La foire d’art contemporain strasbourgeoise poursuit sa mue. Les œuvres présentées sont de meilleure qualité, en grande partie grâce aux artistes historiques.
Strasbourg. Voilà vingt et un ans que St-Art s’est installée dans le paysage français, une performance tant les événements se font et se défont à peine lancés. En 2014, la manifestation, en perte de vitesse, était reprise en main par GL Events, qui lançait alors un plan triennal sous la houlette de Patricia Houg, intronisée directrice artistique. Depuis, l’événement est sur de nouveaux rails. Pour appuyer sa légitimité, un comité scientifique a été constitué cette année, réunissant les invités des précédentes années : Olivier Kaeppelin, directeur de la Fondation Maeght ; Jean-Luc Monterosso, directeur de la Maison européenne de la photographie à Paris, et Michel Nuridsany, critique d’art. « Des personnalités qui surplombent la foire et son marché, sans être juges et parties », commente Patricia Houg.
Pour cette édition, organisée du 17 au 20 novembre, le nombre de galeries a été revu à la baisse : 79, contre 90 l’an dernier, après avoir subi « un tiers d’écrémage », assure l’ancienne galeriste. De fait, cette sélection accrue fait monter la qualité d’un cran et rend la circulation dans les allées plus agréable. Signe d’un renouveau, la foire a réussi à rallier Baudoin Lebon, venu avec les oiseaux de Laurent Perbos, assemblages ou dessins au papier carbone, les compositions géométriques d’Evsa Model ou encore un bel ensemble de Lucien Clergue. Huit galeries allemandes avaient fait le déplacement, mais la foire n’a pas encore exploité la carte européenne que lui permettrait sa situation géographique. « Les Allemands viennent mais malheureusement pas les grandes galeries. Nous subissons aussi la concurrence de Karlsruhe qui parvient à fédérer les collectionneurs, lesquels ne font pas alors le déplacement jusqu’à St-Art », déplore la galeriste strasbourgeoise Chantal Baumberger.
La foire avait fait un joli coup en invitant la Fondation Bernard Venet (Le Muy, Var) : le public pouvait découvrir dès l’entrée, de Robert Morris, l’un de ses premières découpes de feutre de la série « Wall Hangings », en majesté face à une Poubelle d’Arman ou une compression automobile de César, auxquels répondait plus loin un diptyque en bois gravé rouge de Donald Judd. Pourquoi une telle incursion ? « Cela nous permet de toucher un public alsacien qui ne serait pas venu jusque dans le Sud », répondait son directeur, Alexandre Devals, sur le stand. La Fondation donnait le « la » d’un événement dont la hausse qualitative provenait avant tout de la présence d’artistes historiques. Ainsi de la galerie Kahn (Paris, Ars-en-Ré), avec un bel accrochage thématique, dont un mur entier consacré à Joseph Beuys. Chez Guy Pieters (Knokke-le-Zoute), des dessins préparatoires de Christo, parmi lesquels celui du projet déployé au lac d’Iseo l’an dernier, étaient présentés en regard de plusieurs Villeglé. Chez Sobering (Paris), le papier était roi, à travers un important ensemble de Pavlos – des affiches massicotées des années 1960 aux derniers travaux en cartes à jouer – aux côtés des illusions de papier froissé à l’encre de Chine de Thomas Barbey. À la galerie Jordan-Seydoux (Paris, Berlin, Zurich), plusieurs éditions de Baselitz côtoyaient les dernières gravures de Damien Deroubaix (2017). Était à voir encore, la carte blanche donnée par Olivier Kaeppelin à Damien Cabanes, qui immergeait le visiteur dans la couleur à travers ses formes abstraites ou figuratives.
Côté commerce, les échanges n’ont cependant pas encore été vibrants. Chantal Baumberger a cédé plusieurs œuvres d’Ernest Pignon-Ernest, une dizaine de gravures de Jaume Plensa accessibles à 900 euros ou un dessin de Louise Bourgeois. « Le palier de 1 000 euros est difficile à franchir. Et je parviens à vendre des noms, mais les jeunes artistes ne marchent pas tellement », confie la galeriste. Le succès est également venu couronner, jusqu’à 50 000 euros, des figures bien identifiées de l’histoire de l’art chez AD Galerie (Montpellier) qui exposait Robert Combas, Hervé di Rosa ou Erró. D’une autre génération, Florence Dussuyer, invitée en solo show à la galerie Au-delà des apparences (Annecy), a fait florès : vingt toiles ont été cédées entre 700 et 13 000 euros.
Parmi les chantiers à venir : « faire vivre la foire toute l’année, au-delà de ces quelques jours en novembre, créer un lien pérenne avec les exposants, en leur offrant de la visibilité et pourquoi pas une plateforme de vente », indique Patricia Houg.
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St-Art en transition
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°490 du 1 décembre 2017, avec le titre suivant : St-Art en transition