Avec leurs records ou, parfois, leurs résultats décevants, les ventes aux enchères se suivent mais ne se ressemblent pas. Chaque mois, L’Œil interroge les experts qui donnent leur opinion sur les prix obtenus.
52 000 F
Ce métrage de velours ciselé vénitien remonte au XVIe siècle et mesure près de quatre mètres de long. Il appartenait à l’ensemble réuni par Juliette Niclausse, une antiquaire qui a figuré parmi les premiers à s’intéresser aux tissus anciens. Cette étoffe, achetée lors d’une vente à Londres chez Christie’s en 1982, provenait de la prestigieuse collection d’un antiquaire anglais et avait été adjugée à l’époque 15 147 F. Aujourd’hui le prix de cette pièce a plus que triplé. Un véritable succès pour l’expert Aymeric de Villelume, qui en attendait 20 000 F. Selon lui, « le marché des textiles anciens s’est déplacé de Londres à Paris où de très beaux résultats ont animé l’année. Les amateurs restent en majorité étrangers, Anglo-saxons, Suisses, Italiens. Les Français sont encore minoritaires mais comptent quelques collectionneurs sérieux, qui savent enchérir sur les bonnes pièces. Celles-ci sont toutes saluées par de beaux résultats, même les pièces religieuses, qui n’intéressaient pas grand monde jusqu’à maintenant. On assiste actuellement à une prise de conscience du marché des tissus anciens, à une appréciation de leur qualité ».
Étude PIASA, Drouot, 26 septembre.
280 000 F
Malgré son usure et ses lacunes bien visibles, ce portrait en marbre a obtenu une enchère très supérieure à son estimation de 100 000 F. L’expert Jean-Philippe Mariaud de Serres analyse ainsi son prix : « On remarque depuis environ trois ans une vogue pour les marbres antiques à condition qu’ils soient beaux. Celui-ci avait en plus des atouts spécifiques qui ont fait monter son prix : le fait qu’il s’agisse d’une tête monumentale, c’est-à-dire plus grande que nature, qu’il représente le dieu Bacchus, un dieu non pas belliqueux, mais protecteur, éternellement jeune et beau, enfin que le modèle soit le célèbre Antinoüs, favori de l’empereur Hadrien. Cette enchère est exactement à l’image de la vente, qui a totalisé 24 MF sur une estimation globale de 12 MF. »
Étude François de Ricqlès, Drouot-Montaigne, 1er et 2 octobre.
50 000 F
Photographié par Paul Sescau ou Maurice Guibert vers 1894, le peintre Toulouse-Lautrec contemple sa toile Au salon en compagnie de l’un de ses modèles. Cette épreuve appartient à une série de 11 photographies, réalisées entre 1889 et 1898, montrant le peintre dans des circonstances diverses. Les tirages proposés à la vente, exécutés vers 1910, ont totalisé 280 000 F sur une estimation de 80 000/100 000 F. L’expert Marc Pagneux commente : « Ces photographies de Toulouse-Lautrec ont déclenché une vive bataille d’enchères entre des collectionneurs qui ont privilégié la rareté et l’intérêt de l’image, puisqu’il s’agissait de tirages bien postérieurs à ces photographies. »
Étude Lelièvre-Paris-Maiche, Chartres, 7 octobre.
105 000 F
Véritablement mise en scène dans un écrin en marqueterie de paille, cette maquette d’un vaisseau trois ponts en ivoire fabriquée entre 1795 et 1815 est ce que les spécialistes appellent un travail de ponton. Les pontons sont des navires désarmés et arrimés les uns aux autres, où les Anglais parquaient les marins français prisonniers. Dans des conditions extrêmement difficiles, ces derniers ont réalisé de petits chefs-d’œuvre comme celui-ci, qui a sans doute nécessité le travail de plusieurs hommes pendant au moins un an. Récupérant le cerclage des tonneaux pour faire des couteaux, les os de bœuf dans leur nourriture qu’ils mettaient à bouillir pour avoir de la colle, séchant des herbes pour la marqueterie de paille, ils ont exécuté des maquettes qui figurent parmi les plus recherchées. Pour l’expert Jean-Pierre Duchiron, « il s’agit d’un prix normal pour un souvenir historique, qui présente en plus un attrait maritime, un prix justifié par la rareté des maquettes de ponton et la qualité de celle-ci ».
Étude Poulain-Le Fur, Palais des Congrès, 24 septembre.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°521 du 1 novembre 2000, avec le titre suivant : l‘œil de l‘expert