Miami

Il était une foire… qui eut beaucoup de « off »

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 1 décembre 2006 - 577 mots

Alors que de nouveaux événements parallèles bourgeonnent à Miami, Art Basel Miami Beach renforce sa primauté du 7 au 10 décembre.

 MIAMI BEACH - Pour sa première participation à une foire, la galerie Mary Boone (New York) prévoit d’exposer sur Art Basel Miami Beach une œuvre de Barbara Kruger à la fois moralisatrice et propitiatoire : You can’t drag your money into the grave with you. Cet aphorisme expliquerait-il la transhumance massive à Miami des collectionneurs nord et sud américains, avides d’y dépenser leurs deniers ? L’ambiance festive, pour ne pas dire décadente, de ce grand Lunapark de l’art contemporain explique aussi ce jamboree. Une ambiance dans laquelle les achats relèvent plus du shopping que de la collection.
Cette année, la foire renforce ses concepts tout en les rafraîchissant. Certains exposants du secteur Art Position dépoussièrent ainsi le principe des containers, lequel accusait ses limites l’an dernier. Bortolami Dayan (New York) lui préfère un pavillon multifonctionnel où la Mountain School of Arts dispensera, notamment, des cours gratuits. De son côté, la Brésilienne Laura Belem, présentée par Punto Gris (Puerto Rico), a opté pour un établi de maraîcher. Un clin d’œil à la quête de « produits frais » des collectionneurs ! Face à ces propositions non-commerciales, d’autres jouent la carte des stars montantes. Il en va de même pour Zach Feuer (New York) avec une série de portraits de Christoph Ruckhaberle. Les prix voguent de 7 000 à 60 000 dollars contre 3 000 à 24 000 dollars voilà à peine trois ans. C’est qu’entre-temps, il est rentré dans les collections de puissants prescripteurs locaux comme les Rubell et Rosa de la Cruz…
La section Art Nova, dédiée aux nouvelles œuvres d’un à maximum trois artistes, ressemble à un mini-État dans l’État, d’autant plus qu’en deux ans, le nombre des exposants y a grimpé de 13 à 61 ! Pour sa première participation à ce secteur, Kamel Mennour (Paris) propose Habibti, un squelette en verre de Murano d’Adel Abdessemed, une vidéo de Miri Segal et des images des Maisons hantées de Zineb Sedira. En projet extérieur, il prévoit une grande pergola de Daniel Buren. D’autres focalisent sur des one-men-show. C’est le cas de Modern Art (Londres) avec Nigel Cooke, coqueluche de collectionneurs comme François Pinault, ou Brownstone (New York) avec Zilvinas Kempinas, entrevue à Paris dans l’exposition « Cinq milliards d’années » au Palais de Tokyo.
Cette logique de zoom sur un artiste se poursuit dans les Kabinetts, avec une installation de Richard Jackson, Ducks in the Men’s room, chez Yvon Lambert (Paris-New York). Dans le secteur moderne, point fort du salon l’an dernier, la galerie Hopkins-Custot (Paris) promet un beau florilège d’œuvres de Dubuffet, notamment une truculente encre sur carton, le Dentiste, et une toile de 1950, les Palefreniers. Le climat général, plus enclin aux jeunes pousses qu’aux vieux routiers, a toutefois conduit Lelong (Paris-Zurich-New York) à briguer une place au milieu des galeries contemporaines plutôt que modernes. Son accrochage favorise du coup Alfredo Jaar ou Helio Oiticica aux dépens de son stock historique. « Au fond, on n’a pas besoin des foires pour vendre un Miró ou un Tapiès, observe Jean Frémon, codirecteur de la galerie. En revanche, si on ne fait pas attention à rajeunir les stands, on risque de se faire marginaliser. »

Art Basel Miami Beach

7-10 décembre, Miami Beach Convention Center, Miami Beach, www.artbaselmiamibeach.com, tlj 12h-20h. - Directeur : Samuel Keller - Nombre d’exposants : 200 - Visiteurs en 2005 : 36 000

Ouvrir une galerie à Miami

Les galeristes Emmanuel Perrotin (Paris) et Luis Adelantado (Valence) se sont tous deux implantés à Miami en décembre 2005. Avec un chiffre d’affaires de 4,7 millions d’euros en un an, Emmanuel Perrotin savoure le charme de la Floride. « La présence à Miami m’a apporté une légitimité et une médiatisation, observe-t-il. Elle m’a permis d’être moins français. J’ai pu aussi ressouder mes liens avec mes artistes. » Les enseignes new-yorkaises ne risquent toutefois pas de s’établir de sitôt à Miami. Exemptées de la « sale tax » [taxe sur la vente] d’environ 7 % lorsqu’elles vendent hors de leur État, notamment, sur Art Basel Miami Beach, elles seraient contraintes de la régler, si elles ouvraient une antenne en Floride. Le jeu n’en vaut pas la chandelle.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°248 du 1 décembre 2006, avec le titre suivant : Il était une foire… qui eut beaucoup de « off »

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