Le Salon international du livre et de l’estampe a connu une fréquentation en baisse et un commerce plus ralenti.
PARIS - « C’est force 2 à 3, mer calme, petite brise, mais on avance », confiait le libraire parisien Jean-Baptiste de Proyart au terme de la dernière édition du Salon international du livre et de l’estampe, organisée du 19 au 21 juin à Paris. L’entrain fut modéré par un calendrier estival peu porteur. « Beaucoup de clients français et étrangers n’étaient pas là. Sans doute étaient-ils déjà partis en vacances », déplorait Rupert Halliwell, de la galerie londonienne Sims Reed. Le retrait de quelques grands marchands, notamment étrangers, n’est pas passé non plus inaperçu. « L’absence de Jean-Claude Vrain était vraiment regrettable, soulignait Jean-Baptiste de Proyart. Ce n’est pas parce que Vrain n’est pas là que le chiffre d’affaires des autres est supérieur. Sans lui, le salon devient trop ancien. »
Le commerce fut donc globalement lent. « Nous avons été desservis par le fait que la vente de livres de photos en avril chez Christie’s avait mal marché. Cependant la conjoncture est maintenant meilleure qu’au printemps, indiquait Denis Ozanne (Paris). Sur la Foire du livre de New York en avril, la situation était la même. Les gens ne se sont décidés qu’après coup. À l’issue du salon, j’ai cru avoir fait une très mauvaise foire, et quinze jours après, cela devenait un bon salon. » Le libraire, qui avait fait ses frais en vendant des pièces liées à la thématique du jeu, attendait un engagement ferme pour Électricité de Man Ray. Certains, comme Jörn Günther (Hambourg), se déclaraient plus satisfaits de leurs achats que de leurs ventes. En revanche, Héribert Tenschert (Ramsen, Suisse), Les Argonautes (Paris) ou Michel Bouvier (Paris) ont très bien vendu, tout comme le stand de livres à petits prix destiné à former de nouveaux collectionneurs. Pour Frédéric Castaing (Paris), président du Syndicat de la librairie ancienne et moderne, « quel que soit le résultat, on tient le bon bout, on a droit de cité au Grand Palais et l’on ne peut pas revenir en arrière. »
Parmi les pièces les plus remarquables du Salon du livre et de l’estampe, figure le lot de lettres et manuscrits autographes de Jean Genet présenté par le libraire Michel Bouvier. Outre l’édition originale du Condamné à mort, rédigé en 1942 par l’écrivain lors de son incarcération à Fresnes, l’ensemble comportait une correspondance rappelant la mobilisation des intellectuels pour tenter de le faire sortir de prison. À cela s’ajoutait un manuscrit inédit, La Fête, et surtout un autre de 1974 intitulé Un héros littéraire : le défunt volubile. Satire de la bourgeoisie dans la pure veine genetienne, ce texte n’y va pas avec le dos de la cuillère : « On a plus rarement montré à quel point le bourgeois est obligé d’employer les fards, les cosmétiques, les badigeons, les ripolins, les corsets, les armatures, la syntaxe féroce, le langage prudent. Redondance au service de rien… Le temps n’est pas révolu où les pauvres croient que d’une bouche à belles dents, que de lèvres pincées, d’un col amidonné, que de phrases creuses volées au hasard des lectures de gare ne puisse sortir le poison qui les berce d’abord, les endort et les paralyse. » Proposé pour 57 500 euros, cet ensemble exceptionnel n’a pas trouvé preneur. On peut d’autant plus s’en étonner que le prix semblait dérisoire au regard des 35 000 euros exigés par la librairie Bernard Le Borgne (Paris) pour les sabots de Jean-Jacques Rousseau…
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Le livre à l’honneur
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°307 du 10 juillet 2009, avec le titre suivant : Le livre à l’honneur