Les arts primitifs sont toujours sous l’effet « Quai Branly ».
PARIS - C’est stratégiquement quelques jours après la vente de la collection Vérité à Drouot que Sotheby’s avait choisi d’organiser sa vente d’arts primitifs. Le 23 juin, à la Galerie Charpentier, à Paris, la maison de ventes a accueilli, avec une sélection d’objets de très grande qualité, des enchérisseurs rentrés bredouilles de la vente Vérité à cause de l’inflation des prix. 2 500 visiteurs se sont ainsi rendus à l’exposition présentée dans les locaux de Sotheby’s à Paris du 15 au 22 juin. La vacation a rapporté près de 9 millions d’euros, soit un record historique pour Sotheby’s dans cette spécialité et la troisième position derrière les collections Vérité et Goldet. « Depuis trois ans de vacations à Paris, nous sommes numéro un mondial sur le marché des arts premiers (hors collection Vérité) », souligne Patrick Caput, expert consultant. Autre point commun avec la vente Vérité : quelques beaux records et une majorité de particuliers européens acheteurs des lots les plus importants.
La première partie de la vente était consacrée à la collection américaine d’art africain de Nicole et John Dintenfass, réunissant 57 œuvres provenant essentiellement d’Afrique centrale. Sa dispersion a été un peu handicapée par des estimations trop soutenues, et une majorité de pièces ont été acquises à l’estimation basse ou même en dessous, tel le lot phare de la collection, une figure de reliquaire Fang du Gabon adjugée 516 000 euros contre une estimation 500 000 à 700 000 euros. Deux lots importants, cumulant publications et pedigree, ont créé une vraie déception : une statue masculine Bamana du Mali, estimée 180 000 euros au bas mot, ainsi qu’une rare statue féminine Mangbetu du Congo, estimée 300 000 à 400 000 euros, ont été ravalées. Les amateurs se sont davantage enflammés lors de la seconde partie de la vente. Les deux plus hautes enchères appartenaient à la collection Roger Vanthournout : une monumentale statue Urhobo du Nigeria, envolée au record mondial de 1,13 million d’euros (dix fois l’estimation), et une statue de prisonnier Bangwa du Cameroun, adjugée au triple de son estimation, à 975 200 euros. Des records ont été établis pour une plaque en bronze du Royaume de Benin du Nigeria des XVIe-XVIIe siècles dont la qualité exceptionnelle et la provenance historique ont suscité une bataille d’enchères passionnée, allant jusqu’à 964 000 euros ; une statue féminine Dan de Côte d’Ivoire, partie à 314 400 euros (5 fois l’estimation basse), et une rare statuette féminine Hemba du Congo de 17 cm, estimée 20 000 euros et adjugée 144 000 euros.
Paris premier
Célébrant l’ouverture du Musée du quai Branly, la vente comprenait également un tableau aborigène peint par Ningura Napurrula (comptant parmi les huit artistes aborigènes à intervenir sur le site du Musée du quai Branly), emporté à bon prix pour 66 000 euros, et une collection d’art des Indiens d’Amérique dont les prix ont atteint un niveau international. Sur une enchère de 269 600 euros, une poupée Kachina d’Arizona de la collection Andrea Portago a même établi un record mondial.
Cette vente confirme à nouveau le rôle dominant que joue la place de Paris sur le marché des arts premiers. Sotheby’s ne néglige pas pour autant ses collectionneurs américains, « un marché important qui représente 50 % du marché mondial en valeur tant à l’achat qu’à la vente », selon Patrick Caput. La maison conserve ainsi ses deux vacations new-yorkaises en parallèle à ses deux rendez-vous annuels parisiens.
- Expert : Marguerite de Sabran et Patrick Caput (art d’Afrique et d’Océanie), David Roche (art des Amériques), Tim Klingender (art aborigène d’Australie) - Résultat : 8,89 millions d’euros - Lots vendus : 82 % - Pourcentage en valeur : 84,5 %
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Stratégie gagnante
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°241 du 7 juillet 2006, avec le titre suivant : Stratégie gagnante