Sur les places de New York, Hong Kong, et surtout Genève, la joaillerie a progressé depuis 2003 de façon spectaculaire dans le sillage de l’art contemporain.
GENÈVE - Tandis que les indices économiques et boursiers s’effondrent, que le chômage augmente, le marché du luxe ne s’est jamais aussi bien porté. La revue hebdomadaire américaine Time Magazine a consacré un numéro spécial à ce sujet, ce qui est assez révélateur. Le marché de l’art reflète parfaitement cette tendance. Côté ventes aux enchères, celles qui intéressent les amateurs de luxe affichent des résultats spectaculaires. Le trio art contemporain/décoration européenne/bijoux mène la danse, à croire que de Hong Kong à New York, en passant par Moscou, on ne peut plus porter que des vêtements griffés, des bijoux de valeur et s’asseoir dans des fauteuils Louis XVI pour contempler les œuvres des artistes contemporains.
Dans l’ensemble, le marché de l’art se porte plutôt bien : en 2004, Christie’s a enregistré une hausse de 18 % par rapport à 2003. On se trouve actuellement dans une nouvelle phase de croissance et, une fois de plus, on constate que le marché de l’art répond à des dynamiques différentes de celles qui règlent l’économie en général.
La progression du marché des bijoux est encore plus spectaculaire, puisque pour la même période, la croissance a atteint 45 %. Christie’s est passé de 151 à 218 millions de dollars et Sotheby’s de 113 à 155, pour un total de 373 millions (286,5 millions d’euros) : nous sommes encore loin des 521 millions de 1995, mais c’est déjà bien mieux que les 237 de 2001. On pourrait disserter longuement sur la chute du dollar, mais c’est l’unique monnaie de référence pour le marché des bijoux. Il est donc absolument inutile de convertir en euros, comme certains voudraient nous pousser à le faire pour l’art contemporain.
Traitement chimique
Autre signe de forte croissance : en 2004, Christie’s a vendu 27 bijoux à plus d’un million de dollars, contre 11 en 2003 et 9 en 2002. Ces chiffres sont d’autant plus remarquables que 2004 n’a pas été une année particulièrement riche en grandes ventes de collections privées. Certes, les catalogues de Doris Duke et Maria Callas ont attiré de nombreux curieux et acheteurs, mais ils n’affectent qu’une petite partie des résultats globaux et n’ont pas contribué à gonfler artificiellement les résultats.
Les enchères se répartissent toujours plus équitablement entre les trois continents : à New York, Genève et Hong Kong, Christie’s a vendu respectivement pour 53, 73 et 48 millions de dollars, contre 47, 46 et 36 pour Sotheby’s. La grande différence tient à ce que les ventes américaines et asiatiques sont alimentées par leurs marchés respectifs et que la grande majorité des acquéreurs appartient à une même zone géographique, tandis qu’à Genève les acheteurs et les vendeurs viennent du monde entier.
Depuis quelques années, le diamant fait une remontée en force, avec des évaluations comprises entre 60 000 et 80 000 dollars le carat (on est donc maintenant à mi-chemin entre les 100 000 dollars du début des années 1990 et les 45 000 de la fin de cette même décennie). Les pierres précieuses colorées ont plus de mal à s’imposer : les traitements chimiques, parfois difficiles à déceler, suscitent la méfiance des acquéreurs, à la différence des pierres anciennes, qui enregistrent d’excellents résultats.
Autre facteur important qui confirme notre constatation initiale : l’intérêt croissant des amateurs d’art contemporain pour les bijoux, surtout de facture contemporaine, comme Jar. En effet, c’est un collectionneur d’art contemporain qui, en novembre dernier à Genève, a acquis une broche Jar au prix de 527 200 francs suisses (342 000 euros). En outre, la vente de bijoux organisée par Sotheby’s à Paris le 14 décembre 2004 a suscité un intérêt assez inhabituel. Un collectionneur proposait plus de 210 pièces de Line Vautrin, créatrice atypique de la seconde moitié du XXe siècle, héritière des surréalistes, dont les miroirs et les bijoux suscitent actuellement un enthousiasme parfois excessif... La vente s’est très bien passée (95 % des pièces vendues) : tous les bijoux en bronze doré ont été acquis à des prix bien supérieurs aux estimations, pour la plupart par des collectionneurs d’art contemporain.
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Le carat reste une valeur sûre
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°208 du 4 février 2005, avec le titre suivant : Le carat reste une valeur sûre