Design

Le mobilier en acier de Maria Pergay

Par Marie Potard · L'ŒIL

Le 26 mars 2024 - 777 mots

La designeuse a marqué de sa touche singulière la décoration française dans les années 1970. Sa côte pourrait bientôt évoluer.

Arrivée à Paris à l’âge de 7 ans de Moldavie avec sa mère, Maria Pergay (1930-2023) va changer de destinée lorsque, dans les années 1950, après son mariage avec Pierre Pergay, elle réalise grâce à l’une de ses amies la vitrine du chausseur Durer. Ses grands oiseaux en fer forgé séduisent et les propositions de collaboration avec des marques de luxe comme Dior ou Hermès affluent. Son succès est tel qu’elle ouvre rapidement un magasin place des Vosges où elle expose ses propres créations en argent, mêlées à des antiquités. Des personnalités comme Hubert de Givenchy, Helena Rubinstein ou encore Christian Dior se pressent dans sa boutique.Vers le milieu des années 1960, Maria Pergay se tourne vers l’acier ­inoxydable – dans l’air du temps – grâce à une proposition du producteur Uginox. Plus jamais elle ne quittera ce matériau, dont elle disait qu’il est « aussi précieux que le plus précieux des bois ». En 1968, sa première collection de meubles est exposée à la galerie Maison et Jardin – dirigée par le décorateur Jean Dive – avec des pièces cultes comme le lit « Tapis volant » ou la chaise « Anneaux ». Pierre Cardin tombe sous le charme de ses créations et achète tout. Il devient alors son mécène et lui ouvre les portes du marché international.Maria ­Pergay a réussi à dompter l’acier, matériau réputé froid, en lui donnant des courbes élégantes et sensuelles. Très tôt, elle intègre des pierres semi-précieuses et des coquillages à ses réalisations, qui apportent une touche féminine à des pièces aux formes souvent masculines. Ses meubles contemporains s’inspirent aussi des arts anciens dont elle est férue.

nacre et galuchat

Après la déferlante des années 1970, la créatrice autodidacte reste active sur des chantiers et pour des commandes privées, notamment en Arabie saoudite et au Maroc, avant de faire la rencontre, au début des années 2000, des galeristes Suzanne Demisch et Stephane Danant, établis à New York. Pour eux, dès 2005, elle crée de nouvelles pièces, sans jamais aller à l’économie, utilisant la nacre, le galuchat ou de nouveaux types d’acier. En parallèle, son marché aux enchères s’amorce et connaît un emballement. S’il a rencontré quelques creux, il est aujourd’hui stable avec, çà et là, des pics. Mais la disparition de la créatrice pourrait bien influencer sa cote dans un avenir proche.

50 000 € 

Chaise Anneaux. -  Maria Pergay se définissait avant tout comme une « faiseuse ». Elle ne dessinait pas mais créait directement ses pièces telles qu’elle les avait imaginées, avec les ouvriers à l’atelier. À propos de cette chaise, elle racontait que l’idée lui était venue en pelant une orange. Le modèle aujourd’hui devenu célèbre a été créé en 1968 et fait partie de la première collection de meubles de Pergay exposée à la galerie Maison et Jardin, dirigée par le décorateur Jean Dive.

 

Galerie Jousse entreprise, Paris.

130 000 € 

Table Saturne. -  Cette table fait également partie des modèles créés pour la première exposition chez Maison et Jardin. Au printemps 1967, Gérard Martel, directeur d’Ugine, le plus gros producteur français d’acier, lui rend visite et lui demande si elle envisagerait de fabriquer chez Uginox, la marque de l’entreprise, les petits objets en métal argenté qui l’avaient fait connaître. Maria, estimant que le matériau ne pouvait pas être utilisé pour fabriquer des objets de taille si petite, lui propose de réaliser des meubles. Ce qu'il accepte immédiatement.

 

Galerie Demisch Danant, New York.

140 000 € 

Cabinet Drapé.  - Il fait partie des premières pièces éditées par la galerie Demisch Danant et a été présenté, en 2006, par l’enseigne new-yorkaise à l’occasion d’une première exposition intitulée « New Work », en collaboration avec la galerie Lehmann Maupin. Maria Pergay aimait manier l’humour : ici, un pan s’est enroulé sur lui-même, retenu par une épingle à nourrice géante, dévoilant le bois. Ce cabinet fait paire avec un autre qui, à l’inverse, met en scène un pan en bois qui s’enroule sur lui-même et dévoile l’acier.

 

Galerie Demisch Danant, New York.

140 000 à 280 000 € 

Lit Tapis Volant.  - « J’ai fait un rêve et lorsque je me suis réveillée, je me souvenais clairement de l’objet. Quand j’ai dit à mes assistants que je voulais un tapis volant, ils ont pensé que j’étais folle. J’ai alors dessiné à la craie une ligne fluide et ondulée de trois mètres de long sur le mur », racontait Maria Pergay. Ce lit de repos a été le premier meuble fabriqué par Pergay en acier inoxydable et il est, depuis, devenu l’une de ses pièces les plus emblématiques.

 

Galerie Demisch Danant, New York.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°774 du 1 avril 2024, avec le titre suivant : Le mobilier en acier de Maria Pergay

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