Pour sa troisième édition, qui s’est déroulée du 8 au 16 novembre, TEFAF Bâle (The European Fine Art Fair) a confirmé les espoirs de ses organisateurs. La jeune manifestation a, cette année encore, accueilli davantage de visiteurs et enregistré plus de transactions. Malgré un début de semaine calme, les cent trente marchands, venus de quinze pays différents, se sont unanimement réjouis du vif intérêt qu’ont manifesté les nombreux collectionneurs, majoritairement suisses, mais aussi allemands, italiens et français. Seul regret : les Américains et les Asiatiques étaient encore trop discrets pour conférer à ce rendez-vous une complète dimension internationale.
BÂLE (de notre envoyé spécial). Temps gris et flonflons de fête foraine auront accueilli huit jours durant les visiteurs de la troisième TEFAF Bâle. Tout juste signalé par une vague banderole bicolore, le jeune salon d’antiquaires aurait même pu perdre ses visiteurs au profit de la Münstermesse, installée juste en face, sur la Messeplatz. Mais il en fallait plus pour détourner les dix-huit mille amateurs et curieux qui s’étaient déplacés non seulement des divers cantons suisses, mais aussi de toute l’Europe du Sud. La petite sœur de la TEFAF Maastricht avait d’ailleurs cette année de nombreux attraits pour séduire. Deux nouvelles sections, d’abord, qui rassemblaient d’une part, les spécialistes de l’art russe et d’autre part, ceux des arts décoratifs du XXe siècle. Parmi ces derniers, le galeriste bruxellois Philippe Denys qui, même s’il estime avoir “moins bien travaillé que les deux années passées”, se déclare “ravi d’être entouré de confrères et de concurrents de qualité”. Il a vendu une douzaine d’objets, dont une armoire autrichienne de Frederich Jason, de 1910 et un salon des frères Thonet de 1905. Pour lui, cette confrontation “reste le meilleur moyen d’attirer et de convaincre de nouveaux clients”. Juste en face, Catherine Büttiker, qui participait elle aussi à la foire pour la troisième année consécutive, partage cet avis. Enchantée par l’intérêt des collectionneurs, la galeriste zurichoise spécialisée en Art nouveau considère “avoir largement couvert ses frais et établi de très sérieux contacts avec des amateurs français, libanais, israéliens et allemands.”
Un des grands rendez-vous internationaux
Un échantillon international des meilleurs antiquaires a fait de cette manifestation l’équivalent des grands rendez-vous internationaux. La galerie Beyeler par exemple, pour sa première participation, exposait un ensemble de céramiques de Picasso réalisées entre 1947 et 1960, provenant de la succession de Jacqueline. Et bien que peu de pièces aient été vendues, dont un “plat à la corrida” et une assiette ronde, “la rencontre de nouveaux collectionneurs suisses, français et allemands est excessivement positive”, affirme le responsable de la galerie, Olivier Wick. “Consciente de la nécessité de participer à de grands salons” pour montrer ses œuvres, la Galerie d’art Saint-Honoré a elle aussi décidé de franchir le pas. Le couple de marchands parisiens présentait deux tableaux : L’été de Jacob Grimmer, provenant d’une collection belge, et une Nature morte de Cornelis de Heem issue d’une collection parisienne, chacun à 2,5 millions de francs. La galerie Monique Martel, qui était la seule à n’exposer que des dessins, est en revanche une habituée des lieux. Présente depuis la première édition, elle proposait cette année des œuvres à partir de 15 000 francs, pour une sanguine de l’École romaine, et jusqu’à 400 000 francs pour une étude d’après nature de Guido Reni acquise dans une collection anglaise. Georges Franck, son directeur, réserve toutefois sa réponse quant à une nouvelle participation : “Nous ne reviendrons que si nos clients français viennent nous voir et si nous rencontrons de nouveaux collectionneurs”.
Une troisième édition trop locale
Car cette troisième édition aura semblé trop locale à plusieurs participants. Ainsi Adriano Ribolzi, qui exposait entre autres une armoire atypique du début Louis XV et une commode d’époque Régence, déplorait “le faible nombre de collectionneurs américains et la discrétion des amateurs français”. Malgré la vente d’une gouache XIXe et de gravures de la série des “objets de goût”, à des Suisses et des Italiens, le galeriste monégasque indique qu’il a “moins bien travaillé que les deux précédentes années”. Même impression chez Pierre Berès qui, pour sa troisième participation, présentait neuf feuillets d’une bible arménienne, à 1,8 million de francs, et vingt volumes de Giacometti provenant directement de l’atelier de l’artiste. Mais il n’a vendu qu’un seul ouvrage : Le chant des morts, du poète français Pierre Reverdy. N’ayant rencontré que des Allemands et des Suisses, le libraire parisien, qui n’avait pas encore couvert ses frais, se voulait pourtant confiant, tout en regrettant “l’aspect trop provincial de la manifestation”. Mais peut-être manque-t-il tout simplement à la foire des agitateurs comme Yves Mikaeloff, dont le stand dérangeant, mais ô combien intelligent de provocation, exposait sous toutes leurs coutures six fauteuils attribués à Tillard à côté d’une commode en bronze, qui ne pouvaient que séduire les amateurs attirés dans ce lieu feutré. Car, pour Philippe Denys, les objets doivent”être achetés sans calcul et pour eux-mêmes”.
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TEFAF emballe… la Suisse
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°48 du 21 novembre 1997, avec le titre suivant : TEFAF emballe… la Suisse