Le duo d’artistes signe à la galerie Marcelle Alix un geste radical, à rebours de sa pratique habituelle à la beauté discrète.
Paris. Deux monolithes se dressent à l’entrée de la galerie Marcelle Alix, et empêchent de voir plus loin. Le visiteur doit les contourner pour pénétrer à l’intérieur, et se rendre compte qu’il s’agit là de deux tables de bureau en bois mélaminé, posées sur un côté et formant paravent. Une autre table surgit plus loin, renversée elle aussi. Au sol, contre les murs, des écrans plats noirs gisent, débranchés. Au sous-sol, une fenêtre est posée contre l’une des parois aveugles.
L’exposition de Marie Cool Fabio Balducci (les artistes ont joint leurs noms) se présente dans une radicalité et une sécheresse brutes qu’on ne leur connaissait pas. Les deux artistes ont su imposer depuis maintenant deux décennies leur art minimaliste de la performance, lent et précis, du geste discret et obstiné (exécuté presque toujours par Marie Cool, ancienne danseuse), où la répétition intègre le temps comme matière, et où l’attention est portée à la précision de l’action et de l’image.
Les visiteurs de la Documenta 14 à Athènes ont pu voir ces bureaux dressés au Musée national d’art contemporain, tournant avec la lumière du soleil ; d’autres, achetés à une entreprise en faillite, seront montrés l’an prochain à La Verrière (Bruxelles). Dans cette série toute « bureautique », Marie Cool Fabio Balducci exécutent un geste fort, politique, dénué d’images. Les écrans se sont tus, le flux d’information s’est tari. On peut voir cependant, dans ce mobilier renversé à la perpendiculaire, forme banale et sans âme, une référence aux barricades qui s’élèvent ici et là contre l’uniformisation imposée par le monde du travail. Ou, comme l’indique le titre de l’exposition, « Spiaggiamento » (« Échouement », en italien), des corps abandonnés, « désamarrés », livrés à eux-mêmes, inutiles. Déjà présent en sous-texte dans les actions de Marie Cool Fabio Balducci, où la délicatesse de l’être vient enchanter l’action monotone, le thème de l’aliénation par le travail s’impose ici avec une force sourde.
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Marie Cool Fabio Balducci renversent la table
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°487 du 20 octobre 2017, avec le titre suivant : Marie Cool Fabio Balducci renversent la table