Sotheby’s sort ses griffes

PARIS - Guillaume Cerutti (lire p. 4) a rempli sa mission. Il était arrivé à la présidence de la filiale France de Sotheby’s il y a un an pour développer son activité dans l’Hexagone. L’auctioneer arrache la deuxième place du classement des maisons de ventes françaises au premier semestre 2008 à Artcurial, devançant même cette dernière d’une bonne tête, pour mieux talonner Christie’s (lire le tableau). Si l’on considère les chiffres de janvier à juillet comprenant quelques ventes importantes, l’écart est encore plus ténu puisque Christie’s enregistre sur cette période un chiffre d’affaires de 89,6 millions d’euros contre 87,3 millions d’euros pour Sotheby’s. Les deux maisons de ventes sont désormais au coude à coude en France, à l’égal de leur position respective sur le marché international.
Si Sotheby’s a réalisé une remontée spectaculaire ( 88 % sur le semestre et 104 % en incluant juillet), c’est peu au détriment de Christie’s (– 14 % et – 11 % avec juillet). Guillaume Cerutti s’est révélé un très bon stratège et un excellent négociateur pour décrocher des collections, intervenant directement dans toutes les négociations en concurrence avec Christie’s. Le parcours atypique de cet ancien haut fonctionnaire du ministère de la Culture puis de Bercy séduit les clients, ce qui fait grincer des dents chez Christie’s.
Le marché français demeure par ailleurs relativement stable, que ce soit pour Artcurial, Tajan ou les autres maisons opérant à Drouot. La SVV Pierre Bergé & Associés (PBA) affiche une petite progression de 6 % et Piasa améliore son score de 12 %. Le Bellifontain Jean-Pierre Osenat réussit une percée à la 9e place du classement, grâce à la vente exceptionnelle du contenu de l’hôtel Masseran qui a rapporté 9 millions d’euros. Déjà évincé du classement général des dix plus importantes sociétés de ventes françaises pour l’année 2007, la SVV Beaussant-Lefèvre (8,5 millions d’euros pour le premier semestre 2008) est en perte de vitesse. Elle paie cher le maintien de son activité dans les secteurs traditionnels de l’art ancien, sans chercher de diversification dans l’art du XXe siècle, plus porteur.
L’heure est aussi au développement pour nombre de sociétés françaises. L’année 2008 apparaît comme une étape importante. Cela a commencé avec le discret changement d’actionnariat chez Piasa dont le propriétaire, Artémis (la holding de François Pinault), a cédé 60 % du capital en mai dernier au profit de la Financière Piasa, groupe d’investisseurs mené par Serge Weinberg et Laurent Fabius. Reste à voir ce que ces nouveaux arrivants apporteront à Piasa. Le Neuilléen Claude Aguttes qui est aussi l’un des plus importants actionnaires de Drouot, a fait le plus beau coup de l’été en rachetant la SVV Anaf Arts Auction, l’une des plus grosses maisons de ventes en région (11 millions d’euros de ventes d’art en 2007), incluant le somptueux hôtel des ventes de Lyon Brotteaux. On ne peut s’empêcher de penser que l’endroit aurait pu faire un excellent Drouot bis...
Se fera ou pas : la fusion des SVV Cornette de Saint Cyr et Millon & Associés est toujours dans l’air. En attendant, chacun de son côté fructifie son potentiel de développement : renforcement des secteurs design, art moderne et arts premiers et création d’un nouveau département dédié aux montres chez Cornette de Saint Cyr, tandis qu’Alexandre Millon monte une filiale belge à Bruxelles avec une vente inaugurale programmée début 2009.