La vente Karl Lagerfeld affiche un produit vendu impressionnant de 7 millions d’euros et, dans l’ensemble, de bons résultats, pour les pièces les plus attendues. Pulvérisant souvent des estimations très basses, elles atteignirent sans peine leur vrai prix. Le reste de la collection fut inégalement accueilli, avec quelques enchères téléphoniques spectaculaires, mais aussi, souvent, une salle indifférente.
Au regard des précautions prises, la vente ne pouvait apparaître que comme un succès. Estimations très basses, pour une collection principalement constituée de pièces acquises auprès de trois des plus grands marchands parisiens, Bob et Cheska Vallois, Anne-Sophie Duval et Jacques De Vos. Provenances excellentes garanties par les marchands. Au-delà du prestige à en retirer pour Sotheby’s, la vente inaugurait la série des ventes printanières d’Art déco, en fixant les regards sur le marché parisien. Elle éprouverait la cote de créateurs, représentés dans la collection par des œuvres fraîchement vendues et bien connues. Une inquiétude fédératrice impliquait donc marchands et spécialistes aux côtés de Sotheby’s, dans la réussite de l’événement. La plupart des grands marchands et décorateurs assistaient à la vente, opportunité, pour certains, de défendre les travaux qui avaient, quelques années auparavant, emporté leur conviction. Le déroulement de la vente ne fut pas pour autant laissé au hasard. Galerie Charpentier, une armée de téléphones, quelques-uns actifs, compensa, en définitive, l’intérêt inégal d’une salle plutôt tiède.
L’une des plus belles œuvres rassemblées par Lagerfeld, une console d’Eileen Gray aux lignes sobres, au piètement laqué et au plateau de chêne cérusé atteignait sans surprise, assez rapidement,
le double de son estimation, et retournait à 290 000 euros à la marchande Cheska Vallois.
Deux tables diabolo de Jean-Michel Frank, provenant de la galerie De Vos partaient à 355 000 euros au même acquéreur. De Marcel Coard, trois productions d’inspiration africanistes confirmaient la bonne cote, une rare table de milieu ronde, taillée à l’herminette, atteignant 195 000 euros. Une table et une paire de bancs d’une provenance intéressante, la collection Paul Cocteau, étaient adjugées séparément 110 000 et 50 000 euros. De Pierre Legrain, une célèbre coiffeuse, pièce clé de la vente, était adjugée 190 000 euros au téléphone contre Jacques De Vos. Un très beau portefeuille d’architecte du même créateur, dont la rareté, la beauté et la curiosité auraient pu séduire un musée n’atteignit que 60 000 euros.
Beaux succès des créations de Giacometti pour Jean-Michel Frank – lampes, vases en plâtre patiné – disputées par des décorateurs. Succès également pour Frank avec une cheminée en plâtre à façade bombée, adjugée 100 000 euros, une paire de fauteuils club à 210 000 euros, un rare pied de lampe en cristal de roche. Mais piètres enchères pour plus d’une quinzaine de lots, une table « ananas » qui ne convainquit pas et cinq invendus. Succès d’un canapé de Jourdain, défendu par Denis Doria, adjugé 140 000 euros, succès relatif d’un très beau tabouret de Groult en bois argenté à 45 000 euros. Plébiscite téléphonique des créations de Dagobert Peche. Mais pour une suite de fauteuils et une table d’Elisabeth Eyre de Lanux, créatrice américaine à la production rare et peu connue, les enchères, même téléphoniques, peinaient à monter. Accueil tiède de Dupré-Lafon dont trois tables gigognes furent ravalées, accueil très inégal de Sornay, Desny. Disséminés au long de la vente, associés à des noms variés, les résultats médiocres sont les indicateurs discrets de la sélection opérée par les acheteurs dans une collection inégale.
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La vente Lagerfeld conforte la cote des grands créateurs de l’Art déco
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°548 du 1 juin 2003, avec le titre suivant : La vente Lagerfeld conforte la cote des grands créateurs de l’Art déco