Olivier Coutau-Bégarie et l’expert Xavier Petitcol donnent rendez-vous aux institutions internationales et aux amateurs de textiles anciens, les 29 et 30 avril à Drouot, à l’occasion de l’exceptionnelle dispersion des collections de la maison Hamot. L’événement est d’importance.
PARIS - Les 29 et 30 avril, la SVV Coutau-Bégarie mettra en vente les collections Hamot, quelque 5 000 pièces du XVe au XXe siècle, toutes référencées, soit un fonds textile fabuleux tant par sa diversité, sa qualité que son origine. La maison Hamot, qui a cessé son activité en 1999, à la suite du décès du dernier propriétaire, se prévalait d’une illustre ancienneté. Elle est l’héritière de maîtres-fabricants à Lyon et de marchands d’étoffes à Paris sous le règne de Louis XV. “Cette maison, plutôt discrète auprès du grand public, figurait parmi les fournisseurs attitrés du Garde-Meuble sous tous les régimes, depuis les commandes d’étoffes pour Versailles ou les Tuileries, sous Louis XVI et Napoléon Ier, jusqu’à des tapis livrés au palais de l’Élysée ou au Grand Trianon sous la présidence du général de Gaulle, précise l’expert Xavier Petitcol. La révélation de cette vente sera probablement ces prodigieuses soieries mises en fabrication au XIXe siècle, pour des Expositions des produits de l’industrie et Expositions universelles.” Le lot n° 99, par exemple, présente un lampas néogothique réalisé par un très grand fabricant lyonnais à partir d’un dessin de Viollet-le-Duc pour l’Exposition universelle de Paris en 1855. Estimée 1 000-2 000 euros, “cette pièce aurait sa place au Musée d’Orsay”, souligne l’expert. Des soieries d’époque Empire, tissées pour des palais impériaux et jamais commercialisées, sont à saisir, tel un velours chiné, fond blanc à couronne de fruits (lot n° 468), confectionné pour le troisième salon de l’Empereur à Versailles et estimé 300-500 euros, et le lot n° 534, composé d’un damas vert à couronnes de fleurs, exécuté pour le palais des Tuileries, ou encore un lampas “taille douce” à fond cannetillé bleu clair avec un dessin blanc de deux cygnes adossés, fabriqué pour le palais de Meudon et estimé 400-800 euros. À noter aussi un étonnant lampas liseré (lot n° 300) du milieu du XIXe siècle en soie ponceau, à dessin à grands compartiments gothico-mauresques, estimé 1 000-2 000 euros, et un lampas “taille douce” de style Restauration (lot n° 535), estimé 2 500-4 000 euros et dont le très grand métrage de 2 x 8,15 m peut être utilisé pour des sièges.
La vacation comprend une belle série de velours de la Renaissance, à l’exemple d’un lot de velours italiens ciselés à petits motifs imbriqués (lot n° 42), estimé 500-1 000 euros.
Les étoffes du XVIIIe siècle sont également remarquables, comme les deux somptueuses bordures montantes (lot n° 570), d’époque Louis XV-Louis XVI, brochées de branches fleuries et de fruits avec leurs galons latéraux cousus d’origine, d’une fraîcheur incroyable, estimées 300-500 euros l’ensemble.
La pièce majeure reste un lampas tissé à Lyon vers 1790 par Joseph Gaspard Picard (lot n° 600), qui est un véritable tableau de 90 x 75 cm figurant l’allégorie triomphale en blanc et rose sur fond satin
bleu nuit jaspé, estimé 3 000 à 5 000 euros. “L’auteur de cette soierie, un contemporain de Dugourc, avait eu conscience de réaliser une pièce importante, car il y a fait figurer ses initiales, ce qui est tout à fait inhabituel dans les arts textiles”, remarque Xavier Petitcol. Enfin, soulignons la présence de pièces modernes de la tendance fonctionnaliste, éditées entre 1925 et 1935, en totale synergie avec les décorations de Chareau, Herbst ou Mallet-Stevens : plusieurs lampas Art déco, en fibranne et viscose (“Qui l’eût cru chez Hamot qui avait le ver à soie pour emblème !”, rappelle le spécialiste), estimées entre 300 et 800 euros.
Les textiles anciens sont sans doute un des domaines artistiques pour lesquels la valeur a le plus progressé à la fin des années 1990. Il sera donc intéressant d’observer le comportement des acheteurs dans un contexte économique difficile. “Je ne me fais pas de souci, commente l’expert. C’est une succession – bien que les héritiers préfèrent le terme de ‘collections’ –, les estimations sont très raisonnables et tout est à vendre. Si les collectionneurs manquent cela, ils ne reverront pas de sitôt ce type de vente qui ne survient qu’une fois ou deux dans un siècle.”
Les 29 et 30 avril, Drouot-Richelieu, salles 5 et 6, SVV Coutau-Bégarie, tél. 01 42 60 10 01 ; expert : Xavier Petitcol, tél. 01 42 73 21 19, exposition le 28 avril 11h-21h, www.coutaubegarie.com
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Sous le signe du ver à soie
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°169 du 18 avril 2003, avec le titre suivant : Sous le signe du ver à soie