Paris réveille son marché de l’art asiatique

Près de deux fois plus de marchands participent cette année à la manifestation spécialisée, l’Automne asiatique

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 8 octobre 1999 - 784 mots

Organisé l’année dernière par neuf galeries parisiennes, l’Automne asiatique s’était fixé pour objectif de redynamiser un marché qui a en grande partie quitté la capitale depuis cinquante ans, au profit de Londres, New York et Hong Kong. Quinze marchands uniront cette année leurs efforts afin de sensibiliser le public français à l’art asiatique. Par ailleurs, trois ventes publiques spécialisées auront lieu à Paris.

PARIS - La montée en puissance a été rapide. Les neuf marchands français qui s’étaient associés en 1998 pour lancer le premier “Automne asiatique” se retrouvent à quinze cette année. Plusieurs autres galeries françaises mais aussi étrangères pourraient, dès l’an prochain, venir gonfler les effectifs de cette jeune manifestation. Un marchand anglais envisage même de louer une galerie sur les bords de la Seine pendant un mois, en octobre-novembre 2000. Il n’est pas exclu que les participants ne disposant pas de galerie à Paris se regroupent au sein d’un salon qui pourrait venir se greffer sur la manifestation. “Le but de l’Automne asiatique est de réveiller le marché parisien et d’inciter les clients à revenir dans nos galeries, souligne Christian Deydier. Nous proposons des objets vendus à des prix modérés afin de séduire une clientèle française. Nous nous efforcerons dans les prochaines années de conquérir les collectionneurs étrangers.”

Si les pièces sélectionnées n’atteignent pas encore le niveau de l’Asian Art Fair, des objets importants vont néanmoins être exposés dans les galeries parisiennes. Christian Deydier présentera une sélection de pièces funéraires en terre cuite de la dynastie Tang, du VIIe au Xe siècle, tel un très rare chameau en terre noire provenant des zones frontalières du nord-est de la Chine, ainsi que des sculptures de personnages étrangers, dont un palefrenier debout en terre cuite vernissée qui porte une sorte de chignon tressé en forme de boudin (dynastie Tang).

Katmandou et Lhassa
Jacques Barrère a rassemblé des sculptures bouddhiques chinoises allant de l’essor du bouddhisme, comme cette tête en marbre d’époque Sui (VIe siècle), au plein épanouissement de la statuaire au XIIIe siècle. Il exposera également un groupe de statues du Sud-Est asiatique composé essentiellement de pièces d’origine khmère provenant d’anciennes collection européennes et américaines, mais aussi des créations d’un sculpteur contemporain influencé par le taoïsme, Wang Keping, dont une sculpture de femme est exposée sur les Champs-Elysées jusqu’au 14 novembre.
Hervé du Peuty et Mike Winter-Rousset, de la Compagnie de la Chine et des Indes, se sont intéressés à l’art de l’Himalaya, celui des villes comme Katmandou et Lhassa – bronzes, peintures murales et portatives –, et celui des champs, d’essence chamanique. On découvrira ainsi quelques objets rituels utilisés par ces prêtres, guérisseurs, magiciens et sorciers – tambours, baguettes, vases, tridents, sculptures –, tel un protecteur de village de l’ethnie Tharu (ouest du Népal). Ces sculptures en bois sont généralement plantées en terre à l’entrée des villages afin de protéger la collectivité ou apprivoiser les forces spirituelles. Le bouddha Sakyamuni en bronze doré témoigne, lui, du raffinement de l’art des villes. Cette pièce d’influence népalaise présente les signes distinctifs de Bouddha : protubérance crânienne, lobes d’oreille allongés, trois plis de beauté sur le cou... Michel Dubosc, de C.T. Loo & Cie, accueillera dans sa grande maison chinoise de la rue de Courcelles “Regard, espaces, signes”, une exposition hommage à Victor Segalen, qui comprendra des statuettes funéraires en terre cuite des dynasties Han, Wei, Sui et Tang, des peintures coréennes Minga des XVIIIe et XIXe siècles, ainsi que des bronzes, émaux cloisonnés et laques japonais de l’époque Meiji. La céramique figurera en bonne place dans plusieurs galeries, chez Bertrand de Lavergne notamment, qui s’est intéressé aux arts du feu en Chine du XVIe siècle à la fin des Qing, mais aussi chez Antoine Lebel qui montrera des porcelaines de la Compagnie des Indes à décors européens.
Laurent Colson, de la galerie Luohan, spécialiste du mobilier ancien des lettrés chinois et plus particulièrement des objets de la fin de la dynastie Ming (1368-1644), présentera des pierres de lettré ou pierres de méditation, telle une Lingbi de couleur noire du début du XVIIe siècle, ainsi que des meubles, notamment un petit cabinet à pans obliques en bois de zitan, aux lignes épurées, provenant de la province du Jiangsu (dynastie Qing, XVIIe siècle). “Ces cabinets servaient dans le studio des lettrés à conserver tout le matériel de calligraphie, mais aussi à ranger des robes de cérémonie ou d’autre pièces d’habillement”, précise-t-il.

Aux quinze expositions organisées dans les galeries viendra s’ajouter un colloque portant sur “le bleu et blanc du Proche-Orient à la Chine”. Organisé par le Musée Cernuschi et la Société française d’étude de la céramique orientale, il se déroulera les 22 et 23 octobre, dans la salle de conférences de la Maison européenne de la photographie.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°90 du 8 octobre 1999, avec le titre suivant : Paris réveille son marché de l’art asiatique

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