Événement incontournable dans la vie de tout collectionneur et amateur d’art, la XVIIIe édition de la Biennale internationale des antiquaires ouvre ses portes du 13 au 29 septembre au Carrousel du Louvre, où sont attendus environ 100 000 visiteurs. 120 marchands, dont 30 Britanniques, Allemands, Belges, Italiens et Américains, prendront part à une manifestation considérablement plus étoffée que celle de 1994 qui, organisée pour la première fois en-dehors du Grand Palais – fermé pour travaux – n’avait pu accueillir que 98 exposants.
PARIS - Malgré l’abandon par le couturier Christian Lacroix de son projet de décoration pour le foyer du salon, annoncé en juillet, la présentation fastueuse de la Biennale devrait à nouveau se démarquer de sa principale rivale parmi les grandes foires internationales, le TEFAF de Maastricht. Architecte du salon parisien depuis 1988, Patrick Jaouanet a conçu un décor qui revêt d’une couleur différente – aux accents provençaux : ocre, terre verte, terre rouge, bleu ardoisé –, chacune des salles du Carrousel. L’entrée des stands sera ornée de moulures style Louis XIV de teinte vieil or. Pour la gastronomie, dix-sept chefs, venus des différentes régions de France, se relaieront pour faire goûter leurs spécialités au restaurant de la Biennale.
Plus grande, tournée plus que jamais vers l’accueil des collectionneurs américains (voir à ce sujet notre article dans Vernissage), la Biennale sera également plus variée. Pour la première fois depuis plusieurs années, l’art primitif, surtout africain, sera représenté, et en quantité, grâce à Philippe Guimiot, de Bruxelles, Alain de Monbrison, de Paris, Alain Dufour, de Ramatuelle, et la galerie Ratton-Ladrière, spécialiste également des objets d’art européens. La galerie Mermoz exposera, elle, un choix d’objets africains, sud-américains et océaniens.
Autre innovation, l’art moderne (jusqu’en 1950) sera proposé pour la première fois par les galeries parisiennes Cazeau-Béraudière, Piltzer et Daniel Malingue ; l’art ancien d’Extrême-Orient, en plein essor, chez pas moins de huit marchands : la galerie Ming-K’i, de Waardamme en Belgique, qui expose pour la première fois, Robert Hall (spécialiste des tabatières chinoises), Michael Goedhuis et Christian Deydier, de Londres, ainsi que deux galeries bruxelloises, Gisèle Croës et Zen Gallery. Jacques Barrère, de Paris, montrera notamment des sculptures en bois polychrome du IVe au IIIe siècle avant J-C. : des gardiens de tombeaux et un phénix surmontant un tigre.
On trouvera le tableau XIXe et début XXe siècle sur le stand des galeries Schmit, Hopkins-Thomas, Philippe Heim, Alain Amato et Giacomo Wannenes, et la peinture ancienne chez quatorze grands spécialistes internationaux. Mais malgré toute sa diversité – la Biennale couvre également la céramique (une douzaine d’exposants), les tapis et les tapisseries, la sculpture, l’art populaire, les livres anciens, la numismatique, la haute époque et le dessin, ainsi que les grands meubles et objets Art déco –, le salon parisien doit avant tout sa réputation au grand mobilier français.
Celui-ci sera donc présenté dans toute sa splendeur et toute sa sophistication. Yves Mikaeloff, par exemple, exposera une commode en laque estampillée Jacques Dubois (vers 1740-1745), et une paire de fauteuils estampillés L. Cresson, vers 1740. Une magnifique commode parisienne, vers 1740–1745, estampillée D.F., chez Didier Aaron, comporte des panneaux en laque de Chine d’époque Kangxi et en vernis Martin, surmontés d’une plaque de marbre d’Alep. Chez Camille Burgi, on pourra voir une desserte Louis XVI d’Adam Weisweiler, dont la façade des tiroirs est ornée d’une rare laque sur tôle.
Jean Gismondi, grand spécialiste du mobilier Boulle, mettra en vedette une paire de coffres de mariage, marquetés d’écaille brune et de rinceaux de laiton par André-Charles Boulle, vers 1710, ainsi qu’un bureau plat Régence de François Lieutaud, d’une sobre élégance. La galerie Léage proposera une console Louis XV, en bois richement sculpté d’enroulements et de guirlandes de fleurs. Aveline présentera une rare table Louis XVI en jaspe antique jaune, supportée par une console à pans coupés, estampillée Saunier ; Sapjo, de Monte-Carlo, un bureau à cyclindre en bois de placage marqueté, de Pierre Roussel, alors que l’on pourra admirer, chez Jacques Perrin, un bureau plat en acajou, vers 1810, par Jacob-Desmalter.
L’avis du conservateur
Daniel Alcouffe, conservateur général chargé du département des objets d’art au Musée du Louvre, estime que la Biennale des Antiquaires est "capitale pour le monde des musées".
Le JdA : Quelle importance représente la Biennale pour le monde des musées ?
Daniel Alcouffe : La Biennale est capitale pour le monde des musées. Elle permet aux conservateurs à la fois de repérer rapidement les objets achetés en vente publique par le commerce d’art, dont les conservateurs intéressés n’ont pas pu, pour différentes raisons, se porter acquéreurs au moment de la vente, et les objets importants découverts par les antiquaires sur le marché privé. Le départements des Objets d’art y a fait des acquisitions notables, surtout des œuvres de François-Thomas GerÂmain réalisées pour Joseph 1er du Portugal (M. Segoura, 1982) ; également une paire de vases en porcelaine de Sèvres (M. Segoura, 1986) et un biscuit de Sèvres représentant le duc de Montausier (M. VanÂdermeersch, 1988).
Quelles sont les spécialités qui vous intéressent le plus aujourd’hui ?
Nous continuons à être intéressés par tous les domaines couverts par le département, avec un intérêt plus marqué qu’autrefois pour le XIXe siècle.
Comment a évolué cette manifestation au cours des dix dernières années ?
Elle a peu évolué, étant toujours consacrée principalement au XVIIIe siècle. Il me semble que certains domaines, qui ont pourtant un public, sont insuffisamment représentés (tel le XIXe siècle) ou même, curieusement, de moins en moins représentés comme l’Art nouveau ou l’Art déco.
Des Biennales vous ont-elle particulièrement marqué ?
Je regrette les décors de certains stands des années soixante et soixante-dix dus à Daniel PasgriÂmaud, malheureusement disparu.
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La Biennale des Antiquaires joue le faste et l’innovation
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°28 du 1 septembre 1996, avec le titre suivant : La Biennale des Antiquaires joue le faste et l’innovation