Les mascottes de bouchons de radiateurs font leur apparition au début du siècle dernier. Ces statuettes, le plus souvent en bronze, sont en quelque sorte les figures de proue de la conquête automobile. Les pionniers intrépides qui se lancent sur les routes au volant de leurs machines aiment avoir sous les yeux, au bout de leur capot, ces fétiches porte-bonheur. Un des premiers modèles connus est un saint Christophe, patron des voyageurs, qui veille sur la bonne conduite des chauffeurs.
Selon Michel Legrand, auteur du livre de référence Mascottes Passion (1), c’est en 1907 que le constructeur Austin veut affirmer la personnalité de sa marque en plaçant sur le bouchon de radiateur une roue surmontée d’un volant entouré de deux ailes déployées.
Henry Royce, l’associé de Rolls, demande au sculpteur Charles Sykes de lui proposer un modèle original. Lord Montagu of Beaulieu, qui a vent de ce projet, suggère que sa ravissante secrétaire, Eleanor Thornton, prenne la pose sous des voiles ostentatoires, les bras tendus en arrière. C’est ainsi qu’est née, en février 1911, la plus célèbre mascotte du monde baptisée « Spirit of Ecstasy » (l’esprit de l’extase), réalisée en métal argenté. Il existe un autre modèle où la flying lady est à mi-agenouillée, avec des bras ailés.
De 1920 à 1935, la plupart des grandes marques automobiles adoptent différents symboles : Minerva, une tête de Minerve, Chenard & Walcker, un aigle prenant son envol, Brasier, une victoire de Samothrace. Citroën arbore un disque à deux chevrons et Voisin une cocotte stylisée aux ailes verticales. Une des plus belles mascottes est la cigogne d’Hispano-Suiza, inspirée par l’escadrille des cigognes où s’est illustré l’aviateur Guynemer. Citons encore l’éléphant debout sur ses pattes arrière qui accompagne la Bugatti-Royale, lancée en 1926, et le Pégase créé par le sculpteur Darel pour Amilcar. Chez Peugeot, le lion adopté comme symbole de la marque, en 1913, connaît de nombreuses variantes de mascottes, selon les modèles de voiture.
Quant à la fantaisie des motifs commandés par les particuliers, elle est illimitée. On dénombre plus de 5 000 modèles à découvrir au salon Rétromobile (2). On trouvera par exemple des Gaulois, des danseuses, des têtes de chevaux, des dauphins, des Joconde, des Bécassines et autres sujets. C’est surtout la qualité de la sculpture, parfois signée, qui fait la valeur du modèle. Ces divers sujets en bronze doré ou argenté, chromés ou nickelés, valent de 200 à 600 euros. D’autre part, une tête d’aigle en verre moulé signée René Lalique, en 1928, a été adjugée 2 100 euros par Hervé Poulain, au Palais des Congrès, à Paris, le 15 juin 2003. Les pièces les plus rares peuvent dépasser 5 000 euros. Attention, les mascottes « bidouillées » par un remontage sur un vieux bouchon de radiateur valent de 30 à 50 % de moins que les authentiques modèles originaux.
L’âge d’or des mascottes se termine, à partir de 1935, lorsque les radiateurs passent sous le capot au nom de l’aérodynamisme.
(1) 1999, Antic Show Éditions, Issy-les-Moulineaux, , 225 p., 100 euros, www.anticshow.com
(2) Salon Rétromobile, du 13 au 22 février à la porte de Versailles, 75015 Paris.
Me Hervé Poulain, Artcurial, tél. 01 42 99 20 20 ; Me Jean-Pierre Osenat, Fontainebleau, tél. 01 64 22 27 62 ; marché des Malassis, « Collections », stand 77-78.
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L’âge d’or des mascottes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°186 du 6 février 2004, avec le titre suivant : L’âge d’or des mascottes