Drouot en mai a connu l’un de ces résultats de vente anecdotiques qui font partie de son charme. La carte de police factice utilisée par l’acteur Raymon Souplex, alias le commissaire Bourrel, a été achetée 8 800 francs par un certain Monsieur Maigret, ce qui ne s’invente pas, directeur financier du magazine Téléstar. En ce qui concerne l’art authentique, cependant, le tableau est plus contrasté.
PARIS - La vente d’un instrument de musique aussi rare et d’une aussi grande qualité aurait dû, en toute logique, constituer un événement pour le marché français : mais le 15 mai, au Palais des Congrès d’Evian, Me Millon est resté avec son violon modèle Longuet d’Antonio Stradivario (estimé 5,5 millions de francs) sur les bras, le dernier enchérisseur, un français, ayant renoncé à 3,5 millions de francs. Le commissaire-priseur parisien a toutefois réussi à vendre un violon de J.B. Rogerius, fait à Brescia en 1703, pour 650 000 francs, un violon de Giovanni Grancino vers 1685-1690 pour 310 000 francs et un instrument de Gagliano, Naples 1801, pour 390 000 francs – les trois adjudications étant proches des estimations. Entre professionnels à Drouot, la TVA à 18,6 %, imposée au stradivarius comme œuvre "non originale", est désignée comme responsable de la mévente.
Une céramique, record mondial
La sensation, en revanche, fut créée lors de la vente de céramiques de Me Ferri, le 6 mai à Drouot, par un grand plat rond florentin d’une exceptionnelle rareté. En pâte tendre, décoré en camaïeu bleu, avec un décor très peu commun de type "raffaellesque", fabriqué dans les ateliers des Médicis, vers 1570-1580, cette pièce est l’une des toutes premières porcelaines faites en Europe. Il provenait d’une collection privée française et avait déjà son "certificat" pour quitter le territoire français. Estimé entre 1,5 et 2 millions de francs, le plat a finalement été adjugé 8 800 000 francs, un record mondial pour une céramique européenne. Un autre bon résultat de la vente de Me Ferri, un arrosoir en porcelaine de Vincennes, 1755, avec un décor polychrome composé de bouquets de fleurs, filets bleus et d’or, de François Binet, a été adjugé 300 000 francs.
Le retour des Bourdon
Un bon résultat global a été enregistré pour la vente de tableaux modernes de Me Binoche, le 29 avril à Drouot-Montaigne, avec un produit total vendu de 12 430 000 francs (soit 18 % de rachats). Le succès était mitigé, cependant, pour les cinq tableaux de la collection Bourdon qui figuraient dans la vacation. Remis sous le marteau de Me Binoche après que Me Loudmer n’ait pas réussi à obtenir le règlement du bordereau d’achat du 25 mars 1990, les Delaunay, Soutine, Brauner, Léger et Dubuffet, avec des estimations fort modestes, ont certes trouvé preneur, mais pour un total de seulement 9 870 000 francs, contre les quelques 24 millions, impayés, en 1990.
Portrait de Jean, une huile de Renoir représentant son second fils, le futur cinéaste, a été vendu à un marchand britannique chez Mes Beaussant et Lefèvre le 29 avril pour 3 750 000 francs.
Livres illustrés
Paris a confirmé son excellente réputation pour les ventes de livres illustrés le 28 avril, lorsque Mes Guy et Philippe Loudmer ont dispersé la seconde partie de la bibliothèque Matarasso. Le produit total vendu a été de 3 925 000 francs, soit seulement 2 % de rachats, et la majorité des lots ont dépassé leurs estimations. La prose du Transsibérien, de Blaise Cendrars, dans une édition de 1913, illustrée par Sonia Delaunay, a été adjugée 610 000 francs à un collectionneur privé. Les murs de Guillevic, 1950, agrémenté de lithographies originales de Jean Dubuffet, s’est vendu 255 000 francs, et une édition originale de 1938 de La Nausée de Jean-Paul Sartre est partie pour 120 000 francs.
Record mondial pour une montre
Passant de l’art moderne au domaine de la joaillerie, Me Briest s’est taillé un brillant succès le 27 avril à Drouot-Montaigne avec une vente de montres de collection et de bijoux. Le commissaire-priseur parisien a établi un record mondial pour une très rare montre, "Tank à guichets" par Cartier, 1929, en or 18 carats, remontoir serti d’un saphir cabochon, vendue 1 346 902 francs, contre une estimation entre 700 000 et 900 000 francs.
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Résultats en dents de scie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°4 du 1 juin 1994, avec le titre suivant : Résultats en dents de scie