Dans un article récent intitulé « Les musées sollicitent les largesses des marchands », le New York Times s’inquiétait de la participation croissante des galeries au budget des expositions. Le quotidien citait ainsi l’exemple de la galerie Blum & Poe (Los Angeles), laquelle a tiré une épine du pied du Musée d’art contemporain (MOCA) de la ville en affrétant un avion de Japan Airlines pour le transport d’une pièce de Murakami du Japon à Los Angeles tout en apportant une contribution financière à six chiffres à l’exposition de l’artiste. Les marchands new-yorkais Larry Gagosian et Barbara Gladstone ont de leur côté mis la main au portefeuille pour l’exposition de Richard Prince au Guggenheim Museum de New York. Certains professionnels américains s’émeuvent du recours aux galeries pour boucler des budgets d’exposition. Le code éthique de l’American Association of Museums reste, lui, très vague sur ce sujet. Tout juste précise-t-il qu’un « musée doit développer une politique stipulant quel type de soutien il accepte de la part des donateurs individuels pour déterminer s’il peut accepter un don, sur le plan de sa mission, en termes opérationnel, commercial ou légal. »
Le soutien des galeries
Ce type de partenariat ne s’est pas encore généralisé en France. « L’exposition “pure”, sans contraintes, n’existe pas. Sans l’apport des galeries, certaines expositions ou œuvres n’auraient pas pu se faire », remarque toutefois un observateur avisé. Le Centre Pompidou a coproduit en 1999 The Third Memory de Pierre Huyghe avec la Renaissance Society de l’Université de Chicago, mais grâce aussi au support financier de la galerie Marian Goodman (New York, Paris). Le soutien des galeries se révèle utile pour certaines expositions en centre d’art. La contribution d’Emmanuel Perrotin a été nécessaire à l’exposition de Paola Pivi à la Criée à Rennes. De son côté, le Centre Pompidou a dû compter sur la galerie Continua (San Gimignano, Pékin) pour produire la pièce de Kendell Geers présentée dans l’exposition « Dionysiac » en 2005. Lorsque M/M s’est rajouté au projet de Dominique Gonzalez-Foerster dans « Airs de Paris », Haunch of Venison (Londres) et Esther Schipper (Berlin) ont sorti une rallonge. « En dernier recours, on se tourne vers une galerie, mais il ne faut pas que ce soit un système, précise Christine Macel, conservatrice au Centre Pompidou. Il vaut mieux être le producteur au sens artistique et financier et entretenir un dialogue à deux avec l’artiste et non à trois avec la galerie. Quand on engage une somme, on peut discuter de la pertinence d’un projet. Déléguer un processus de production à des partenaires commerciaux influe sur les pièces qui doivent être d’autant plus commercialisables. » Fabrice Hergott, directeur du Musée d’art moderne de la Ville de Paris répugne, quant à lui, aux coproductions avec les galeries. « Soit c’est le musée qui produit, soit c’est la galerie, pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté », indique-t-il. Le recours aux galeries ne risque-t-il pas de se généraliser un jour ou l’autre, alors que les budgets des expositions explosent et qu’inversement les crédits des musées sont en berne ? « Sincèrement, je ne le pense pas, affirme Alfred Pacquement, directeur du Musée national d’art moderne à Paris. Il serait dangereux qu’une programmation dépende du financement que pourrait apporter une galerie. À nous d’être vigilants. »
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L’artiste, le musée et... la galerie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°270 du 30 novembre 2007, avec le titre suivant : L’artiste, le musée et... la galerie