats et faire des étincelles. C’est précisément ce qui se passe dans les récentes toiles de Thomas Fougeirol où l’on retrouve des petits morceaux de verre, des bris qui brillent, des nuées de particules. Pour cette série intitulée « Dust Paintings », présentée à la galerie Praz-Delavallade, l’artiste a recouvert ses toiles d’une épaisse couche de peinture blanche sur laquelle il a projeté les saletés et débris jonchant le sol de son atelier. Ainsi plaqués sur la toile, ces éléments créent non seulement du relief mais aussi du mouvement, comme si un coup de vent était passé par là, voire une tempête lorsque le balayage est plus dynamique. Toile, matière, dégradés de gris, espace et surface…, les composants picturaux sont présents. C’est d’ailleurs bien de peinture dont il s’agit, mais de peinture sans les outils traditionnels du peintre. Pas de pinceau, mais une grande aspiration à mettre en avant les termes d’un processus. Et simultanément les signes manifestes de son contrôle. Car outre la très belle qualité plastique de cette série, ce qui frappe c’est sa parfaite maîtrise. Ce n’est pas la première fois que Fougeirol travaille selon ce principe : il a déjà réalisé des tableaux de pluie dont les gouttes faisaient œuvre, ou a recueilli sur d’autres toiles les empreintes de tissus et grilles métalliques.
Du point à la constellation
La deuxième série d’œuvres ici exposée s’inscrit dans le même registre. Selon une technique qui n’est pas sans rappeler celle d’un Hantaï, mais qui est éloignée de la réflexion théorique propre aux années 1970, Fougeirol a cette fois usé de toiles de lin qu’il a chiffonnées, pliées et trempées dans de l’eau de javel pour composer avec les dégradés ocre et les motifs aléatoires nés du délavage. Contrôle et maîtrise caractérisent également l’accrochage, extrêmement réfléchi et soigné.
Dans l’espace compliqué de la galerie, l’artiste a judicieusement réparti les différents formats des « Dust Paintings ». Il en a accroché deux sur un mur entièrement recouvert par les huit grandes toiles composant les « Bleach Paintings ». Ces dernières, œuvres à part entière, autonomes, deviennent ici un fond. Elles sont à regarder de façon individuelle en même temps que globale, pour le grand panneau qu’elles forment. Fougeirol s’amuse ainsi à faire passer le spectateur de l’un au tout, du local au global, du point à la constellation. Il joue sur les échelles et transcrit sur la toile aussi bien la vie de son atelier que le cosmos.
Sa cote aussi suit les formats, allant de 8 000 à 20 000 euros pour les plus grands. Des prix raisonnables pour un artiste pas tout jeune (né en 1965), acquis par de grandes collections aussi bien publiques que privées et présent sur la scène internationale, notamment américaine (il vit entre New York et Ivry-sur-Seine). Bruno Delavallade aime à dire qu’à l’issue du solo show qu’il lui a consacré il y a deux ans à l’Armory Show, il avait vendu toutes les œuvres.
Nombre d’œuvres : 15
Prix : entre 8 000 et 20 000 €
Artindex France 2015 : 661e
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Thomas Fougeirol fait la poussière
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 26 mars, Galerie Praz-Delavallade, 5 rue des Haudriettes, 75003 Paris, tél. 01 45 86 20 00, www.praz-delavallade.com, mardi-samedi 11h-19h.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°453 du 18 mars 2016, avec le titre suivant : Thomas Fougeirol fait la poussière