L’Espace Meyer Zafra expose les créations personnelles du décorateur et scénographe, lesquelles témoignent de l’influence du cinétisme sur ce Vénézuélien arrivé à Paris dans les années 1960.
Paris. C’est une rétrospective de poche que l’Espace Meyer Zafra, dans le Marais, offre à Manuel Mérida, né en 1939 au Venezuela. De ses premiers « Papiers froissés » des années 1970 à ses « Cercles » en série et à l’une de ses dernières installations, en passant par ses essais quadrilatères avec son Carré écolier, en quelques œuvres, le visiteur peut appréhender la trajectoire du plasticien.
Ce Vénézuélien venu vivre à Paris à la fin des années 1960 n’y aura jamais vraiment percé comme artiste, très accaparé par sa carrière de scénographe et de décorateur pour la télévision et la publicité. Activité qui lui a d’ailleurs fourni un terrain d’expérimentation et, avec celui-ci, « un nouvel ensemble complet de compétences techniques et pratiques, une connaissance approfondie des matériaux, de la mécanique […] »,écrit l’historienne de l’art Valentina Locatelli dans une monographie à paraître. Car s’il a côtoyé Carlos Cruz-Diez et Jésús Rafael Soto, qui l’ont initié au cinétisme, Manuel Merida est moins passionné par les jeux optiques de la lumière que par les variations de la matière. Ainsi les boîtes circulaires en verre cerclées de métal qu’il conçoit dans les années 1980-1990 invitent-elles le spectateur à les mettre en mouvement : une notion centrale dans son œuvre. Mais ce sont aussi leurs mélanges de pigments, sciure de bois, débris, bouts de papier, poudre de charbon…, toute cette réalité substantielle tangible, qui l’intéresse.
Et c’est bien parce que sa démarche traduit une volonté d’innover qu’elle ne se laisse pas réduire à une dimension décorative. « Dans tous les cas,écrit-il en préambule à un catalogue édité en 2017 par la galerie, ce que propose l’artiste ou le créateur n’est pas de faire une “bonne peinture” ou une bonne facture mais d’essayer d’inventer, de modifier certaines structures établies. » C’est ce qu’il tente de faire. Même si cette spectaculaire Installation orange manuchrome (1972-2021) qui ferme l’espace n’est pas sans rappeler, avec son esthétique de diorama d’atelier, les vitrines qu’il conçut pour les boutiques Hermès de Paris, New York ou Shanghaï. Des réalisations déployant à grande échelle son sens de l’espace et de l’architecture, souligne Valentina Locatelli. Et certes, ses grands cercles monochromes équipés de mécanismes giratoires sont devenus, dans les années 2000, sa signature. Rouge vermillon ou garance, rose tyrien, bleu ultramarine, leurs rotations silencieuses déclinent les potentialités du hasard recréant perpétuellement l’œuvre en la recomposant, à la façon de lessiveuses hypnotiques. Mais, de cette pièce en Plexiglas de 1989, Untitled (Catalysis’ Series), qui semble respirer sous un amoncellement de papiers, à ces disques dans lesquels se jouent des effondrements miniatures, de muets éboulements, on peut également percevoir chez Mérida une attention au monde qui l’entoure et à cette nature organique tenue à distance, et néanmoins offerte.
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Manuel Mérida, la matière en mouvement
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°563 du 19 mars 2021, avec le titre suivant : Manuel Mérida, la matière en mouvement