L’Association nationale des élèves commissaires-priseurs a interrogé Élisabeth Guigou pour connaître le sort réservé aux diplômés qui ne sont pas encore en fonction. Leur inquiétude, fondée sur l’absence de dispositions les concernant dans les textes en élaboration, porte en particulier sur la valorisation de leur diplôme.
PARIS - Dans une lettre adressée au garde des Sceaux, l’Association nationale des élèves commissaires-priseurs, forte de 200 membres – diplômés et stagiaires, ainsi que quelques commissaires-priseurs récemment installés –, se plaint “de situations alarmantes, très difficiles à vivre, et qui ne semblent pourtant prises en compte par personne”. L’association relève en particulier : “Le diplôme dont nous sommes titulaires, que nous entendons défendre et dont l’État a lui-même relevé le niveau de sélectivité en 1987, ne bénéficie, dans le cadre d’une réforme prochaine, d’aucune équivalence en dehors de la profession. Par conséquent, il manque, entre autres, cruellement d’assise”. Il faut rappeler que l’obtention du diplôme de commissaire-priseur ne suffit pas pour exercer. Il faut que le diplômé achète une charge ou des parts d’une société civile professionnelle titulaire d’une charge, ce qui lui permet ensuite d’être nommé par le ministre de la Justice. C’est dire que le diplôme ne trouve sa valorisation que dans l’accès à une charge et au monopole que la réforme doit supprimer. Or, ces dernières années, “la situation d’avant-réforme” a figé les transmissions d’études. La missive ne précise pas – mais c’est une explication complémentaire – que le prix des charges était devenu prohibitif, en particulier pendant la spéculation des années 1988-1990, et que le reflux n’a pas détendu un marché très étroit. Faute d’opportunités, nombre de diplômés sont donc restés sur le bord du chemin.
Un jury prodigue
Le texte précise ainsi que de 1990 à 1997, 156 candidats ont obtenu le diplôme et que 53 seulement ont pu s’installer. Des statistiques jointes démontrent d’ailleurs curieusement que la profession a récemment “ouvert les vannes“ ; entre 1993 et 1996, il a été en moyenne délivré chaque année 16 diplômes. En 1997, 27 diplômes ont été attribués (sur 30 candidats environ). Le jury est-il devenu prodigue d’un titre qu’il savait pourtant en cours de dévaluation ?
L’association s’interroge évidemment sur le devenir des diplômés sans charge. Si le questionnement est légitime, les solutions proposées portent la marque d’une culture du monopole dont les signataires risquent, hélas, d’être les premières victimes. Conviction profonde ou guidée par leurs aînés, les signataires, après avoir souligné leur “attachement aux principes qui régissent la profession” – le commissaire-priseur dans sa ville étant décrit de façon un peu idyllique comme arbitre, conseil, expert, compétent et impartial, allégeant les tâches de la magistrature, connaisseur sans équivalent du patrimoine national, et jusqu’à “modèle d’aménagement du territoire” – ,semblent concevoir leur avenir professionnel plutôt dans la fonction publique, “plus proche de l’état d’esprit de la profession actuelle”, que dans “l’exercice commercial (...) de diplômés qui n’ont pas été formés pour cela”.
Tout cela donne un constat assez sombre. Il faut espérer que ceux qui ont formé cette génération sauront lui faire une place dans les projets assurant leur propre survie. Cela suppose que les intéressés manifestent leur intention d’agir et l’autonomie de leurs propositions.
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Les diplômés sont soucieux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°58 du 10 avril 1998, avec le titre suivant : Les diplômés sont soucieux