PARIS
Les galeries spécialisées dans l’art moderne, bien que peu nombreuses sur la foire, sont présentes avec de grands noms et des prix élevés.
Paris. Privées cette année encore, en raison de la crise sanitaire, d’une présentation à Tefaf – la foire d’art et d’antiquités de Maastricht n’ayant eu lieu qu’en ligne –, les marchands spécialisés dans l’art moderne ont d’autant plus souhaité prendre part à la Fiac. Et y montrer des pièces remarquables. Ainsi de la Galerie Le Minotaure (Paris), qui s’inscrit traditionnellement au cœur du modernisme et réunit des œuvres de ses artistes favoris : depuis les pionniers du cubisme tel Fernand Léger à ceux de l’abstraction (Robert Delaunay, Frantisek Kupka), jusqu’au constructivisme européen (Walter Dexel, Carl Buchheister). Mais aussi quelques-uns des membres de l’Art concret, d’Abstraction-Création et de Réalités nouvelles (Auguste Herbin, César Domela, Georges Valmier…). Huiles sur toile, sculptures, reliefs, œuvres sur papier, photographies, les prix démarrent à 10 000 euros et grimpent jusqu’à 700 000 euros pour La Flèche de Notre-Dame de Paris (1909, [voir ill.]), une aquarelle de Robert Delaunay. Parmi les trouvailles de cet accrochage : un rare relief de Jean Arp (La Fourchette, 1927-1928), une grande toile de Georges Valmier (1930), un tableau d’Auguste Herbin (Composition symétrique, 1920)…
La Galerie 1900-2000 (Paris) embrasse pour sa part l’amplitude du vingtième siècle, d’un dessin à l’encre et à l’aquarelle de Francis Picabia (Sans titre, Modèle à la robe verte, 1920, entre 25 000 et 50 000 €) à un pochoir sur carton marouflé sur toile d’Alighiero e Boetti (Uno nove sette zero, 1970, entre 75 000 et 100 000 €) en passant par un dessin au fusain et à la gouache de Hans Bellmer (Sans titre, 1963, entre 50 000 et 75 000 €). Sur le stand de Zlotowski (Paris), on peut voir deux œuvres rares de Le Corbusier : un collage, gouache et encre de Chine sur papier (Le Taureau, 1952, 140 000 €) ainsi qu’une fragile Nature morte au siphon et aux gants (40 000 €). Mais aussi une toile de Simon Hantaï de la série des « Panses » (130 000 €). Pour mémoire, Hantaï aurait d’abord intitulé cette série « Maman ! Maman ! », titre qui serait ensuite devenu : « La Saucisse », le mot hongrois « bendös» pouvant désigner « une saucisse farcie » ou « le ventre d’une femme enceinte ». Subtilités de la polysémie.
Applicat-Prazan (Paris), qui a fait de l’« hypersélectivité » sa devise commerciale, exhume tel un trésor un tableau peint en Provence en 1953 par Nicolas de Staël, inédit sur le marché. Un Paysage qui témoigne de la découverte par le peintre de la lumière du Midi. La galerie a réuni par ailleurs une sélection de tableaux de grands peintres européens : Atlan, Bissière, Staël, Dubuffet, Estève, Fautrier, Hartung, Lanskoy, Magnelli, Masson, Poliakoff, Schneider, Soulages et Vieira da Silva… pour des prix allant de 95 000 euros à plus de 3 millions d’euros.
Les enseignes spécialisées n’ont pas le monopole de l’art moderne, surtout depuis que les galeries contemporaines s’intéressent aux successions. On trouvera par exemple chez l’espagnol Nogueras Blanchard (Madrid) un superbe Antoni Tàpies (Palangana sobre paper, 1989, 145 000 € hors TVA). Tornabuoni Art (Paris) promeut avec brio la création italienne de l’après-guerre, à travers les figures d’Alberto Burri, de Boetti, Lucio Fontana, Enrico Castellani, Piero Dorazio ou Paolo Scheggi, qui, tous, ont contribué à modifier la définition et la perception de l’œuvre d’art. On verra ainsi sur le stand un étonnant collage d’enveloppes (Lavoro postale (permutazione), 1975) de Boetti, de très identifiables « Concetto spaziale » de Fontana, une belle Superficie bianca (1990) de Castellani… (les prix s’étagent de 50 000 à 2 millions d’euros). L’art, ne serait-ce que le temps d’une foire, ne peut faire abstraction du monde dans lequel nous vivons : la galerie ouvre en même temps que la Fiac une exposition rappelant les travaux d’Alighiero Boetti (1940-1994) en lien avec l’Afghanistan, « Alighiero Boetti. Thinking about Afghanistan ». On peut avoir une pensée en effet pour ceux qui sont en ce moment condamnés à vivre sans art.
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Les modernes tiennent leur rang
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°575 du 15 octobre 2021, avec le titre suivant : Les modernes tiennent leur rang