Droit

Qui sont les ténors du barreau dans le domaine de l’art ?

Par Philippe Sprang · Le Journal des Arts

Le 8 janvier 2019 - 1757 mots

PARIS

Une poignée d’avocats consacrent la majorité de leur activité à l’art et son marché. Droits d’auteurs, droit de suite, authenticité, propriété intellectuelle, spoliations... les litiges sont multiples et divers.

12 avocats spécialisés dans le domaine de l'art
12 avocats spécialisés dans le domaine de l'art
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts
Jean Aittouares, avocat
Jean Aittouares, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Jean Aittouares

Ayant prêté serment en 1996, il baigne depuis son enfance dans le milieu de l’art. Il a grandi aux Puces et dans les couloirs de l’hôtel Drouot, et ses parents sont des galeristes bien connus. Il a fondé en 2006 le cabinet OX qui emploie aujourd’hui une vingtaine de collaborateurs et associés et qui intervient dans la propriété intellectuelle et notamment dans le milieu de l’art, mais aussi de la musique, du cinéma ou du jeu vidéo. Il se considère comme un généraliste. Il indique être intervenu dans 150 annulations de ventes pour des questions d’authenticité ou de vols et dans une centaine de dossiers de droit d’auteurs, comme dans celui de La Vague de Camille Claudel. Il vient de faire condamner Jeff Koons pour avoir contrefait le cochon Naf-Naf. oxavocats.com

Philippe Bocquillon, avocat
Philippe Bocquillon, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Philippe Bocquillon

Avocat depuis 1977. Ses deux collaborateurs sont devenus ses associés cette année. Le milieu de l’art représente 35 % de son activité. Avocat de collectionneurs, d’antiquaires, de galeristes, il défend également des artistes dont il préfère taire le nom, comme celui de l’ensemble de ses clients du reste. Il accepte tout au plus de révéler qu’il est le conseil de la Fondation Picabia. Spécialisé en responsabilité civile professionnelle, il exerce une part importante de son activité dans la défense des experts et reconnaît une inflexion et une plus grande mansuétude des tribunaux à leur égard. Il est ainsi parvenu à obtenir en cassation une décision reconnaissant que l’auteur d’un catalogue raisonné peut avoir une opinion différente de celle d’un expert judiciaire et n’a donc pas à s’y soumettre. Il est aussi intervenu avec succès dans l’affaire du Jubé de la cathédrale de Chartres en défense du premier antiquaire qui n’avait pas authentifié le fragment de pierre comme provenant de la cathédrale. www.2bv.fr

Jean-François Canat, avocat
Jean-François Canat, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Jean-François Canat

Avocat depuis 1973, il consacre près de 50 % de son activité au milieu de l’art. Il fait partie des avocats régulièrement sollicités depuis une trentaine d’années par le ministère de la Culture (ainsi de l’affaire du Jubé de Chartres). Il défend des collectionneurs ou la maison de ventes Christie’s. Spécialiste du contentieux et du droit commercial, il est intervenu dans les années 1990 dans la procédure de classement du Jardin à Auvers de Van Gogh pour le compte de l’État et accompagne d’importantes acquisitions, telles que celles des deux Rembrandt achetés conjointement en 2016 par le Rijksmuseum et le Louvre. Au sein du cabinet d’affaires UGGC, dont il est l’un des fondateurs, et avec l’aide de son confrère Philippe Hansen, il intervient aussi sur le terrain du droit administratif comme ce fut le cas lors des revendications de manuscrits de Pétain ou de De Gaulle. www.uggc.com

Olivier De Baecque, avocat
Olivier De Baecque, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Olivier De Baecque

Avocat depuis 1998. Il exerce au sein du cabinet De Baecque Fauré Bellec qu’il a créé. Il travaille dans le milieu de l’art – qui représente de 70 à 80 % de son activité – depuis ses débuts. Il est le seul, à notre connaissance, à être diplômé en histoire de l’art et de l’École du Louvre. « Je vends une connaissance du marché, si c’est un meuble transition, je le sais, si c’est une gouache, je le vois… », explique-t-il. Il intervient dans des successions et des défenses d’artiste : droit moral, patrimonial, droit d’auteur, droit de représentation, authentification. Il propose un service complet mais s’appuie sur des confrères pour les questions fiscales. Son cabinet dispose d’un département sur les marques. Il opère aussi bien dans le contentieux civil que le pénal – succession, annulation de vente – ainsi qu’en droit administratif lié à l’art : exportation, classement, préemption. Il tient à rester discret sur l’identité de ses clients. « Je vends beaucoup de confidentialité », explique-t-il. Nous savons qu’il est le conseil des héritiers de Simon Hantaï et qu’il défend certains des acteurs du dossier des faux meubles XVIIIe. C’est aussi l’avocat du Journal des Arts qu’il a défendu avec succès dans plusieurs procès en diffamation. debaecque-avocats.com

Hélène Dupin, avocate
Hélène Dupin, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Hélène Dupin

A prêté serment en 1978. C’est une figure connue et respectée du milieu de l’art. Fille du poète et écrivain Jacques Dupin, l’ami de Giacometti, Calder ou Chagall, elle connaît le marché de l’art de façon intime. Avocate de l’ADAGP (Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques), elle assure la défense des artistes et a conseillé une dizaine de comités comme ceux de Chagall ou Miró. Le milieu de l’art constitue la quasi-totalité de son activité. Elle traite des questions de droit d’auteur, de droit de suite, de régimes patrimoniaux, de successions et aide dans ce cadre à établir des inventaires. Elle a une quarantaine d’années d’expérience sur les faux et la contrefaçon. Elle a participé avec Olivier de Baecque à la rédaction d’un contrat type afin de normaliser les relations entre les artistes et les galeries. Pour le compte de l’ADAGP et les ayants droit de Maillol elle a obtenu « de très jolies condamnations » d’un parfumeur utilisant une image de Laetitia Casta chevauchant une sculpture.

Philippe Gaultier, avocat
Philippe Gaultier, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Philippe Gaultier

Il intervient dans le marché de l’art depuis sa prestation de serment en 2000. Avocat de la chambre des commissaires-priseurs judiciaires et du Syndicat des maisons de ventes volontaires, il est le conseil de plusieurs de leurs membres. Il revendique une importante clientèle, il est spécialisé en propriété intellectuelle (industrielle et marque). Il estime que le marché de l’art représente 50 % de son activité, dont un quart est constitué de contentieux judiciaires. Si son cœur de métier le porte dans la défense des maisons de ventes, il conseille également des galeries, des courtiers et des collectionneurs et quelques experts. Il aide à la création de fondations et à la rédaction de contrats. Il exerce au sein du cabinet Legrand, Lesage-Catel, Gaultier, dont il est l’un des associés. www.llcg-avocats.com

Corinne Hershkovitch, avocate
Corinne Hershkovitch, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Corinne Hershkovitch

Avocate depuis 1992. Cofondatrice du cabinet Borghese, elle exerce désormais seule avec l’aide d’une collaboratrice. Le milieu de l’art représente 90 % de son activité. Elle fait autorité dans le domaine des spoliations et s’est fait connaître en ayant obtenu en 1999 un arrêt – qui s’impose désormais – concernant la restitution par l’État d’un Tiepolo aux héritiers de Gentili di Giuseppe. Elle intervient dans le domaine de la circulation des biens culturels : exportation, certificat de bien culturel, dossiers de relocalisation, problèmes avec les transporteurs… Elle traite également des questions liées aux relations entre les marchands et collectionneurs et s’occupe de la protection des droits d’auteur des artistes et de leurs relations avec les galeries et les institutions culturelles. Elle conseille le château de Versailles et un collectionneur dans les affaires du faux mobilier XVIIIe. Elle a suivi pendant une dizaine d’années l’affaire du Jubé de Chartres. cabinet-corinne-hershkovitch.fr

Anne Lakits, avocate
Anne Lakits, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Anne Lakits

Avocate depuis 1986. Spécialisée en propriété industrielle, elle s’est intéressée très tôt au milieu de l’art en rejoignant le cabinet de Geoffroy Gaultier, dont elle est aujourd’hui l’associée. Conseil de la chambre des commissaires-priseurs judiciaires, elle est connue dans la profession pour la défense des commissaires-priseurs, dont la responsabilité civile délictuelle peut être engagée. Le milieu de l’art représente 60 % de son activité. Spécialiste en propriété littéraire artistique, comme beaucoup de ses confrères, elle traite des litiges relatifs à l’authenticité et s’est fixé comme règle de ne jamais plaider contre un commissaire-priseur ou une maison de ventes. Il lui arrive à l’occasion de défendre un artiste. La cour d’appel a ainsi suivi son argumentation dans la défense de la conjointe d’un artiste qui avait édité des bronzes sans l’accord de ses beaux enfants. www.avocats-pi.org

Anne-Sophie Nardon, avocate
Anne-Sophie Nardon, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Anne-Sophie Nardon

Avocate depuis 1991. Après une dizaine d’années de droit des affaires dans le cabinet d’Henri Leclerc, elle s’est investie dans le milieu de l’art qui représente maintenant 90 % de l’activité de son cabinet, Borghese (son autre associée étant Judith Bouchardeau). Elle s’est forgé une solide réputation de pénaliste et intervient dans les domaines de faux, recel et vol et défend les intérêts de Catherine Hutin, l’une des héritières Picasso. Elle compte parmi ses clients des collectionneurs, des maisons de ventes, mais aussi des fondations, comme la Fondation Jean Arp ou des héritiers d’artistes comme ceux de Hans Hartung. Elle assiste ses clients dans la rédaction de contrats et s’investit depuis peu dans la médiation qui, depuis 2016, est un exercice obligé avant toute action devant le tribunal de grande instance. Créatrice et présidente de la commission droit de l’art au sein de l’association Avocats Conseils d’Entreprises, elle accompagne entreprises et collectivités dans les questions de mécénat.borghese-associes.com

Jean-Jacques Neuer, avocat
Jean-Jacques Neuer, avocat
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Jean-Jacques Neuer

Avocat depuis 1985 et titulaire d’un doctorat en fiscalité internationale, c’est l’un des barons de la profession. Il représente Claude Picasso, l’administrateur de la succession Picasso qu’il a contribué à monter il y a une vingtaine d’années. Il doit traiter de nombreuses affaires de faux et de trafic dans le monde entier (il parle l’anglais couramment) avec à la clé des enjeux financiers considérables. Ses clients sont les fondations Giacometti, la succession Yves Klein ou encore la succession Arman. Il s’occupe aussi d’artistes comme Bernar Venet, mais aussi de marchands ou de galeries. Il effectue 90 % de son activité dans ce milieu. Le cabinet qui porte son nom propose un « service complet » : spoliations, transactions, droit d’auteur, pénal, de provenance, de vol. Avec d’autres confrères, il intervient dans le dossier contre Pierre Le Guennec, « l’électricien » de Pablo Picasso. www.cabinetneuer.com

Agnès Tricoire, avocate
Agnès Tricoire, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Agnès Tricoire

Avocate depuis 1989, le milieu de l’art représente 60 % de son activité. Titulaire d’un DEA en propriété littéraire, artistique et propriété industrielle et d’un doctorat sur la définition de l’œuvre, elle est le conseil de très nombreux artistes, Daniel Buren, Marina Abramovic ou encore Andres Serrano, mais aussi de galeries, de collectionneurs, d’institutions publiques et de fondations. Elle intervient sur toutes les questions liées à l’art et au marché de l’art, la propriété intellectuelle, l’authenticité intellectuelle, les faux, les relations entre les artistes et les galeries. Elle publie régulièrement sur la question des multiples. Parmi ses succès, celui dans l’affaire « Paradis » en défense de Jakob Gautel, dont une œuvre avait été contrefaite et exposée par Bettina Rheims. agnestricoire-avocat.fr

Michèle Trouflaut, avocate
Michèle Trouflaut, avocate
© Photo Livia Saavedra / Le Journal des Arts, 2018
Michèle Trouflaut

Avocate depuis 1975, elle exerce dans le milieu de l’art depuis plus de vingt-cinq ans et assure la défense des experts membres du SFEP (Syndicat français des experts professionnels en œuvres d’art) depuis une quinzaine d’années. Elle intervient notamment en contestation d’authenticité et en nullité de vente. Elle défend également des particuliers, acheteurs ou vendeurs confrontés à ces problématiques. Le milieu de l’art constitue une part importante de son activité.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°514 du 4 janvier 2019, avec le titre suivant : Les ténors du barreau dans le domaine de l’art

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