Expositions, ventes publiques, salon...
Du 24 au 31 mars, les belles feuilles ont taquiné l’appétit des amateurs et le climat incertain n’a pas eu raison de l’irréductible vigueur du dessin.
Malgré l’inquiétude générale, la semaine parisienne du dessin fut de bonne tenue générale. Dès l’inauguration de la douzième édition du Salon du dessin, le ton était donné. Certes, on n’y trouvait pas de feuilles exceptionnelles ; la magie avait cette année cédé le pas à la rigueur. Plus sélectif que jamais, le Salon s’était attaché à ébarber les quelques incohérences de l’an passé. Parasité l’an dernier par les ventes publiques, la manifestation avait bénéficié cette fois d’une proposition plus modeste du marché. Le gratin des conservateurs et collectionneurs était présent dans ce havre à taille humaine, où les mondanités sont moins saillantes que dans beaucoup d’autres rendez-vous parisiens. Le Salon avait même battu le rappel des Américains, qui avaient pourtant fait faux bond à la foire de Maastricht. « On s’attendait à une catastrophe, mais cela ne fut pas le cas. Tous les marchands ont travaillé honorablement », estime Bertrand Gautier de la galerie Talabardon-Gautier. « Le premier soir était très actif, nous avons vu autant d’Américains que les années précédentes et ils étaient aussi acheteurs que par le passé », constate de son côté Louis de Bayser. La galerie de Bayser a rapidement négocié La Petite Boudeuse de Jean-Baptiste Greuze à un collectionneur suisse ainsi qu’une étude d’un portait équestre de Federico Barocci. Cet artiste avait, les jours suivants, les faveurs chez Christie’s qui adjugeait un Saint François recevant les stigmates à 88 125 €. Après avoir cédé le premier soir une magnifique Sainte Trinité de Pierre de Cortone, l’Allemande Katrin Bellinger a négocié le surlendemain une Étude de jeune homme regardant vers le haut de Franceso Salviati, tous deux à des collectionneurs américains.
La Tête de jeune homme à la bouche entrouverte de Tiepolo, que Jean-Luc Baroni avait achetée chez Piasa pour 140 000 € en décembre dernier, avait trouvé preneur le soir du vernissage, de même qu’une sanguine de Pontormo représentant une tête de vieillard. Fort de cette consécration, le marchand a enchéri le lendemain contre trois téléphones pour capter le beau profil de Tahitienne de Paul Gauguin proposé par Piasa. Ce pastel a dépassé son estimation (600 000/700 000 €) pour atteindre le prix record de 1,3 million d’euros. L’autre pièce phare de la vente Piasa, La Chasse d’Ascagne dans un paysage classique de Claude Gelée dit le Lorrain, s’en est tirée plus qu’honorablement avec un record de 300 000 €. Faute d’un Salviati ou d’un Lorenzo di Credi qui, les années passées, avaient galvanisé le marché parisien, l’intérêt s’est porté sur les artistes français. Chez Tajan, le 24 mars, une Chinoise jouant avec un chat de François Boucher était adjugé 66 183 €. Trois jours plus tard chez Christie’s, plusieurs dessins de Jean-François Millet s’affichaient dans le Top Ten de la maison de vente. Au salon, les feuilles modernes n’ont pas déchaîné de passions. La rayonnante aquarelle de Miro, issue d’une collection argentine que la galerie britannique Dickinson proposait pour 435 000 € n’a pas trouvé preneur. Les quelques De Staël que les marchands Anisabelle Berès et Arturo Cuellar avaient opportunément choisi de présenter étaient aussi boudés.
Indifféremment au Salon et dans les ventes publiques, les belles pièces ont trouvé preneur, à l’exception notable du Portrait de la princesse de Broglie par Ingres proposé par Christie’s. Déjà connu du marché, ce dessin affichait une estimation par trop prohibitive de 500 000 à 800 000 €. Malgré la satisfaction arborée par Christie’s à l’issue de la vente, cette session ne fut pas tonitruante avec seulement 68 % de lots vendus et 60 % seulement en valeur. Les taux d’invendus lors des ventes new-yokaises en janvier dernier se situaient d’ailleurs autour de 30 %. Au salon, les pièces de charme entre 3 000 et 7 000 € trouvaient plus difficilement preneur. Les résultats globalement satisfaisants enregistrés durant la semaine parisienne témoignent de l’attrait quasi miraculeux de l’Hexagone. On s’étonne encore que le Salon du dessin n’ait pas fait d’émules outre-Manche ! Véritable locomotive de cette semaine du dessin, ce précieux joyau parisien devrait l’année prochaine quitter le cadre velouté des salons Hoche pour celui plus grandiose du Palais de la Bourse, ce qui évitera les accrochages très denses qu’on a pu constater ça et là.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Salon du dessin, une irréductible vigueur
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°547 du 1 mai 2003, avec le titre suivant : Salon du dessin, une irréductible vigueur