La foire de Maastricht fait de la résistance

Le marché de l’art ne s’est pas effondré malgré l’absence des grands collectionneurs américains

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 4 avril 2003 - 729 mots

La seizième foire de Maastricht, la première foire des antiquités au monde, qui s’est tenue du 14 au 23 mars, a démarré dans un climat peu propice aux ventes dû au contexte international. Les collectionneurs et musées, surtout européens, fidèles au rendez-vous de Tefaf, se sont montrés acheteurs, sauvant ainsi le niveau des transactions.

MAASTRICHT - On s’en doute : 2003 n’aura pas été la meilleure année pour la Tefaf (The European Fine Art Fair) Maastricht, la première foire des antiquités au monde. L’ambiance était un peu tendue le 13 mars, jour du vernissage : les préparatifs d’une guerre en Irak devenue inévitable étaient au centre des conversations, et la faible présence des acheteurs américains (qui ont déclaré forfait principalement par peur de prendre les transports aériens) ne laissait pas beaucoup d’espoir au commerce. “Les années fortes, il y a beaucoup de transactions avant la foire. Ce n’est pas le cas cette année”, rapporte le marchand parisien Pierre Lévy, de la galerie Pelham (Paris), faisant allusion aux achats entre professionnels, lesquels repèrent sur les stands avoisinants des pièces pour leurs clients. Les chiffres de fréquentation de la foire sont venus confirmer la tendance, avec un total de 65 000 visiteurs, soit 13 % de moins que l’année dernière – et 10 % de moins sur le premier week-end d’ordinaire crucial. Néanmoins, les organisateurs ont annoncé que “les ventes ont été bien meilleures qu’attendues, malgré un certain recul le premier week-end”.

Des ventes honorables
“Tout le monde a un peu travaillé, ce qui n’est pas si mal”, commente Flore de Brantes, jeune antiquaire parisienne qui testait son premier Maastricht. Quant à la galerie Noortman, de Maastricht, ce ne sont pas moins de quinze peintures dont elle s’est défait, parmi lesquelles une œuvre de Maurice de Vlaminck, intitulée Nature morte aux pigeons (vers 1930), La Route de Prunay à Bougival (1874) d’Alfred Sisley, La chapelle de Notre-Dame de Grâce, Honfleur (1864) de Claude Monet et Figures entre les ruines de Jan Baptist Weenix. La galerie Sanct Lucas de Vienne a vendu le plus beau des paysages lunaires de Aert van der Neer que l’on puisse trouver sur le marché. Le Hollandais Schlichte Bergen a cédé une dizaine de paysages peints par des maîtres français, italiens et allemands du XIXe siècle. Ben Janssens, de Londres, spécialiste en art d’Extrême-Orient, a placé vingt-deux objets lors de la soirée d’ouverture. L’antiquaire belge Axel Vervoordt a vendu sa pièce maîtresse le même soir : une sculpture hellénistique de marbre blanc représentant Venus pudica qui fut selon toute vraisemblance fabriquée sur l’île de Rhodes au IIIe-IIe siècle avant notre ère. Les collectionneurs européens amateurs d’arts primitifs ont effectué des achats “plaisir” sur divers stands spécialisés, à l’instar de celui du Parisien Anthony Meyer-Oceanic, qui s’est séparé d’un ensemble de huit javelots de Mélanésie et Polynésie au bénéfice d’un amateur hollandais. Des acheteurs figuraient parmi les Américains qui ont fait le voyage. Chez le Hollandais Vanderven & Vanderven, un caraphon en porcelaine décoré de quelques éléments de cuivre a rejoint les collections du Peabody Essex Museum de Salem, aux États-Unis. Charles Ede, de Londres, a vendu à un autre musée américain le buste d’un jeune romain datant d’environ 134 après J.-C. Un collectionneur américain a acheté, aux Royal-Athena Galleries, un marbre romain, de taille quasi humaine, torse de Dionysos datant du Ier-IIe siècle.
L’art moderne a sans doute un peu plus souffert de la défection des acheteurs américains, mais certains ont cependant tiré leur épingle du jeu à l’exemple de Leslie Waddington qui annonçait 800 000 dollars de transactions au terme du premier jour. Notamment, un grand cœur rose décoré de papillons de Damien Hirst, ainsi qu’un petit bronze, Mère et enfant d’Henry Moore, s’en sont allés chez un collectionneur privé américain. Le Baiser d’Auguste Rodin, chez le Londonien Robert Bowman, a trouvé sa place chez un collectionneur européen pour 380 000 euros. Richard Nagy, de la Dover Street Gallery de Londres, a vendu trois œuvres d’Egon Schiele, tandis qu’à la galerie Thomas de Munich différentes aquarelles d’Émil Nolde, d’une valeur de 500 000 euros, sont parties chez un particulier européen. Un collectionneur suisse s’est laissé séduire par une gouache de Picasso de 1970, intitulée Le Peintre et son Modèle chez Salis & Vertes de Salzbourg. Il a aussi acquis Abstrakter Kopf : Sommerlich, de Jawlensky. Malgré des signes de faiblesse, le marché de l’art tient bon.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°168 du 4 avril 2003, avec le titre suivant : La foire de Maastricht fait de la résistance

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