Laura de Santillana expose ses dernières
sculptures à la galerie L’Arc en Seine.
Paris - Depuis une dizaine d’années, avec le maître verrier de Murano Simone Cenedese, Laura de Santillana élabore des sculptures en verre de manière peu orthodoxe. Une fois soufflée, la bulle (de verre) est ensuite « aplatie », « écrasée » pour, au final, obtenir une pièce au profil très étroit. « Le fait de rapprocher deux parois engendre des événements inattendus ; des détails nouveaux apparaissent, les lignes et les dessins se dédoublent, observe l’artiste. De plus, cela donne une rare profondeur à la couleur. » Mais cette méthode n’est pas sans inconvénient. « Par nature, le verre soufflé est une forme ronde qui cherche à se déployer dans l’espace, explique-t-elle. Or, en voulant l’aplatir et le contraindre dans un format plutôt carré, je force évidemment sa nature. Le verre se retrouve en quelque sorte stressé. » Tout le travail consiste donc, notamment, à essayer de gérer ce « stress ».
« Les pièces révèlent une sorte de nervosité »
Les dernières recherches de Laura de Santillana – à travers la quinzaine de pièces montrées à Paris à la galerie L’Arc en Seine – ont pour thème la ligne verticale. Une ligne qui fatalement divise, d’où le titre de cette exposition : « Partitions ». Il existe deux manières de diviser, l’une s’opère au moment du soufflage, l’autre après.
La première méthode résulte, en fait, de l’assemblage par le souffleur de deux demi-sphères. Une fois constituée, la bulle de verre est aplatie et la ligne de « soudure » se fond alors dans la matière. Si on la suit des yeux, elle dessine comme une ellipse, d’où la couleur estompée. Ainsi ces deux groupes de trois pièces, l’un orange-noir (Ondes, résonance et petit son), l’autre vert-noir (Ogive et aiguilles). En scrutant d’un peu plus près les côtés étroits de chaque sculpture, on remarque un bourrelet ou une tâche qui correspondent précisément à l’empreinte du trou par où passait la canne de soufflage, juste avant que le verre ne « cicatrise ». « J’aime lorsqu’une pièce conserve des traces du travail réalisé en atelier », dit Laura de Santillana.
La seconde méthode, elle, s’effectue à l’aide d’un long couteau, après l’« aplatissement » d’une bulle de verre unique. Dans la matière encore molle est réalisée, à plusieurs reprises, une incision. Cette fois, la « ligne » devient une véritable entaille que l’on sent sous ses doigts lorsqu’on l’effleure. La sculpture présente alors un aspect très organique. Sur une pièce blanche, quasi translucide, le dessin né de l’écrasement d’une paroi sur l’autre ressemble à une radiographie de cage thoracique. Ailleurs, on est encore plus proche de l’anatomie humaine. On pense à des fragments de corps. Ici un nombril, un dos. Là des joues gonflées, ou peut-être des fesses. « Les pièces révèlent une sorte de nervosité », estime Laura de Santillana. Aussi ne faut-il pas hésiter à les toucher, avec l’accord exprès de l’artiste. Le prix des pièces débute à 10 000 euros. Et la plus grande, Grand Bleu, de couleur bleu cobalt, mesurant 44,5 x 48 x 7 cm, est vendue 18 000 euros.
Jusqu’au 29 mai, galerie L’Arc en Seine, 33, rue de Seine, 75006 Paris, du lundi après-midi au samedi 11h-13h et 14h-19h, tél. 01 43 29 11 02. Catalogue.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°189 du 19 mars 2004, avec le titre suivant : Ligne de partage