Un pot au lait provenant du service de la laiterie de Marie-Antoinette à Rambouillet est apparu en vente publique.
Ce service, dit « étrusque », fut commandé en 1787 à la manufacture royale de Sèvres pour la laiterie que Louis XVI venait de faire construire sur le domaine de Rambouillet afin d’être agréable à la reine.
Inspiré de la collection de vases étrusques réunie par Vivant Denon, le décor de ce service a été réalisé d’après des dessins de Jean-Jacques Lagrenée, alors directeur de la manufacture. Il représente des animaux associés au lait : chèvres et chevreaux, vaches et veaux, encadrés de motifs végétaux, dans des associations de couleurs originales (rouge, noir, jaune, violine…) sur un fond de porcelaine d’une blancheur lactée. Le service de 65 pièces fut en grande partie dispersé durant la Révolution. En 1803, 17 pièces sont recensées. Trois sont aujourd’hui conservées au Musée national de la céramique de Sèvres. Redécouvert il y a quelques années, un gobelet à anses étrusques avec sa soucoupe a été adjugé 160 000 euros, le 23 juin 2000, à Drouot chez Piasa.
Le pot à lait vendu le 11 février a été apporté à la SVV Aguttes, à Neuilly, « au milieu d’un ensemble de bibelots destinés à nos ventes courantes, rapporte Claude Aguttes, le commissaire-priseur. Il a été extrait d’une caisse par des employés de la société pour ses qualités esthétiques et son originalité afin d’être présenté à notre expert, Vincent L’Herrou ». Mais l’expert ne reconnaît pas la pièce royale. Jugeant l’aspect de l’objet « peu habituel et sa marque de Sèvres assez grossière », il le catalogue comme « verseuse » dans le « genre de Sèvres » et le renvoie en vente courante, sur une estimation de 200 à 300 euros, sans prendre la peine de consulter les archives de la manufacture de Sèvres. Néanmoins, la pièce à anse à tête de chèvre, dont les cornes rejoignent le col de la verseuse et réapparaissent à l’intérieur en trompe-l’œil, retient l’attention de la jeune femme en charge du département des céramiques. Cette dernière décide de la présenter le 14 décembre 2010, dans une belle vente neuilléenne de mobilier et objets d’art, malgré la faiblesse de l’estimation. Elle y ajoute quelques photos qui mettent l’accent sur cette jolie et curieuse trouvaille.
À parution du catalogue, le lot est identifié par plusieurs connaisseurs. Rapidement informé de l’origine et de la rareté de ce pot à lait, Vincent L’Herrou comprend qu’il s’est trompé. Il retire le lot de la vente avant son exposition, « pour le présenter de façon conforme à sa qualité ». La vente du pot à lait a finalement eu lieu le 11 février à Drouot, sur une estimation de 200 000 euros. L’objet n’a pas de passeport d’exportation. Mais cela n’a pas empêché les enchères de flamber, au grand dam des musées français qui avaient envisagé la préemption. Passé le seuil de 400 000 euros, la bataille d’enchères s’est poursuivie au téléphone entre deux collectionneurs américains. Il a été emporté par l’un deux pour 1,1 million d’euros. Enfin presque. Car le pot pourrait être prochainement classé « trésor national ». Si c’était le cas, l’enchère serait annulée, comme l’a annoncé le commissaire-priseur avant la vente. Démarreraient alors, avec le vendeur, des négociations pour une acquisition à l’amiable par l’État français.
Service « étrusque » de la laiterie de Marie-Antoinette à Rambouillet
Date de fabrication : 1787
Fabricant : manufacture royale de Sèvres p Technique : porcelaine dure
Hauteur : 24,5 cm
Expert : Vincent L’Herrou
Estimation : 200 000 à 300 000 euros
Adjudication : 1,1 million d’euros
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Focus : Service de Marie-Antoinette - Pot au lait, Sèvres, 1787
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°342 du 4 mars 2011, avec le titre suivant : Focus : Service de Marie-Antoinette - Pot au lait, Sèvres, 1787