Certains photographes plasticiens maintiennent le cap malgré la crise, en raison d’une baisse enregistrée avant 2009, mais accusent de plus grands taux d’invendus.
La crise nous l’a montré, certaines valeurs de l’art contemporain ont été revues et corrigées. La chute des prix na pas été aussi abrupte qu’on pouvait le craindre, mais on a constaté des taux d’invendus croissants. La photographie plasticienne se cale-t-elle sur cette donne ? Pas tout à fait.
Tout d’abord, rare sont les photographes à avoir vu leurs prix s’envoler avant la crise dans des proportions délirantes. Plus encore, les cotes avaient chuté bien avant que la bulle de l’art actuel n’explose. D’après Artprice, les prix sont restés stables de septembre 2007 à mars 2008 avant de baisser de 17 % entre mars 2008 et janvier 2009. Mais, depuis janvier, les prix ont progressé de 6 %. La dévaluation ayant été plus rapide, la reprise s’est aussi opérée plus tôt, dès janvier 2009.
Gursky, 10 % d’invendus
De fait, les stars de la photo n’ont pas vu leur étoile décliner aussi brutalement qu’on pouvait le craindre. L’Allemand Andreas Gursky et l’Américaine Cindy Sherman ont tous deux enregistré leurs records en 2007. Le premier a été bombardé le photographe le plus cher au monde avec le record d’1,7 million de livres sterling décroché par 99 Cent II chez Sotheby’s. La même image avait été adjugée 2,4 millions de dollars un an plus tôt chez Phillips.
Ironiquement, Andreas Gursky a réalisé plusieurs prises de vue des bourses de Singapour, New York ou Hong Kong montrant un monde grouillant telle une fourmilière, aux codes difficiles à déchiffrer. Une belle métaphore de l’implosion qu’a connue ce système avec les effondrements boursiers successifs depuis deux ans.
Gursky lui-même a fait les frais de la récession. D’après Artprice, son pourcentage d’invendus est passé de 19,05 % entre janvier et septembre 2008 à 28,57 % entre septembre 2008 et juin 2009. Lors des ventes en février et en juin, ses clichés stagnaient dans la fourchette d’estimations, parfois basse.
Cindy Sherman revue à la baisse
Caméléon, maître de la mise en scène et redoutablement inventive, Cindy Sherman avait réussi à slalomer avec la crise des années 1990. En 1996, le Museum of Modern Art (MoMA) de New York a acheté pour un million de dollars sa première série de travail, Untitled Film Stills. Son marché a connu son apogée avec une photo de 1981, envolée pour 2,1 millions de dollars chez Christie’s voilà deux ans. La progression est spectaculaire : cette image fut adjugée une première fois pour 259 000 dollars chez Christie’s en 2000, avant d’atteindre 478 400 dollars chez Phillips quatre ans plus tard lors de la vente Veronica’s Revenge.
Les choses ont-elles beaucoup changé ? « Nous avons depuis la crise baissé les prix de Sherman. Une pièce importante qui valait dans les 2 millions vaut aujourd’hui entre 1,2 et 1,3 million de dollars. Mais la plupart de ses photos se négocient autour de 200 000 dollars. On ne peut pas continuer à pratiquer les anciens prix. C’est la seule façon pour que les gens continuent à acheter », confie le marchand new-yorkais Per Skarsted.
Goldin, désenchantée
L’objectif désenchanté et intime de Nan Goldin ne séduit plus comme avant. La photographe connaît depuis longtemps une cote en demi-teinte, épousant presque les vicissitudes de sa propre existence.
En 1991, le marchand de design Didier Krzentowski avait acquis la quasi-totalité de sa première exposition en France, organisée simultanément par Gilles Dusein à la galerie Urbi et Orbi et agnès b. à la Galerie du Jour. Les prix voguaient alors autour de 200 et 300 dollars. Deux spécimens de cette exposition s’étaient retrouvés dans la vente Krzentowski en 2005 chez Phillips. Ils étaient estimés alors entre 5 000 et 7 000 dollars. La fourchette était identique pour Roommate in her Chair, Boston, 1972, une photo en noir et blanc, achetée pour 12 000 francs en 1997 chez Yvon Lambert. Elle s’est contentée de 9 000 dollars. D’après Artprice, son pourcentage d’invendus est passé de 15,87 à 39,68 % depuis la crise.
Rappelons toutefois qu’à l’inverse de nombreux artistes, Nan Goldin n’a jamais voulu que son œuvre soit chère ou élitiste.
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La cote en baisse des plasticiens
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°618 du 1 novembre 2009, avec le titre suivant : La cote en baisse des plasticiens