PARIS
L’art made in France a été porteur sur la foire, qui s’est tenue au Grand Palais.
PARIS - L’habit fait-il le moine ? Plus précisément, le prestige du contenant infuse-t-il le contenu ?
De telles questions fleurissent au sortir d’Art Paris (16-20 mars), premier salon à revenir au Grand
Palais, à Paris. Véritable revanche de son directeur, Henri Jobbé-Duval, sur la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), la prise de possession du vaisseau s’est faite dans le froid et la bonne humeur. Deux mois avant l’exposition « La force de l’art », Art Paris s’est mue en vrai statement pour les créateurs « bien de chez nous ». « Vive la peinture en France », avait écrit l’artiste Olivier O. Olivier sur le stand de la Galerie de France (Paris). Un cocorico porteur puisque la galerie a cédé son accrochage dominé par un superbe Simon Hantaï tout en pliures outremer de 1964.
L’art made in France fait florès dès que l’on ne joue pas petit bras. Pari réussi pour Jeanne Bucher (Paris), qui a fait sensation avec un magnifique ensemble consacré au cycle de l’« Hourloupe » de Jean Dubuffet. En exhumant de son stock ses Monory, Rebeyrolle et autres Pignon-Ernest exclus de ses stands à l’étranger, Lelong (Paris) a aussi joué le ticket gagnant. L’exposition moins lucrative des œuvres blanches de François Arnal chez le Troisième Œil (Paris) ou celle des Yeux Fertiles (Paris) autour du surréalisme étaient également à saluer.
Le lancement du Prix du dessin par les Guerlain (lire p. 4) avait mobilisé lors du vernissage le ban et l’arrière-ban des collectionneurs parisiens. Ironiquement, ces derniers auraient autrefois trouvé insultant de s’aventurer sur Art Paris !
Certains ont même dû rebrousser chemin face aux mesures drastiques de sécurité limitant la jauge à 5 500 personnes. Ce public d’un jour a été remplacé le reste de la semaine par une audience hexagonale moins avertie. Le ramdam autour du Grand Palais n’a pas encore aimanté les amateurs internationaux, qui ont convergé au même moment à Maastricht, aux Pays-Bas. Du coup, si la plupart des exposants français s’avouaient comblés par le dynamisme des ventes, les étrangers comme Tanit (Munich) ou Guillermo de Osma (Madrid) faisaient grise mine. Pour atteindre l’an prochain 50 % de participation étrangère, la foire devra s’assurer une évolution du public.
Trouver le bon dosage
Art Paris doit surtout poursuivre son toilettage en remplaçant une trentaine d’exposants. Bien que refoulées en périphérie, les galeries médiocres étaient tellement tape-à-l’œil que la rétine en garde encore le mauvais souvenir ! Difficile ainsi de ne pas tousser devant l’accrochage vulgaire de peintures récentes de Gérard Schlosser chez Laurent Strouk (Paris). Pour tirer encore la sélection vers le haut, les organisateurs comptent établir un comité de conseil composé de marchands et de personnalités extérieures. Né d’une volonté de ne pas laisser de coûteux espaces inexploités, le parcours de sculptures sous les mezzanines est aussi à revoir. À de rares exceptions près, comme le psycho-objet de Jean-Pierre Raynaud, entrevu en octobre à la FIAC chez la Galerie 1900-2000 (Paris), le parcours s’apparentait à un vrai musée des horreurs, remugles d’Art Paris ancienne version.
Profitant du boom actuel, Art Paris s’est installée comme une bonne foire de second marché, alors que la FIAC brigue, elle, le premier marché. Aucun salon ne peut pourtant faire l’impasse sur l’un ou l’autre de ces secteurs d’activité. Une manifestation dévolue au second marché est la première fragilisée en cas de baisse du marché. Elle manque aussi singulièrement de respiration. Les rares exposants contemporains ont d’ailleurs peiné à tirer leur épingle du jeu. Jean Brolly (Paris) a dû réviser son accrochage très construit pour un déballage plus proche des salles de Drouot et des sensibilités des visiteurs. Pour rééquilibrer la donne, Henri Jobbé-Duval entend rallier l’an prochain une dizaine de galeries d’art contemporain « en adéquation avec la philosophie d’Art Paris ». Sans doute celles qui ne trouveront pas leur place à la FIAC nouvelle formule, les plus méfiantes face à la scission de la foire en deux, mais aussi les moins hype ou les plus marginales. La frontière entre marginal et ringard est toutefois très ténue ! Art Paris devra en trouver le bon dosage, sous peine d’endosser à nouveau une étiquette de salon des refusés.
- Nombre de visiteurs : 37 000 - Prochaine édition : du 29 mars au 2 avril 2007
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Pari réussi, mais beaucoup reste à faire
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°234 du 31 mars 2006, avec le titre suivant : Pari réussi, mais beaucoup reste à faire