Nos vieilles réclames, sous la forme de plaques émaillées et de tôles lithographiées, sont très collectionnées. Mais leur état de conservation est primordial.
« L' idéal n’est-il pas d’établir un affichage longue durée sans aucun entretien et résistant parfaitement au soleil et aux intempéries ? », ainsi était rédigée une plaquette publicitaire de l’E.A.S. (Émaillerie alsacienne de Strasbourg) il y a près d’un siècle. Aujourd’hui, ces enseignes simples (fixées sur un mur) ou doubles (suspendues à une potence), diffusées sur tout le territoire français, sont devenues des objets de collection. Plus fragiles mais moins coûteuses à fabriquer, les tôles lithographiées étaient fixées à l’intérieur des établissements.
Les particuliers ont commencé à collectionner plaques et tôles dans les années 1980. Il y a quinze ans, certains ont vite été découragés par la flambée des prix. À présent, le marché stagne un peu. La gamme de prix pour une plaque va de 50 euros pour un modèle courant peu décoratif, jusqu’à 35 000 euros pour quelques raretés de grand format. Il faut compter de 30 à 13 000 euros pour les tôles lithographiées. Les plaques ont vu leur cote revue à la baisse, surtout en raison de leur état de conservation. Les restaurations, admises encore il y a une dizaine d’années sur certaines plaques endommagées, ne sont plus tolérées. Les collectionneurs préfèrent les plaques dans leur jus, même si elles ont un peu vécu.
Qu’est-ce qui fait la valeur d’une plaque ? Un ensemble de critères tels que la notoriété du produit vanté, alliée au traitement décoratif du sujet. Mais aussi son état de conservation, son format, son ancienneté, son inscription dans son époque et, le cas échéant, le nom de l’illustrateur (Cassandre, Benjamin Rabier, Jean d’Ylen, Charles Loupot…). La rareté du sujet est un plus quand on a franchi les étapes précédentes, mais elle a moins d’intérêt si par exemple l’image est peu attrayante et le produit inconnu. Enfin, signalons que les plaques les plus cotées sont aussi celles illustrant des images pouvant s’intégrer dans différents types de collection, comme celles où l’on voit des enfants.
Les plaques publicitaires étrangères sont généralement collectionnées dans les pays dans lesquels elles ont été produites, les françaises, les anglaises et les suisses étant les plus recherchées.
Les ventes aux enchères constituent la partie visible de ce marché alimenté beaucoup par les foires, salons, brocantes, vide-greniers et déballages, ainsi que par les ventes et échanges sur Internet. Mais attention aux arnaques.
Jean-Paul Lacombe, grand chef au Léon de Lyon, a pendant longtemps collectionné tout objet ayant trait au cuisinier ou au marmiton, sur tout support, soit environ 1 000 objets. Sa collection, dont il se sépare à présent, comprend des plaques émaillées publicitaires. Les plus rares et anciennes sont celles sur le bouillon Kub, produit de grande consommation pour plusieurs milliers d’euros. Pour cette marque très consommée, la plaque la plus commune est celle représentant le cube de bouillon en 3D, rouge et jaune. Réalisée dans les années 1910-1930, cette plaque commune vaut environ 300 euros en bon état, dans un format de 20 x 20 à 25 x 50 cm. Sont présentées ici deux plaques peu courantes, estimées à 8 000 euros, figurant le petit personnage sympathique du marmiton, dans des dimensions exceptionnelles, avec le pedigree d’une toque étoilée en sus. Ces plaques sont si rares qu’on leur pardonnera de légers repeints.
Bouillon Kub, deux plaques émaillées rectangulaires représentant un marmiton recommandant le bouillon Kub pour la cuisine, dans deux versions différentes, 1910. Dimensions : 150 x 45 cm. Petits repeints d’usage. Collection Jean-Paul Lacombe.
Estimées 8 000 euros chacune, vente en octobre 2010, maison de ventes Auction Art, Paris.
Un cas d’école
Cette plaque très connue a été produite à un grand nombre d’exemplaires. En parfait état, elle se négocie aujourd’hui de 2 500 à 3 000 euros. Si elle se présente en état moyen (avec des accidents), son prix est divisé par deux. Et en cas de restaurations (soit des repeints), comme c’est le cas pour celle-ci, il ne faut pas en attendre plus de 600 euros. Produit d’avant-guerre, ce chocolat en poudre a été relancé dans les années 1950. Une plaque a alors été rééditée, dans une version stylisée.
D’ordinaire, les plaques tardives sont moins recherchées et valent moins cher. Mais dans ce cas de figure, la campagne d’accrochage des plaques des années 1950 ayant été brève, il existe une quantité d’exemplaires neufs d’époque (puisque jamais posés) que les amateurs s’arrachent jusqu’à 4 000 euros.
Chocolat Delespaul-Havez, anonyme, plaque émaillée rectangulaire plate à bords rabattus, figurant des enfants autour d’une table, à fond jaune bordée de blanc, France, années 1930. Mention E.A.S. Dimensions : 38 x 57 cm. Petits repeints d’usage dans le fond jaune et le coin inférieur droit.
Collection particulière, Paris.
Le style Art déco
Cette enseigne Casino est tirée d’une affiche de Cassandre datant de 1931, titrée « Casino » sur laquelle apparaît un personnage marchant stylisé dont les bras se prolongent à droite par une mappemonde et à gauche par la balance, illustrant le sous-titre de l’affiche : « Je suis partout…
je vends de tout. » Cette plaque au dessin stylisé s’inscrit bien dans le graphisme
de son époque, l’Art déco.
Produits Casino, d’après Cassandre, plaque émaillée découpée, vers
1931-1932, sans référence de fabricant, 75 x 69 cm, bon état général (petits manques en bordure et aux points
de fixation).
Adjugée 744 euros, vente le 22 mars 2010, maison de ventes Camard, Paris.
Bières et boissons
Cette rare publicité nationale en tôle lithographiée, relativement bien conservée, met en scène un Gaulois ressemblant à Vercingétorix, vantant les mérites d’une bière issue d’une brasserie régionale. Elle est tirée d’une affiche de l’illustrateur Firmin Bouisset. L’idée était d’inventer une histoire pour un produit qui
n’en avait pas, en l’assimilant à l’antique cervoise.
D’où le traitement du dessin très traditionnel qui ne s’inscrit pas du tout dans la stylisation de l’époque, des années Art déco. L’Est de la France, grand producteur de bières, a donné lieu à une multitude de publicités qui sont très recherchées. Les plus belles réclames sur la bière remontent à cette période de l’entre-deux-guerres.
Bière La Maxéville, illustration d’après Firmin Bouisset, tôle lithographiée gaufrée ovale illustrée du personnage
de Gaulois qui porte une chope de bière, vers 1925. Mention « Importée de Belgique ». Dimensions : 68 x 48 cm.
Adjugée 2 600 euros, le 10 avril 2010, maison de ventes
Robert & Baille, Paris.
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°624 du 1 mai 2010, avec le titre suivant : La pub d’antan fortement réclamée