Marie-Blanche Carlier dirige depuis 1997 avec Ulrich Gebauer la galerie Carlier Gebauer, fondée en 1991 à Berlin. Après l’avoir déserté un temps, l’enseigne revient en octobre à la FIAC (Foire internationale d’art contemporain), à Paris.
L’attrait croissant pour Berlin est-il un effet de mode, répond-il à un besoin du milieu de l’art de changer régulièrement de focus ?
Berlin a toujours été une ville importante et cela s’est accentué depuis la chute du Mur. Nous sommes parvenus maintenant à une maturité artistique qui explique que journalistes, curateurs et collectionneurs viennent davantage aujourd’hui. Les galeries berlinoises font preuve d’un programme original, pointu et varié. La ville se transforme sans cesse et bouillonne d’initiatives. Beaucoup d’énergie rayonne autour des artistes, de plus en plus nombreux à vivre à Berlin. Au-delà des conditions de production exceptionnelle (coûts de production, location de studio), les artistes viennent parce qu’ils sont fascinés par la structure urbaine, l’ouverture et la liberté d’action possible. Les artistes attirent à leur tour leurs réseaux de commissaires, critiques d’art, etc. De ce fait, le dialogue et le climat artistique de cette ville se révèlent exceptionnels. Berlin est une métropole ouverte, qui continue à se chercher.
On entend dire que Berlin manque de collectionneurs, qu’elle constitue un forum plus qu’une place de marché. Qu’en est-il ?
La ville est un forum d’idées, mais aussi une place de marché, peut-être différente des autres, car moins locale. C’est tout d’abord une place de production et de création, ce qui attire aussi le marché. En avril par exemple, les galeries organisent le « Gallery Week-end », et invitent environ cinq cents professionnels de l’art à Berlin. Cette opération permet aux galeries d’avoir une relation individuelle et personnelle avec leur public, et de montrer leur programme dans sa complexité et surtout à l’échelle adéquate.
De plus en plus de collectionneurs ouvrent aussi des espaces à Berlin.
C’est un phénomène que l’on observe depuis deux ans environ. Ils suivent l’exemple des Hoffmann qui se sont établis ici dix ans plus tôt. Berlin est en passe de devenir la ville d’Allemagne qui concentre la plupart des collections privées allemandes, ouvertes au public ou destinées à l’être.
Est-ce à dire que Cologne est définitivement enterrée par Berlin ?
Cologne a définitivement perdu l’importance qu’elle avait dans les années 1980. Art Cologne, qui était une foire mythique, ne joue plus aucun rôle sur la scène internationale. Le Kölner Kunstverein est fermé et la plupart des galeries importantes de Cologne, à quelques exceptions près, sont maintenant à Berlin. À l’inverse, Berlin, qui, au tout début des années 1990, n’avait aucune importance dans le domaine de l’art contemporain, concentre aujourd’hui un grand nombre de galeries représentant de manière exclusive les artistes majeurs de notre temps.
La France a organisé en 2006 « Art France Berlin », une opération commando dans la capitale allemande. Comment celle-ci a-t-elle été perçue en Allemagne ?
Cette opération n’a pas été perçue positivement. Il est vrai que l’art contemporain français ne déclenche pas en Allemagne l’intérêt qu’il pourrait susciter. Certains projets greffés à l’opération ont eu plus de résonances. L’exposition de Jean-Luc Moulène au Postfuhramt par exemple était exceptionnelle et a été très bien reçue.
Pourquoi avez-vous décidé de revenir cette année à la FIAC ?
Pendant longtemps la FIAC n’a pas occupé une place majeure dans le marché. J’ai eu le plaisir de constater en 2006 une nouvelle énergie, et, en tant que galeriste française, j’abandonne volontiers Frieze Art Fair [à Londres], qui m’a déçue, pour concentrer notre énergie sur la FIAC, entre la foire de Berlin et Art Basel Miami Beach. Participer à trop de foires exerce une pression qui n’est plus créative pour les artistes et nous éloigne de notre manière de travailler. La qualité de certaines foires a énormément baissé de ce fait, et la FIAC semble se démarquer positivement dans ce contexte.
Un de vos artistes, Aernout Mik, représentait cette année les Pays-Bas à la Biennale de Venise. Ce type de rendez-vous, devenu « paillette », a-t-il un impact sur une carrière ?
Le pavillon national de Venise est l’un des rendez-vous les plus importants dans la carrière d’un artiste. Celui d’Aernout Mik s’est démarqué par sa position radicale, et l’impact sur sa carrière est décisif.
Carlier Gebauer, Holzmarktstraße 15-18, Bogen 51/52, Berlin, tél. 49 30 2400 863 0, www.carliergebauer.com
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Marie-Blanche Carlier, codirectrice de la galerie Carlier Gebauer à Berlin
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°265 du 21 septembre 2007, avec le titre suivant : Marie-Blanche Carlier, codirectrice de la galerie Carlier Gebauer à Berlin