À New York, les marchands d’art contemporain sont de plus en plus nombreux à quitter SoHo, ses loyers prohibitifs et ses rues encombrées, pour la quiétude de Chelsea... et ses loyers plus abordables.
NEW YORK (de notre correspondant) - Ouvert au public depuis 1987, le Dia Center for the Arts et son programme d’expositions de grande qualité a largement contribué à attirer les galeristes à Chelsea, entre la 14e et la 34e rue du West Side de Manhattan. D’autant que ce quartier aux constructions basses, où voisinent entrepôts, garages et usines, possède un charme "post-industriel" qui n’est pas sans rappeler SoHo avant son embourgeoisement… et ses loyers exorbitants. Aussi, nombre de marchands considèrent-ils l’endroit comme une nouvelle Mecque de l’art contemporain et vantent ses vastes espaces d’exposition éclairés en lumière naturelle.
Après avoir ouvert une première galerie à Chelsea en 1985, Larry Gagosian s’est établi en 1988 dans les luxueux locaux qu’il occupe actuellement, autrefois siège de Sotheby’s. À sa suite, et plus particulièrement ces deux dernières années, nombreux sont les marchands qui ont colonisé le voisinage du Dia Center, dont les rues comptent aujourd’hui autant de galeries que certaines artères de SoHo. Et pour cause, les transferts se multiplient.
Le mouvement s’est accéléré en 1994, avec l’arrivée de Matthew Marks, et plus encore en 1995, quand Pat Hearn, Paul Morris & Tom Healy et Annina Nosei sont venus grossir les rangs des "transfuges". Dernières en date, Linda Kirkland (22 Art on the Edge) et la toute jeune Jessica Fredericks, qui redoutait de voir ses débuts à SoHo passer inaperçus. Jusqu’à Paula Cooper – elle avait ouvert la première galerie de SoHo en 1968... – qui donne aujourd’hui ses lettres de noblesse à Chelsea en achetant sur la 21e rue un immeuble qu’elle compte occuper à partir du mois d’octobre. "La situation s’est dégradée à SoHo, fait-elle remarquer. Nous allons cesser de nous occuper de notre image pour recommencer à nous occuper d’art". D’autres galeristes implantés à SoHo de longue date envisagent également de partir : "Cela semble inévitable", lâche Max Protetch, établi à SoHo depuis vingt-six ans, avant d’ajouter qu’il envisage d’acheter à Chelsea, même si "les prix y sont déjà supérieurs à ceux du marché".
Samedi à SoHo et dimanche à Chelsea
Le bruit court même que Barbara Gladstone et Matthew Marks seraient en train d’acheter ensemble un immeuble sur la 24e rue, une opération à laquelle pourrait également se joindre Metro Pictures. Barbara Gladstone s’est refusée à tout commentaire, mais Matthew Marks a déclaré que sa galerie de Chelsea "rencontrait un tel succès" qu’il avait "songé à un certain nombre d’espaces supplémentaires aux alentours". Et de son côté, Ginelle Rearing, de Metro Pictures, installée à SoHo depuis treize ans, a reconnu qu’elle était "heureuse à l’idée de déménager dans un quartier en plein essor"...
Même si le prix du mètre carré commence à grimper à Chelsea, les loyers des galeries restent encore raisonnables comparés à ceux de SoHo et de l’Upper East Side. À SoHo, les loyers s’échelonnent de 35 à 100 dollars le m2 pour un rez-de-chaussée, et de 25 à 45 dollars pour les étages supérieurs, alors qu’à Chelsea, un rez-de-chaussée ne coûte qu’entre 10 et 15 dollars. Par exemple, Pat Hearn dit payer environ 12 dollars le m2 pour sa nouvelle galerie de 2 500 m2, soit environ trois fois moins que son loyer de SoHo.
Le quartier draine désormais beaucoup de monde le week-end, et plutôt que d’essayer d’entrer en compétition avec SoHo, les galeries de Chelsea ont choisi de rester ouvertes le dimanche, dans l’espoir que les aficionados (gallery goers) réserverons leur samedi à SoHo... et feront du dimanche le jour de Chelsea.
Paula Cooper, W. 21e rue (entre 10e et 11e avenues), tél. 212-674 0766
Jessica Fredericks Gallery, 504 W. 22e rue, tél. 212-633 6555
Pat Hearn, 530 W. 22e rue, tél. 212-727 7366
Matthew Marks, 522 W. 22e rue, tél. 212-243 1650
Morris-Healy Gallery, 530 W. 22e rue, tél. 212-243 3753
22 Art on the Edge, 504 W. 22e rue, tél. 212-807 7470
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L’appel de Chelsea
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°25 du 1 mai 1996, avec le titre suivant : L’appel de Chelsea