Théâtre Marigny

Les archives Renaud-Barrault entrent en scène

Les comédiens font les beaux jours de Me Tajan

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 1 juin 1995 - 509 mots

C’est au Théâtre Marigny, où Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud ont produit près de cinquante pièces entre 1946 et 1956, que Me Jacques Tajan a choisi de disperser, le 27 juin, la masse de documents, lettres autographes, manuscrits et dossiers de mise en scène, laissés après leur mort par le célèbrissime couple de comédiens.

PARIS - Estimée entre 3 et 4 millions de francs, la succession sera vendue au profit de Jean-Pierre Granval, fils de Madeleine Renaud. "Ce sera une vente à grande émotion, sinon à grand produit", estime Me Tajan. Il a fallu des mois aux experts de l’Étude Tajan pour trier et regrouper en 150 lots les quelque 7 000 à 8 000 lettres adressées à Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault par plusieurs centaines de personnes, soit le plus grand ensemble de lettres d’écrivains et de gens de théâtre modernes jamais proposé à la vente.

L’accord de Claudel pour la création du Soulier de Satin à la Comédie Française, déchiré par un soldat allemand sur la ligne de démarcation et ramassé et recollé par Jean-Louis Barrault, est estimé autour de 10 000 francs.

Sartre et Le Soulier de Satin
Treize lettres de Samuel Beckett à Madeleine Renaud sont estimées entre 6 000 et 8 000 francs, une lettre de Buñuel sur la guerre civile en Espagne de 2 000 à 3 000 francs, et un ensemble de sept lettres de Camus concernant l’adaptation de ses pièces et Le Soulier de Satin entre 15 000 et 18 000 francs. Un seul lot réunissant cent lettres de comédiens, parmi lesquels Maria Casarès, Arletty et Sacha Guitry, est estimé de 15 000 à 20 000 francs.

La vente comprendra également des lettres de Genet, Malraux, Gide, Prévert, Queneau, Sartre (qui a adressé neuf pages sur Le Soulier de Satin à Jean-Louis Barrault), Lawrence Olivier et Vivian Leigh.

Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault conservaient aussi des dossiers complets sur la mise en scène de leurs très nombreuses productions, comprenant en particulier des projets de décors. Me Tajan mettra ainsi en vente des esquisses de costumes et de décors d’une quarantaine d’ar­tistes et décorateurs, notamment des croquis de Balthus, des dessins d’André Barsacq pour une production de Volpone, de Christian Bérard pour Amphitryon, et des esquisses de Cocteau. En raison de la nature singulière de la vente, les estimations ont été difficiles à fixer.

Onze dessins d’Yves Saint Laurent pour Le Mariage de Figaro sont estimés entre 15 000 et 20 000 francs ; des huiles de Max Ernst et de Dorothea Tanning pour les décors et les costumes de la Judith de Giraudoux, présentée au Théâtre de l’Odéon en 1961, sont estimées entre 60 000 et 150 000 francs.

La bibliothèque de travail de Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud, qui comprend 5 000 volumes, sera dispersée en quarante lots, ainsi que de nombreux tableaux et dessins modernes. Deux paravents à quatre feuilles de 1942, La Terre et La Mer, par Lucien Coutaud, auteur de décors de théâtre figurant également dans la vente, sont estimés entre 100 000 et 150 000 francs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°15 du 1 juin 1995, avec le titre suivant : Les archives Renaud-Barrault entrent en scène

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