Ventes aux enchères

La fureur des artistes brésiliens

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 1 juin 2004 - 540 mots

Critiques, commissaires d’exposition et galeristes prennent souvent leurs bâtons de pèlerin ou de sourcier pour découvrir de nouvelles terra incognita. 

Après les vogues japonaise et chinoise, voici la déferlante brésilienne. Une lame de fond plus sourde, qui ne cède pas au marketing ou au gadget. Exception faite de Vik Muniz qui a émigré aux États-Unis, ces artistes résident en majorité à Rio de Janeiro.

Remarqué en France depuis son exposition à la Biennale de Lyon en 2000 et au Jeu de Paume l’année suivante, Tunga incarne un mythe vivant dans son pays. Ses prix restent toutefois mesurés, entre 25 000 et 100 000 euros en galerie. Le galeriste Daniel Templon, qui le présente à Paris depuis quatre ans, a vendu une des tresses métalliques au Fonds national d’art contemporain. En cédant au décoratif, ses créations récentes ont perdu l’authenticité très brute du travail antérieur.

De fait le mythe s’est effrité au profit d’un autre artiste de la même génération, Cildo Mereiles. Ne s’attelant qu’à de très grandes installations, ses prix, de l’ordre de 150 000 euros, sont sensiblement plus élevés que ceux de Tunga.

Ernesto Neto est une des stars actuelles du premier marché. Son œuvre à l’avant-dernière Biennale de Venise a été emportée par le grand collectionneur américain Martin Margulies. Les amis du Musée national d’art moderne ne s’y sont pas trompés en offrant une belle installation embaumant d’épices à Beaubourg. Neto figure aussi dans la collection de Jean-Marc Salomon. Les prix de ses installations restent encore abordables entre 50 000 et 70 000 dollars. En raison de leur format, peu d’œuvres ont investi les ventes publiques. On relève toutefois l’enchère de 45 000 dollars pour une installation de filets d’épices, It happens in the frictions of the bodies, en novembre 2001 chez Sotheby’s. Ses prix sont plus corsés dès que les installations comportent des épices ! La vente d’art latino-américain de Christie’s à Paris le 10 juin propose un Puff composé d’un filet de safran dont l’estimation est de 6 500/9 500 euros. Mais s’il excelle dans les installations, Ernesto Neto ne brille pas par ses pièces « domestiques » qui, bien souvent, restent sur la touche en vente publique.

La peintre Beatriz Milhazes, dont la présence sur le marché n’en est qu’à ses balbutiements, semble prometteuse avec des prix de 30 000/ 40 000 dollars. La galerie Nathalie Obadia, qui l’expose depuis 1998, présentait ses premiers tableaux autour de 12 000 euros. Il faut compter aujourd’hui 50 000 euros pour des formats similaires. En novembre dernier, Milhazes a triplé son estimation chez Christie’s en obtenant 62 000 dollars pour Mundo Civilizado, une très grande peinture de 1998. Vik Muniz, dont les photos se négocient entre 30 000 et 60 000 dollars, est l’un des rares photographes à ne pas avoir vu sa cote fléchir. Il a même enregistré 65 000 dollars pour Action Photo en novembre dernier chez Sotheby’s. Sa compagne Janaina Tschape, exposée par la galeriste bruxelloise Catherine Bastide, commence à être courtisée par les critiques. Célébrée par l’Association française d’action artistique en 2005, l’année du Brésil en France apportera, sinon une réévaluation financière des artistes, du moins un nouveau regard.

Vente d’art latino-américain chez Christie’s Paris, le 10 juin, tél. 01 40 76 83 58.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°559 du 1 juin 2004, avec le titre suivant : La fureur des artistes brésiliens

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