L’art précolombien côtoie des pièces africaines de la collection Haefeli.
PARIS - Les arts primitifs reviennent sur le devant de la scène cet automne à Drouot sous le marteau de Jean-Claude Binoche. Le commissaire-priseur, qui se veut très actif sur ce marché porteur, bat le fer pendant qu’il est chaud. En attendant sa prochaine vente de prestige d’art pré-hispanique prévue en mars 2006, une soixantaine de lots précolombiens proposés en début de vente viennent se greffer à la collection Haefeli d’art africain. Fini les catalogues petit format à couverture souple, signatures de la maison de ventes : une édition luxueuse à couverture rigide, inaugurée avec la vacation de la fabuleuse collection Geiger en mars dernier, présente désormais les objets à vendre. Une sélection d’une quarantaine de pièces, exposées pendant toute la durée de « Kaos-Parcours du monde » en septembre à la galerie Bernard Dulon, vient renforcer la stratégie de marketing.
Beaucoup de collectionneurs ont déjà vu l’objet phare de la partie précolombienne, une grande sculpture porte-étendard huaxtèque d’époque aztèque (de la période classique, 1400-1521 apr. J.-C.) , puisqu’elle a été montrée lors des Temps Forts de Drouot en mai. Un patron de presse belge l’avait achetée à la Galerie Kamer en 1973 et offert à une amie. Ce gardien de temple en pierre de 1,50 m, objet rarissime et extrêmement mystérieux, ressurgit aujourd’hui sur le marché avec une estimation de 300 000 euros, « un prix banal pour un objet de cette importance », commente l’expert Jacques Blazy. Sont aussi réunis un masque pendentif Izapa du Guatemala en pierre dure brun-vert (400-100 av. J.-C.), estimé 70 000 euros ; une très grande statue mexicaine de culture Veracruz (450-650 apr. J.-C.), en terre cuite représentant un dignitaire, venant d’une collection suisse, estimée 60 000 euros ; une statuette Chontal du Mexique (300-100 av. J.-C.) en diorite verte, de dimensions rares (H. 37,5 cm), estimée 30 000 euros, et un important couple anthropomorphe Nayarit en céramique polychrome, estimé 12 000 euros, qui a la particularité d’être « un vrai couple d’origine et pas une paire reformée comme on en voit souvent, en plus de présenter un nariguera (anneau de nez) différent pour chaque personnage », indique Jacques Blazy. « Les autres pièces précolombiennes de la vacation, de moindre valeur, restent des objets sous-cotés », souligne encore l’expert évoquant une céramique anthropomorphe Jalisco du Mexique représentant un acrobate, estimée seulement 6 000 euros. Son pedigree est pourtant exceptionnel : elle vient de l’ancienne collection Guy Joussemet, un grand collectionneur montréalais dont beaucoup d’objets figurent aujourd’hui dans les grands musées internationaux, à l’instar de la Vénus callipyge en terre cuite Chupicuaro, véritable symbole du Musée du quai Branly.
L’expert Bernard Dulon présente pour sa part la collection d’art africain de Georges Haefeli, architecte suisse réputé, « un ensemble de bon niveau qui n’a pas besoin de se faire mousser ». Plusieurs lots, tous publiés et exposés, se partagent la vedette : une très expressive statuette masculine Vili du Congo à fonction magico-religieuse dite nkisi, estimée 60 000 euros comme un masque Grebo de Côte d’Ivoire extraordinaire de sculpture et une figure de reliquaire Fang-Betsi du Gabon ; une statue-pilon féminine Sénoufo de Côte d’Ivoire dite deble, comptant parmi les objets importants du culte initiatique du poro chez les Sénoufo, estimée 40 000 euros. Mais pour l’expert, « le charme de la collection, c’est aussi tout le gras qu’il y a autour, tous ces petits objets à belle patine à partir de 1 000 euros, une petite statuette à l’expression très étonnée comme tant d’autres pièces choisies par ce collectionneur à l’œil d’architecte par amour des volumes, des rythmes, des structures, de la lumière et des textures. »
Le 10 oct., Drouot-Richelieu, SVV Binoche, tél. 01 47 42 78 01 ; exposition jusqu’au 6 oct. à la SVV Binoche, le 8 oct. 11h-18h, le 10 oct. 11h-12h à Drouot-Richelieu.
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Rentrée primitive
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Abonnez-vous dès 1 €- Experts : Bernard Dulon et Jacques Blazy - Nombre de lots : 141 - Estimation totale : 1,3 à 1,9 million d’euros
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°221 du 23 septembre 2005, avec le titre suivant : Rentrée primitive