En insistant trop sur le caractère créatif et artistique de leur profession, les designers ont effrayé beaucoup de leurs clients potentiels et notamment les chefs des PMI-PME. Pour pallier ce handicap, dix régions de France ont mis en place une structure para-publique destinée à rapprocher ces deux mondes. Exemple choisi en Rhône-Alpes auprès du Centre du design chargé de \"porter la bonne parole dans les entreprises\".
LYON (de notre correspondant) - Fondant leur démarche sur une démonstration économique – le design, c’est de la valeur ajoutée et non du beau qui coûte cher –, les quelque 300 designers et graphistes de la région Rhône-Alpes ont obtenu du Conseil régional qu’il débloque 1,7 million de francs par an, depuis 1992, pour financer un Centre du design Rhône-Alpes (CDRA).
La proposition a été adoptée "car la région est soucieuse de développer les entreprises installées sur son territoire", explique Henri Montès, chargé de mission pour les nouvelles technologies au Conseil régional. "De plus, les régions partenaires de Rhône-Alpes comme la Catalogne ou le Bade-Würtemberg ont toutes des agences analogues", ajoute-t-il. Résultat d’une politique clairement volontariste, le CDRA a été conçu "pour porter la bonne parole du design dans les entreprises et convaincre leurs responsables de son intérêt économique", assure Marie-Marguerite Gabillard, qui dirige le Centre.
Des journées de formation
Celui-ci organise des journées de formation pour les industriels et leur propose des pré-diagnostics, à des conditions intéressantes, puisqu’une étude peut être subventionnée à 50 % jusqu’à concurrence de 100 000 F. "Le CDRA est bien perçu par les industriels car il n’a rien à vendre", constate Patrick Butté, responsable du cabinet "C3D Design".
Si les relations entre designers et industriels, partenaires naturels ailleurs en Europe, sont si difficiles en France, "la faute en revient aux médias qui se contentent de parler du design mobilier et insistent toujours sur l’aspect esthétique, dénonce Patrick Butté. Or la forme d’un objet n’est jamais indépendante de sa fonction".
Mais cette confusion a été largement entretenue par les designers eux-mêmes, qui ont misé sur leur créativité pour se forger une identité professionnelle. Cette attitude agace les industriels : "Les designers devraient d’abord connaître les contraintes propres à une entreprise avant de vouloir bouleverser ses méthodes de travail", estime Jean-Luc Alzonne, de la société Beynost-Air.
Malgré ces frictions, la réconciliation s’amorce. "L’intrusion d’un designer dans mon entreprise m’a obligé à regarder mes machines autrement : pour la prochaine machine, on s’inspirera de son travail", estime André Chanéac, qui dirige une entreprise de machines-outils. Beynost-Air, qui avait sollicité le CDRA pour faire dessiner un système d’aération, va rééditer l’expérience pour d’autres produits.
L’activité de médiation menée par le CDRA devrait être plus performante encore à l’avenir, puisqu’il développe une banque de données répertoriant tous les designers de la région, en précisant leurs spécialités et leurs champs de compétence.
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Marier design et industrie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°16 du 1 juillet 1995, avec le titre suivant : Marier design et industrie