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Trois questions à

Louis et Matthieu de Bayser, marchands de dessins à Paris

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 3 février 2006 - 835 mots

PARIS

« Internet est devenu un outil indispensable »

Comment analysez-vous le marché du dessin ?
Louis et Matthieu de Bayser : Depuis les années 1970, le dessin a vu sa valeur augmenter fortement sans connaître de fléchissement, à l’exception d’une baisse de régime au milieu des années 1990. Aujourd’hui, le marché peut être subdivisé en trois catégories qui évoluent différemment. En premier lieu, celle des dessins dont la valeur est inférieure à 5 000 euros, englobant des dessins anonymes du XVIe au XVIIIe siècle comme des bons dessins de petits maîtres du XIXe siècle. Ce secteur reste constant, et donne à des collectionneurs l’occasion de se faire plaisir en s’offrant des dessins à des prix raisonnables. En second lieu, celle des dessins valant entre 5 000 et 25 000 euros. Ce secteur est actuellement le moins dynamique et le plus difficile à cerner, car il comprend les petits dessins de grands artistes et les grands dessins d’artistes mineurs. Il faut cependant noter que les très beaux dessins de petits artistes se négocient toujours assez bien grâce à leur qualité graphique, nonobstant le fait que l’artiste ne soit pas très connu (par exemple, une aquarelle d’Isidore Pils vendue 7 500 euros au dernier Salon du dessin [à Paris] [lire le JdA no 210, 4 mars 2005]). Le dernier secteur comprend les dessins de plus de 25 000 euros. Il s’agit principalement de très beaux dessins réalisés par des artistes réputés. On peut prendre l’exemple d’un très beau lavis de Jean-Baptiste Greuze, La Bénédiction paternelle, vendu 144 000 euros à l’hôtel Drouot le 9 décembre 2005 (SVV Millon & associés). Cette partie du marché a tendance à croître le plus vivement, pas en quantité mais en prix, notamment à cause d’une nette raréfaction des dessins de très grande qualité. On ne voit maintenant presque plus de beaux dessins italiens du XVIe siècle, ce qui peut expliquer la somme astronomique atteinte le 5 juillet dernier à Londres chez Christie’s par un dessin d’Andrea Del Sarto, une Tête de saint Joseph, adjugée 6,5 millions de livres sterling (9,5 millions d’euros).

Quels sont vos derniers coups de cœur artistiques ?
L. de B. : Un autoportrait de Léon Spilliaert exposé au Salon du dessin en 2005 et acheté par le Musée d’Orsay. La technique du lavis est époustouflante et l’ambiance de l’autoportrait intrigante. Dans un autre registre, les collections Geiger d’art précolombien – notamment les masques Teotihuacán (SVV Binoche) – et Bela Hein d’art africain et précolombien (SVV Fraysse & associés), vendues à Drouot en mars et en juin 2005 [lire les JdA respectifs no 212, 1er avril 2005, et no 218, 24 juin 2005].
M. de B. : Une aquarelle gouachée par Théodore Géricault représentant une vue de l’atelier de l’artiste. Au verso de la feuille, l’artiste a tracé des chevaux pris sur le vif, et il a recouvert le recto, qui lui aussi portait des croquis de chevaux, par un paysage à la gouache blanche d’une vigueur et d’une autorité stupéfiante. Cette aquarelle se trouve dans la collection de M. Jean Bonna, l’une des plus belles collections particulières de dessins. Une sélection de ses dessins français sera exposée à l’École [nationale supérieure] des beaux-arts [à Paris] du 14 février au 23 avril.

Quelle est votre actualité ?
L. et M. de B. : Nous sommes partis d’un constat : Internet est devenu un outil indispensable pour les acteurs du marché de l’art. La plupart des grands musées ont constitué des bases de données de leurs collections (inventaire des dessins numérisés du Louvre, photos de la Réunion des musées nationaux, du Getty [Museum de Los Angeles]…), permettant aux internautes de consulter les fiches et les images de toutes les œuvres conservées. Les maisons de ventes, tant en France qu’à l’étranger, mettent en ligne l’ensemble des objets qu’elles vendent aux enchères. Nous avons donc
réfléchi à la manière dont nous, marchands de dessins, pouvions proposer un outil interactif de qualité aux amateurs qui souhaitaient pouvoir acheter des dessins en ligne en toute confiance et sécurité. Nous avons donc inauguré en décembre 2005 un « cabinet d’amateur » consultable sur notre site Internet (www.debayser.com). Composé d’une dizaine de dessins inédits du XVIe au XIXe siècle, notre cabinet est actualisé tous les deux mois en fonction de nos nouvelles acquisitions. Le prix des dessins proposés est inférieur à 6 000 euros. En choisissant une fourchette de prix accessibles, nous souhaitions montrer que, malgré une tendance actuelle du marché à se tourner vers les dessins haut de gamme, il était toujours possible de se faire plaisir en achetant des feuilles de qualité à un prix raisonnable. Par exemple, dans notre première sélection de décembre, nous avions un ensemble de saynètes au lavis de Claude Gillot, inspirateur du XVIIIe siècle frivole et condisciple d’Antoine Watteau, pour 2 500 euros. Le prochain cabinet d’amateur sera mis en ligne au début de février. Les amateurs nous ayant au préalable envoyé un e-mail avec l’objet « cabinet d’amateur » recevront en avant-première la liste des dessins sélectionnés.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°230 du 3 février 2006, avec le titre suivant : Louis et Matthieu de Bayser, marchands de dessins à Paris

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