Après deux années de reprise, les six premiers mois ont été marqués, à Drouot, par une stagnation. Sotheby’s a connu en revanche une progression de 7 % de son chiffre d’affaires, qui n’a pas empêché une baisse de 3 % de ses profits, obérés par des remboursements d’emprunts et les investissements liés à la création de son site Internet, Sotheby’s.com.
PARIS - La reprise du marché de l’art amorcée en 1997, qui s’est poursuivie en 1998, a marqué le pas à Paris au cours du premier semestre. Le produit “Art” vendu s’est élevé à 1,6 milliard de francs, un chiffre presque identique à celui de 1998 ( 1 % entre 1997 à 1998), semestre qui avait lui connu une progression de 10 % par rapport à 1997. Le produit vendu global, toutes spécialités confondues, s’est stabilisé à 2 milliards de francs. Les bons résultats du mois de juin – le produit vendu cumulé de Drouot Richelieu et Drouot Montaigne a progressé de 22 % – n’ont pas suffi à compenser un début d’année morose. Le nombre d’enchères millionnaires est en baisse : 62, contre 80 en 1998. Cette stagnation du marché parisien, qui survient pourtant dans un contexte d’embellie économique, s’expliquerait en partie par la raréfaction des œuvres d’art de grande qualité et notamment des chefs-d’œuvre. Aucune grande collection, comme celle de Jacqueline Delubac vendue en mars 1998, n’a été dispersée ce semestre à Paris. Il est par ailleurs regrettable qu’aucun commissaire-priseur n’ait réussi à retenir à Paris les deux grandes collections françaises de livres et de photographies (Renaud Gillet, Marie-Thérèse et André Jammes) qui seront dispersées à Londres en octobre. Cette relative pénurie pourrait expliquer que les “Temps forts”, qui réunissent d’ordinaire pendant une semaine à Drouot Montaigne les plus belles œuvres du printemps et du début de l’été, ensuite mises en vente, n’aient pas été organisés cette année. “Les œuvres d’art exceptionnelles, qui contribuent au succès des ventes, nous ont manqué ce semestre”, confirme le commissaire-priseur Éric Buffetaud. Me Joël-Marie Millon, président de la Compagnie des commissaires-priseurs de Paris, voit plutôt dans cette “stabilité” des résultats une “consolidation” d’un marché qui avait progressé les deux années précédentes. Il souligne néanmoins que Paris a été handicapé par “les retards successifs pris par la réforme des ventes publiques. Le flou dans lequel nous laissent les pouvoirs publics a empêché les stratégies de groupe de se former. Nous avons été privés des règles du jeu juridiques, administratives et financières qui nous auraient permis de nous préparer”.
Plusieurs spécialités – les tableaux anciens, la bibliophilie, l’Art déco et l’art primitif – ont cependant enregistré des prix importants au cours du semestre. La plus haute adjudication est allée à une huile de Gerrit Berckeyde (1638-1698), Vue de l’église Saint-Bavon de Haarlem, partie à 26 millions de francs le 16 juin, battant ainsi un record mondial. Le 11 juin, une Crucifixion italienne du XIVe siècle a été préemptée par le Musée du Louvre à 12,9 millions de francs. Du côté des livres et manuscrits, une précieuse édition Princeps de la Divine Comédie de Dante, datant du 11 avril 1472, s’est vendue 5,6 millions de francs, dix fois son estimation, le 15 juin. Il s’agit d’un record mondial et de la plus haute enchère obtenue en France pour un livre imprimé. Le premier semestre 1999 a aussi été celui du mobilier Art déco, dont les prix ont flambé : ainsi, le “lampadaire aux oiseaux” d’Armand Albert Rateau a été adjugé 3,8 millions de francs, le 19 mai à l’Espace Tajan. Lors des ventes d’art primitif dirigées par l’étude Ricqlès, les 7 et 8 juin, une plaque en bronze du Bénin, datant de la fin du XVIe siècle ou du début du XVIIe siècle, s’est envolée à 2,9 millions de francs.
Chiffre d’affaires en hausse, profits en baisse pour Sotheby’s
Les résultats publiés par Sotheby’s – ceux de Christie’s n’avaient pas été rendus publics au moment du bouclage de cette édition – montrent une progression de son chiffre d’affaires de 7 %, qui a dépassé ce semestre le milliard de dollars (967 millions de dollars en 1998). Ces bons résultats s’expliquent par l’importance des collections dispersées : John Hay Whitney, Guiseppe Rossi, Meyer de Rothschild. Le résultat consolidé du groupe – incluant, outre le produit des ventes publiques, celui des activités immobilières et de courtage – tout comme les profits (- 3 % par rapport à l’an passé) est cependant en baisse. Il a été obéré par des remboursements d’emprunts et ses investissements dans la création du site Sotheby’s.com.
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La reprise oublie Paris
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°87 du 27 août 1999, avec le titre suivant : La reprise oublie Paris