Y a-t-il une théorie des climats applicable à l’art ? On pourrait le penser au vu des œuvres de l’artiste cubain Kcho. Avirons et kayaks constituent depuis dix ans le vocabulaire privilégié de cet insulaire. Vivre dans un pays géographiquement et politiquement isolé laisse manifestement des traces ! Formé à la fin des années 1980, Kcho joue sur la notion d’artisanat en recyclant des matériaux populaires. Une démarche qui épouse on ne peut mieux la philosophie de survie des Cubains. Vers 1993, alors qu’il aborde le thème du bateau, son œuvre se teinte, presque à son corps défendant, de politique. À ceux qui lui demandent alors pourquoi il ne quitte pas l’île de Fidel Castro, il répond imperturbablement : « Cuba est ma patrie » ! Dans l’exposition que lui consacre la galerie Louis Carré, on retrouve le thème de l’empilement de canoës en bois, métaphore des essais répétés des balseros, ces fameux boat people cubains en quête d’Eldorado au large des côtes de la Floride. Ces tentatives s’avèrent souvent aussi vaines que celle de Sisyphe tentant de remonter son rocher. L’idée de fuite se confirme dans la série des Objets rêvés (7 000 et 10 000 euros), constitués aussi bien par une petite bicoque percée de rames qu’une de ces chevrotantes voitures cubaines, elle aussi piquée d’avirons. L’isolement du pays se ressent dans les Nucleos del tiempo, huit cloches en verre enfermant ses objets en bois, symbole s’il en est d’un monde en vase clos. L’exposition compte enfin une quinzaine de dessins au fusain (6 000 à 15 000 euros), baptisés Voyage intérieur. Car malgré ses allégories d’exode, la fugue de Kcho ne peut qu’être intérieure.
« Kcho », PARIS, galerie Louis Carré & Cie, 10 avenue de Messine, VIIIe, tél. 01 45 62 57 07, jusqu’au 29 octobre.
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Kcho, le voyageur immobile
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°573 du 1 octobre 2005, avec le titre suivant : Kcho, le voyageur immobile