Le Bestiaire d’Apollinaire

Cette reliure mosaïquée est l’œuvre de Pierre-Lucien Martin, relieur très réputé du milieu du XXe siècle. « On reconnaît que c’est une reliure de Martin au premier coup d’œil : le jeu de contraste des pièces de cuir, l’imbrication d’un motif concret (les lettres du titre) dans un motif abstrait, presque aléatoire », commente l’expert de la vente, Frédéric Harnisch.

Cet exemplaire provient de la bibliothèque de Maurice Houdayer, qui a rassemblé le meilleur du livre illustré et de la reliure de création. Mécène des relieurs d’art, ce grand collectionneur a contribué au soutien des créateurs ces trente dernières années. Passionné par l’Art déco, qui constitue le fil rouge de sa collection, il n’en a pas moins fait place à des inspirations plus contemporaines. Son goût sûr l’a guidé vers des exemplaires appartenant aux collections les plus exigeantes.

C’est le premier recueil de poèmes publié par Apollinaire. Il en comporte trente dont chacun, à la manière des Fables de La Fontaine, brosse le portrait plein d’esprit d’un animal. Apollinaire avait dans un premier temps sollicité Picasso, qui ne s’était pas mis au travail. Lassé d’attendre, il s’est finalement adressé au jeune Dufy, dont c’est le premier livre illustré.

Cette estimation s’explique non seulement par le fait qu’il s’agit d’une édition originale, mais aussi parce que ce recueil de poèmes n’a été tiré qu’à 122 exemplaires – ici le n° 6 –, tous numérotés et signés par le poète et l’artiste. Par ailleurs, l’exemplaire ci-dessus fait partie du tirage de tête sur un précieux papier recherché des bibliophiles : le papier japon.