Précieuses enluminures

La collection Beck obtient un record mondial

Le Journal des Arts

Le 4 juillet 1997 - 530 mots

La vente de la collection Beck de manuscrits médiévaux a atteint, 11,15 millions de livres (104,8 millions de francs), record mondial dans ce domaine, le 16 juin dernier, chez Sotheby’s à Londres. Selon certaines sources, Sotheby’s aurait accordé à la famille Beck une garantie financière. Les estimations ayant été fixées très haut, le bruit courait qu’il fallait parvenir au moins à l’estimation basse de 7 millions de livres pour atteindre le seuil de rentabilité. Un seul lot n’a pas trouvé preneur : un bréviaire italien du XVe siècle, doté d’un prix de réserve excessif de 30 à 35 000 livres.

LONDRES. Industriels de Stutt­gart, les Beck ont effectué d’excellents achats au cours des années soixante et soixante-dix, et réuni l’une des plus remarquables collections de manuscrits encore en mains privées. Quinze d’entre eux, de moindre importance, ont été volés l’an dernier et jamais retrouvés, ce qui a pu inciter la famille à vendre le reste. Parmi les trente-quatre manuscrits, les Heures de Blandford, exécutées avec une finesse exquise à Florence, à la Renaissance, ont été adjugées 881 500 livres, et les Heures d’Arenberg, copiées dans le sud des Pays-Bas vers l’an 1500, 210 500 livres. Trois manuscrits enluminés très anciens ont reçu les meilleurs enchères, dépassant chacun le million de livres. Le plus ancien évangéliaire encore en mains privées a été adjugé 1,1 million de livres, juste au-dessus de son prix de réserve. Cette enchère a semblé quelque peu décevante pour un manuscrit de cette importance, rédigé vers 825-850 dans la région de Metz et d’une fraîcheur extraordinaire. L’attrait de l’ouvrage réside surtout dans son extrême rareté et dans l’harmonieuse clarté scripturaire de la minuscule "caroline". Le lot le plus recherché a été le Psautier de Sanct-Blasien, au décor spectaculaire, composé en Forêt Noire vers 1236-1245, qui a atteint 2,5 millions de livres. Avec ses vingt et une miniatures pleine page et ses nombreuses initiales enluminées, il constitue l’un des plus beaux exemples de l’ornementation du XIIe siècle. Deux autres lots ont dépassé le million de livres. Bien qu’il ne subsiste qu’un quart de l’original, le premier psautier de Mechtilde de Brunswick, dû aux copistes de Basse-Saxe, peut-être de l’abbaye d’Hildesheim, a surpassé toutes les prévisions avec l’enchère de 1 871 500 livres. La qualité des miniatures, sans doute l’un des exemples les plus raffinés de la peinture romane, justifie ce prix élevé. Enfin, les Heures de Cockrell, exécutées aux Pays-Bas et estimées 80 000 à 120 000 livres, qui ont atteint le prix surprenant de 1 002 500 livres, étaient convoitées par deux collectionneurs très déterminés. "Le marché est actuellement dominé par deux ou trois marchands et une demi-douzaine de collec­tion­neurs par­ti­culiers, en Europe et en Amérique", expli­que Sam Fogg, l’un des prin­cipaux marchands de manuscrits médiévaux. "Depuis cinq ou six ans, la plupart des manuscrits importants ont fait l’objet de transactions entre particuliers. Il a donc été très difficile, pour Sotheby’s, de fixer les estimations. Il faut remonter aux ventes Chester Beatty en 1968 et 1969 pour trouver une dispersion d’une telle qualité. Les estimations étaient très soutenues, et même les lots qui n’ont pas atteint leur prix de réserve le plus bas se sont très bien vendus".

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Précieuses enluminures

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