Vous participez à la section « Art Statements » de la Foire de Bâle avec un projet de l’artiste Ariane Michel. En quoi ce dernier consiste-t-il ?
Le jour du vernissage, le visiteur trouvera sur le stand une invitation à se rendre dans une forêt pour assister à 23 heures à une projection. Les personnages du film projeté sont des animaux de la forêt, qui, eux-mêmes, assistent à la venue du public. Les jours suivants, le stand comprendra une projection du film diffusé dans la forêt, enrichi de scènes tournées le soir de l’inauguration. On devrait sentir le double-fond de cette histoire avec le regard des gens qui ont vu ce film.
Voilà deux ans, vous aviez présenté Aleksandra Mir, qui a remporté le prix de la Bâloise. Elle est aujourd’hui à la galerie Laurent Godin. Est-il frustrant d’être une galerie « incubatrice » ?
Je n’ai pas d’états d’âme. Je ne travaille jamais en me disant que, après deux ans, je vais arrêter d’accompagner un artiste. Mais j’ai une double activité, avec les meubles d’architectes des années 1950. Je travaille du coup sans filet et peut-être ne suis-je pas assez rassurant. En même temps, le « Statement » avec Aleksandra reste une expérience unique, et un vrai succès.
Vous participez simultanément à la foire de design de Bâle. En 2006, celle-ci avait obtenu des résultats moyens commercialement. Cette plate-forme est-elle aussi pertinente à Bâle qu’elle semble l’être à Miami ?
À Bâle, les gens sont plus concentrés sur l’art contemporain et il est plus difficile de capter leur attention. À Miami, les collectionneurs sont plus disponibles et détendus. L’an dernier, la foire de design de Bâle avait été organisée dans la précipitation. Les horaires étaient approximatifs. Cette année, le salon aura une meilleure assise, avec un seul espace situé dans les anciennes halles de Bâle. L’an passé, on s’arrêtait aussi avant le week-end, ce qui nous a privés d’une certaine clientèle. Cette fois, le samedi est inclus. Mais, de toute manière, les collectionneurs d’art contemporain ont intégré la notion de mobilier, cela fait partie de la new life. Dès qu’ils s’intéressent à ce qui est accroché sur leurs murs, ils se soucient aussi de ce qu’il y a au sol. C’est devenu un complément indispensable de l’œuvre d’art.
La floraison de foires ou de section design ne crée-t-elle pas au final une image de « déjà-vu », voire d’abondance, au lieu de jouer sur la rareté ?
C’est peut-être le cas, mais nous, qui vivons la chose de l’intérieur, voyons à quel point il est difficile de trouver des œuvres. Si les prix ont atteint un certain niveau sur le marché, c’est bien en raison d’une rareté. Je suis partagé sur la question du trop-plein des foires de design. Il faut admettre qu’on ne voit plus certains grands collectionneurs que sur les salons. Ils viennent en galerie lors des vernissages de nos expositions importantes, mais nous ne pouvons pas en faire trois par an.
Comment expliquez-vous que les marchands français de design soient leaders sur ce marché, alors que les galeries hexagonales d’art contemporain peinent à s’imposer ?
Les galeries françaises de mobilier ont dépoussiéré le métier. Nous avons fait école dans la présentation des œuvres. Il faut dire que le travail que nous avons défendu, ainsi celui de Jean Prouvé, joue sur les notions d’industriel et de conceptuel, ce qui attire le milieu de l’art contemporain. Il y a aussi de grands noms français dans l’histoire du mobilier d’architecte, et la France est un vivier où l’on trouve encore des choses.
La Foire internationale d’art contemporain (FIAC) devrait installer sa section design au Grand Palais, sous les alvéoles. Comment jugez-vous cette formule ?
J’étais l’un des rares à ne pas vouloir coûte que coûte le Grand Palais. Mais il faut avouer que cela est mieux que la Cour carrée du Louvre, car nos clients sont les grands collectionneurs. Nos prix s’approchent aussi plus de ceux d’un Christopher Wool que de ceux des jeunes artistes. Ceci étant dit, en 2006, nous avons fait notre meilleure FIAC. La nouvelle configuration ne présentera pas cet enchevêtrement que je trouvais réussi l’an dernier, mais qui n’a pas plu à tout le monde. Mais je pense qu’on pourra quand même jouer avec l’espace sous les alvéoles.
Cette section ne sera-t-elle pas concurrencée par le salon de design que lance Patrick Perrin à Londres au moment de la foire Frieze ?
Sans doute la concurrence aurait été moindre si nous avions eu la confirmation plus longtemps à l’avance du maintien de la section design à la FIAC. Mais la gestion du Grand Palais est compliquée et personne n’y peut rien.
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Philippe Jousse, directeur de la galerie Jousse Entreprise
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°261 du 8 juin 2007, avec le titre suivant : Philippe Jousse, directeur de la galerie Jousse Entreprise