Comment se porte le marché de l’art contemporain chinois ?
Il est en train d’éclater en Asie. Le phénomène est nouveau et concerne les acheteurs chinois des grandes villes comme Shanghaï ou Pékin qui sont de jeunes chefs d’entreprise de 35-40 ans, relayés par des communautés de riches Chinois d’outre-mer, c’est-à-dire de Hongkong, Singapour, Taïwan mais aussi de Jakarta, de Thaïlande et des Philippines. Ces entrepreneurs détiennent un pouvoir économique important et s’intéressent à l’art contemporain chinois à la fois pour des raisons historiques et spéculatives. Parce qu’il y a une évolution naturelle de l’art moderne vers l’art contemporain (les gens veulent vivre avec leur époque), et que les acheteurs chinois se libèrent des influences étrangères et cherchent à faire monter leurs propres artistes de la même façon que les États-Unis soutiennent les leurs. Sotheby’s et Christie’s, dont les ventes d’art asiatique sont concentrées à Hongkong, cherchent à juste titre à développer ce marché. Pour la première fois cette année, Sotheby’s présentait le 31 octobre 50 œuvres contemporaines (dix fois plus que l’an dernier) dans un catalogue tiré à part. Une preview des lots a circulé un peu partout en Asie et aussi à New York, où l’intérêt pour la photo contemporaine d’artistes chinois demeure. Les résultats ont été très bons, notamment pour un dessin (une projection à la poudre à canon) de Cai Guo-Qiang, qui a été adjugé 115 686 dollars (89 500 euros) chez Sotheby’s. Pour certains artistes dont les œuvres sont très peu disponibles dans le commerce, les enchères ont dépassé les prix en galeries : Great Disney, un tableau politique pop art chinois de Wang Guangyi, est monté jusqu’à 64 560 dollars le 31 octobre chez Christie’s, et un petit format récent de Zhang Xiaogang, présenté par Sotheby’s le même jour, a fait 54 000 dollars, soit trois fois sa cote d’il y a deux ans.
Quelles œuvres vous ont marqué récemment ?
La première Biennale d’architecture de Pékin, qui s’est ouverte le 18 septembre, n’était pas très bien organisée mais ne manquait pas de créativité s’agissant d’œuvres de jeunes artistes chinois. Les travaux sur le thème « Construction/Destruction » m’ont particulièrement intéressé. Et puis j’ai bien aimé l’exposition montée par Martina Koppel-Yang à la Shanghaï Gallery of Art, installée dans le fameux immeuble « Three on the Bund », lequel a été restauré par Michael Graves (un des endroits qui ont fait beaucoup de bruit à Shanghaï). La manifestation portait sur les artistes chinois travaillant en France : les installations de Huang Yong-Ping, les murs d’écriture de Yang Jiecang, les sols aux motifs floraux de Michael Lin Minghong et aussi un jeune artiste algérien, Adel Abdessemed, qui m’a épaté avec une installation de plusieurs vidéos montrant des chats lapant du lait, posée aux pieds des colonnes de la galerie.
Quelle est votre actualité ?
Pour que l’art contemporain chinois soit plus connu et plus développé, je poursuis mes expositions monographiques d’artistes chinois à Paris à la galerie Loft, notamment avec les peintures de Liu Wei à partir du 17 février 2005. J’enchaînerai avec une exposition d’artistes indonésiens très créatifs qui sont très peu connus en France bien qu’ils aient une couverture artistique incroyable. Je veux parler de Heri Dono, dont une installation était exposée à la Biennale de Venise 2003, et d’Agus Suwage, qui réalise une peinture surréaliste asiatique fascinante que l’on voit pour l’instant seulement dans les musées en Asie. L’Indonésie est, comme la Chine, un pays traditionnel qui est en train de s’ouvrir à la modernité. En comparaison, si les Indonésiens sont plus sensibles que les Chinois à l’écologie, la consommation des marques et la recherche d’identité sont des préoccupations artistiques communes à ces deux pays.
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Jean-Marc Decrop, marchand d’art contemporain chinois à Paris
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°203 du 19 novembre 2004, avec le titre suivant : Jean-Marc Decrop, marchand d’art contemporain chinois à Paris